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Julien Lefèvre devant le Plaza Athénée - l.allafort
Julien Lefèvre devant le Plaza Athénée - l.allafort

Rencontre avec Interview de Julien Lefèvre, chef boulanger du Plaza Athénée (vidéo)

Il est à la tête de la boulangerie du palace de l’avenue Montaigne, Julien Lefèvre a carte blanche pour présenter une gamme de pains et de viennoiseries maison. Rencontre et confidences depuis le laboratoire du Plaza Athénée.

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- Quel est votre parcours et votre formation ? (écoles, apprentissage, voyages, expériences mémorables, mentor)

J’ai 27 ans, je travaille depuis 5 ans au Plaza Athénée et 8 mois comme chef boulanger. Durant cette période, j’ai fait une pause en janvier 2020 en allant vivre une nouvelle expérience à Londres à un poste sous-chef boulanger pour un groupe de 8 hôtels, puis la crise du covid m’a forcé à rentrer, et j’ai exercé à différents endroits avant que l’ancien chef boulanger ne me propose de revenir travailler au Plaza et de prendre son poste. J’ai passé un Bac professionnel boulangerie pâtisserie à l’EPMTTH (’École de Paris des Métiers de la Table) (17e Paris) ainsi qu’un CAP boulangerie en candidat libre. J’ai fait mon apprentissage sur 3 ans dans la même petite boutique sur Nanterre (92), et c’est là où je suis tombé amoureux de la boulangerie car j’ai eu un très bon professionnel qui m’a formé. J’ai fait ensuite quelques saisons, dont une à Beaulieu-sur-Mer, à Terre-Blanche.

- Qu’est-ce qui vous a séduit en venant au Plaza ?

La rigueur et c’est là aussi où j’ai appris à faire de la viennoiserie. La petite boutique où j’exerçais en apprentissage achetait du congelé, alors qu’ici toute la viennoiserie et les préparations annexes sont faites maison. Si j’ouvre ma boutique plus tard, j’aimerais reprendre ces codes-là.

- Pouvez-vous nous décrire une journée-type ?

Les boulangers arrivent à 3h du matin, s’occupent de pétrir toutes les pâtes pour la journée et le lendemain matin. On travaille avec 3 méthodes de fermentation différentes : la pousse lente, le pointage bac et le direct. On passe à la cuisson de la viennoiserie vers 4h car, entre 5h30 et 6h30 on a le petit-déjeuner pour le room-service et en salle du restaurant gastronomique de Jean Imbert qui doit être cuit et prêt pour 7h. Ensuite, nous avons tout le tourage, une dizaine de pâtons tous les jours, il faut compter 1h (tour simple, tour double) et 1h de repos derrière. C’est 3 à 4h de viennoiserie par jour. Puis on s’occupe de tout le façonnage du pain pour la journée et le soir, la cuisson se fait vers 10h pour le restaurant Relais, pour le room service et le bar Galerie. On a beaucoup de préparations l’après-midi et vers 17h on commence les cuissons pour les restaurants du soir où là vient s’ajouter le restaurant gastronomique. La journée se termine vers 18h. On est sur 2 shifts avec 2 équipes différentes.

- Comment est constituée votre équipe ? (combien de personnes, quels postes, organisation au cours de la journée)

Nous sommes 6 avec 2 apprentis. Il faut savoir qu’au Plaza tout le monde sauf les chefs et les sous-chefs travaillent 4 jours et a 3 jours de repos. Nous sommes ouverts 7/7, et nous sommes 3 à 4 personnes par jour à travailler, les laboratoires sont petits donc c’est largement suffisant.

- Comment travaillez-vous la production de pain : combien de pains différents ? gestion des quantités à fournir ?

En pain, on est par service, entre minimum 100 pièces et 250 pièces, car on ne fait que de petites pièces, des petits pains de table qui prennent du temps à réaliser. On compte 1 pain et demi par personne à peu près. Après s’ajoutent les événements extérieurs qui vont nous demander beaucoup plus de travail. Côté viennoiseries, on a une gamme basique, environ 150 pièces produites pour les journées « classiques » et on peut monter jusqu’à 500, le week-end (nous avons le brunch le dimanche) ou selon les événements.

- Avez-vous des demandes spéciales parfois ?

Ça peut arriver oui. On a des clients qui viennent tous les week-ends et qui aiment le kouign-amann, donc on leur en fait spécialement pour eux, par exemple. On a eu par le passé des demandes de bagels – on n’en fait pas ici et on ne savait pas en faire – et on a appris à en faire pour un client qui est resté 3 mois dans l’hôtel. Nous sommes là à la demande du client, c’est-à-dire que même si un produit est arrêté, qu’on a changé la gamme, si un client le redemande, on se tient prêt à pouvoir lui servir dans les 24h pour répondre à son souhait.

- Proposez-vous du pain sans gluten ?

Le pain sans gluten c’est plus compliqué car au niveau des normes, on n’a pas le droit d’en faire ici puisqu’il y a de la farine. En résumé, il faudrait un laboratoire exprès, un four exprès, un pétrin exprès etc, pour une production sans gluten : beaucoup de conditions sont nécessaires pour cela et nous ne pouvons les remplir ici. Si besoin de pain sans gluten, c’est l’unique fois où nous faisons appel à une société extérieure. Toutefois, on a une forte demande (en particulier en période de fashion week), donc peut-être qu’on songera prochainement à le produire nous-mêmes.

- En termes d’équipement, que privilégiez-vous ?

De petit équipements mais de qualité ! Nous ne sommes pas comme dans une boulangerie classique : ici, on a de petits batteurs, petits pétrins, petits laminoirs, principalement pour une question de place !

De petits espacecs impliquent du petit équipement @l.allafort

- Comment gère-t-on, au cœur d’un palace, la quantité de pains à produire, les commandes ?

Nous avons un logiciel commun à tout l’hôtel qui nous permet de savoir le nombre de réservations sur toute la semaine. Souvent, en arrivant à 3h, je regarde le matin pour avoir les dernières mises à jour pour le midi et pour le soir, ainsi on s’adapte. Comme nous ne travaillons que sur du direct, on peut facilement s’adapter et modifier les quantités en fonction.

- Combien de variétés de pain sont proposées ?

Tout dépend des services. Pour le room service, nous allons avoir 3 variétés de pain, pour le Bar Galerie, on en a 2, pour la brasserie une seule variété et sur le restaurant gastronomique, on en a 3 aussi. Il s’agit du pain de table, mais nous réalisons aussi des pains spéciaux pour accompagner certains plats : pour le Relais Plaza, nous avons la foccacia ou le pain de campagne, on fait aussi des pain burgers pour le Room service et le bar Galerie, il y a aussi le pain perdu pour le petit-déjeuner. La clientèle attend du « traditionnel français » aussi, donc on propose du pain blanc, du pain aux céréales, de la tradition, qui feront l’unanimité auprès de notre clientèle internationale, des USA à l’Asie.

- Tout est fait maison donc, mais est-ce que tout est exclusivement au levain ?

Nous ne faisons pas tout au levain, déjà parce que nous fabriquons beaucoup de petites pièces, le 100% levain apporterait beaucoup d’acidité et potentiellement un peu d’irrégularité qu’on ne peut pas se permettre dans un palace. On met du levain dans notre pâte à croissant, dans le feuilletage et finalement tous les pains ; on travaille avec un levain dur, un levain liquide et un levain dur de farine de gruau pour la pâte à croissant. On est sur un rapport levain/levure (50%). Ce serait un grand plaisir de passer sur du tout levain, mais il faudrait arrêter les petites pièces. Les gens viennent aussi chercher un visuel, qu’on aura moins en travaillant en 100% levain, il faut être clair : le pain n’est pas la pièce maîtresse dans un palace, c’est un plus, un détail qui compte mais ce n’est pas le produit recherché comme c’est le cas quand on va dans une boulangerie.

- Côté créativité quelle est votre territoire d’expression ? Quels exemples ?

Le gros croissant à partager par exemple (environ 200g) : c’est donner l’expérience du croissant français de taille. La particularité de ce croissant, et de tous nos croissants c’est qu’ils sont au levain, un levain de panettone qui vient d’Italie. Comme nous cuisons les croissants très tôt, à 5h du matin, ce levain apporte une meilleure conservation : il reste très croustillant, très moelleux et plus longtemps et ainsi il garde sa fraîcheur toute la journée. On y ajoute un peu de miel aussi, mais après on reste classique.

Le gros croissant, la brioche, font partie du petit déjeuner servi au Plaza Athénée. @

l.allafort

Découpe du croissant XXl

- Avec quels types de farines travaillez-vous ?

On travaille avec beaucoup de moulins, on essaye d’aller se sourcer un peu partout, avec des petits meuniers indépendants, je travaille au sourcing !

- Qu’en est-il des accords mets et pains ? Etes-vous en collaboration étroite avec le(s) restaurants du Plaza ?

C’est un sujet qui est abordé oui. Le chef cuisinier va m’aiguiller sur une idée qu’il voudrait et je vais aller dans son sens et suivre sa direction. On déguste ensuite ensemble voir si l’accord est parfait mais j’ai plutôt carte blanche là-dessus. Je peux proposer les produits qui je pense iront dans la bonne direction.

- Quelle est la création dont vous êtes le plus fier ?

Le petit déjeuner. C’est la première fois que le boulanger peut présenter ses viennoiseries dans un palace. Ça se fait très peu, voire jamais, que ce soit dans un palace parisien ou dans le monde ! Souvent, c’est un buffet qui est proposé, alors qu’ici ce n’est pas du tout le principe : ici on va découper la viennoiserie devant le client, lui apporter, lui expliquer la provenance, la manière dont cela a été préparé… en gros qu’elle est faite maison ! Les clients ne sont pas accoutumés à cette idée dans un palace ! C’était un vrai challenge pour moi et je suis fier de présenter cette gamme, de l’avoir mise en place pour Jean Imbert et le Plaza Athénée.

Lê Thi Mai Allafort

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