
reportage magasin
Dragonne Pizza, offre bio et de saison à Grenoble
Avec ses pizzas bio aux légumes de saison, déclinées en version vegan et sans gluten, Cédric Reynier propose un repas sur le pouce sain, nutritif, responsable.
En ce matin de mars, dans leur local grenoblois, Cédric et Victor font cuire des endives. Pour quoi faire ? Une pizza aux endives, pardi ! « C’est un essai, on verra ce que ça donne », sourit Cédric Reynier. Lorsqu’on se spécialise dans les pizzas végétariennes et vegan à tendance bio et locale, il faut se montrer inventif. Cela ne fait pas peur à cet ancien informaticien, reconverti après un passage à l’École internationale de boulangerie (EIB). Sept ans après avoir fondé Le Pain des Cairns, une boulangerie bio sous statut Scop, il a eu besoin d’un nouveau défi. L’idée est venue en 2020, lors d’une fête à l’EIB au cours de laquelle des pizzas étaient servies. « J’ai réalisé que personne ne s’était lancé dans la pizza de qualité à pâte épaisse et au levain naturel, raconte-t-il. Alors j’ai décidé de le faire. » Prenant un congé sabbatique, il s’envole en Corse où il apprend les rudiments de la fabrication de la pizza boulangère romaine aux côtés de Matteo Gistri (boulangerie Farina).
De retour, il trouve un local à 60 mètres de son ancienne boulangerie. Il ouvre en juin 2021 Dragonne Pizza, clin d’œil à la sculpture-aire de jeux de 33 mètres de long sur la place Saint-Bruno, face à la boutique. Ce choix, plutôt qu’un nom italien, résume sa philosophie. « On préfère montrer notre ancrage dans le quartier et participer à un écosystème local, plutôt que revendiquer du “comme en Italie”, explique Cédric. Ce serait un non-sens écologique d’importer nos matières premières d’Italie. On travaille avec des plateformes locales d’approvisionnement, comme Manger bio Isère, et on achète des aromates au marché bio. » Et tant pis si les farines locales, qui ont moins de force que les Italiennes, sont plus difficiles à travailler…
Alvéolage
Pour apporter couleur et arôme, 10 % de petit épeautre sont incorporés à la farine de blé, ou 5 % de pois chiche à la farine de riz (pour la variante sans gluten). Le pétrissage est réalisé à vitesse lente. La pâte passe 3 heures 30 au chaud (23-24 °C), puis 12 heures au froid avant la seconde période de fermentation de 3 heures. « On recherche un bel alvéolage, une attaque croustillante et du moelleux, même sur les pâtes sans gluten », souligne Cédric. Peu satisfait de ses essais au levain naturel, il est passé à la levure, apportée en faible quantité. « En période de lancement, je ne pouvais pas me permettre une qualité inégale. Mais je continue à me former afin de passer au levain naturel, pour son intérêt technique et nutritionnel. »
La base des pizzas est une pulpe de tomates bio, française et « crue pour préserver le maximum d’arômes et de nutriments ».
Une précuisson des pizzas est réalisée la veille, permettant à l’équipe d’embaucher à 10 heures du matin et d’enchaîner les étapes suivantes à un rythme soutenu. « Une pizza qui reste des heures sur un étal ne fait pas envie, donc l’idée est d’avoir sans arrêt un flux de pizzas qui sort du four », explique Cédric.
Les clients, qui ont vue sur le labo, apprécient. Un gabarit en bois permet de découper les plaques de pizza en parts égales. Étalée à la main, la pâte est plus épaisse par endroits, ce qui donne des parts plus lourdes sans être mieux garnies. La vente à la part (environ 250 g) plutôt qu’au poids évite que des clients se sentent lésés sur la garniture.
Un grand soin est apporté à la présentation, le produit étant choisi en vitrine. La garniture généreuse est surmontée d’aromates frais pour la touche de couleur.
Les bords, peu appréciés, sont coupés (mais donnés sur demande). Les éventuels invendus de la veille, absents de la vitrine, sont vendus à moitié prix.
Recettes hivernales
Après avoir choisi parmi sept recettes, le client fait face à un dilemme : olives ou oignons ? « Chaque plaque comporte une moitié avec fondue d’oignons, l’autre avec rondelles d’olives, indique Cédric. Ainsi on va plus loin dans la personnalisation, sans avoir une gamme trop complexe. » Les formules aussi sont simples, avec un seul dessert (cookie maison à 1,50 €) et un choix de boissons locales et/ou bio.
Elles sont classées par teneur en sucre : chacun fait son choix en conscience. « Le but est de bien nourrir les gens, pas seulement d’apporter du plaisir immédiat », résume le gérant. Le fromage est juste dosé pour apporter du goût, du liant et de la protéine.
Les best-sellers sont la forestière aux champignons (seul légume non bio), suivi de la marguerite (sauce tomate et mozzarella bio). Des recettes originales ont toutefois égayé l’hiver : au fenouil, à la fondue de poireaux ou à la courge butternut, avec de la tomme locale au lait cru.
Grâce à l’offre sans gluten et/ou vegan (avec du tofu fumé au lieu du fromage), « les personnes suivant un régime spécial ne sont pas punies, sourit Cédric. Elles peuvent manger ou remanger de la pizza. Cela nous fait plaisir de leur proposer ce qu’elles ne trouvent pas ailleurs. » Après huit mois d’activité, il ne se verse pas encore un salaire. Mais les retours des clients et la progression des ventes sont très encourageants.
Repères
> Équipe : 1 binôme en journée, 1 en soirée (3 UTH (temps pleins) en tout)
> Surface totale : 60 m²
> Prix de la part : 3,20 €-3,90 €
> Activité : 50 % midi, 50 % soir ; 10-15 % sur commande pour des événements
> Fermeture : week-end
Dragonne Pizza propose depuis peu la livraison, grâce
à la société Sicklo. « C’est un service éthique, local et 100 % à vélo, précise Cédric. On impose un minimum de commande de 15 € car il coûte cher : 3,5 € de forfait auquel s’ajoute une commission proche de 30 %. » Les pizzas sont livrées à température ambiante. « Les clients la passent 5 minutes au four au moment choisi : la livraison ne leur met pas la pression sur l’heure de passage à table. »