L'écopain (et la solidarité) d'abord
A Montpellier, Lucas Martin y croit : il est possible de proposer des pains bios et locaux à des prix raisonnables. Il les vend dans sa boulangerie « L'écopain d'abord » mais aussi dans une épicerie solidaire... à prix libre !
« J'aimerais bien que tout le monde puisse acheter mes produits sans qu'il y a ait besoin de ce côté solidaire. Malheureusement, ce n'est pas possible ». Lucas Martin, jeune boulanger montpelliérain, propose donc plusieurs formules pour rendre accessible « au plus grand nombre » son pain au levain, en fermentation longue, fait avec des farines bios et locales moulues par le seul minotier de Montpellier, le moulin de Sauret. Primo : les prix sont raisonnables. « J'estime que le pain est un bien de première nécessité, donc il n'est pas trop cher, assure-t-il. En revanche, avec l'explosion des matières premières et de l'énergie, j'ai augmenté le tarif des viennoiseries et du snacking, qui n'étaient vraiment pas chers. » Les pains et viennoiseries de la veille sont, pour leur part, vendus avec une remise dans la boulangerie du quartier Clémenceau. Mais, plus original, le boulanger les met aussi à disposition, à prix libre, dans une épicerie solidaire du quartier Celleneuve. « L'endroit s'appelle L'Esperluette, c'est un lieu de vie, de rencontre, d'échange », sourit l'artisan. Mais aussi son berceau professionnel, qui lui a permis de se lancer : « Il n'avait pas de lieu de vente, donc on lui a proposé de vendre à l'Esperluette, se souvient Mathieu Roy, le coordinateur de l'épicerie associative. Et ça a bien plu. Alors, quand il a ouvert sa boulangerie, en 2021, on a trouvé cette solution : il dépose ses pains de la veille deux fois par semaine. Quand c'est à prix libre, des gens paient le bon prix, d'autres, qui ont moins les moyens, paient moins... »
« Ils donnent ce qu'ils peuvent »
«L'important, assure Lucas Martin, c'est qu'ils donnent ce qu'ils peuvent et qu'ils découvrent du bon pain qu'ils peuvent conserver plusieurs jours. Ils n'en auraient sans doute pas manger sans cela ». D'ailleurs, certains clients de l'Esperluette paient en Graines, la monnaie locale. « Les personnes solidaires ont ces Graines à 30% du prix mais moi, ça me rapporte 1€ pour une Graine, renseigne Lucas Martin. La différence est prise en charge par l'association. »
Lucas Martin propose également aux clients de l'Esperluette ses pains du jour, en commande, et au prix « entier ». Parmi ses habitués, Emmanuel, 47 ans, témoigne : « Il n'y a pas de boulangerie dans le quartier, donc c'est pratique d'avoir du bon pain à disposition, et pas très cher. En plus, on connaît Lucas, donc c'est très sympa. Je lui suis très reconnaissant de nous faire profiter de son pain alors que son activité fonctionne bien au centre-ville. »
Petit plus : « L'écopain d'abord » donne le pain de l'avant-veille « à des gens qui font de la récupération et le donnent à des associations caritatives. »
Pour Lucas Martin, ingénieur agronome qui s'est reconverti dans la boulange en 2018, l'objectif de rendre son pain « accessible le plus largement possible » semble donc en passe d'être atteint.
Légende : Lucas Martin avec la pâtissière Garance Aguilar. La boulangerie s'appelle « L'Ecopain d'abord », clin d'oeil à Georges Brassens, dont le nom est attaché à la ville voisine de Sète. Photo Christophe Zoia