Pourquoi ils ont choisi de travailler en fratrie
Si gérer un commerce avec son frère ou sa sœur peut présenter des avantages, il faut aussi connaître les limites d’une telle association. Pour anticiper les difficultés.
« Il y a des jours où c’est une chance… et d’autres, pas du tout ! » s’exclame Alain Garrelis, qui dirige Le Fournil de 1903-Boulangerie Garrelis avec son frère Jean-Luc, à Auros, en Gironde. Travailler en fratrie est, de fait, assez répandu dans le milieu des métiers de bouche… et peut d’ailleurs être un gage de réussite. Selon Challenges, les entreprises familiales sont économiquement “deux fois plus solides que les entreprises traditionnelles”*. Et pour cause, elles s’appuient sur l’engagement dans une entreprise souvent ancienne, transmise de génération en génération.
« C’est sûr qu’on a le sentiment d’avoir davantage de responsabilités dans une société comme celle-là », admet Gaëtan Garrelis, fils d’Alain, qui va reprendre Le Fournil de 1903 avec son frère Maverick. Il ajoute : « Nous sommes dans cette boulangerie depuis tout petits donc évidemment on y tient. Et nous y avons vu travailler ensemble plusieurs membres de la famille, c’est une habitude ! » Avec comme mot-clé, la confiance : « Je sais que Germain ne me fera jamais un enfant dans le dos », résume Baptiste Blanc, à la tête de quatre boulangeries Claudette, dans l’Hérault.
Définir des règles… et des postes
Une confiance qui n’empêche pas de définir des règles de cohabitation précise. « Nous sommes de la même famille donc nous savons que nous avons les mêmes valeurs, témoigne Germain Blanc. Mais tout est cadré d’avance en termes d’envies personnelles, d’organisation… et évidemment de finances. On a aussi les mêmes ambitions pour l’avenir de l’entreprise. » Ils ont également envisagé la sortie de l’un d’entre eux.
L’assurance Generali conseille aux familles qui s’associent de signer une charte comprenant quatre grands points : les valeurs de l’entreprise, les règles de gouvernance, les conditions pour intégrer un nouveau membre de la famille et les rôles de chacun. Un exemple de cette répartition des fonctions ? « Gérémie a des postes particuliers, dans lesquels je n’interfère pas trop, et il y a une partie que je gère moi-même, indique Sophie Bénézech, patronne de la Biscuiterie du Camarès, dans l’Aveyron, avec son frère. Il n’y a pas de concurrence et c’est bien de reconnaître le travail de l’autre… » Tout en étant un minimum polyvalent, pour pouvoir éventuellement le remplacer ! « Nous sommes à égalité, c’est important. Et c’est facile du coup de discuter, de prendre des décisions ensemble », reprend-elle.
Attention, toutefois, à ne pas dépasser les limites. « C’est vrai que des fois on se dit des mots qu’on ne dirait pas à un salarié », concède Alain Garrelis. Lui, qui va passer la main à ses deux fils, rapporte : « Ils ne se parlent pas trop fort entre eux. Mais s’il le faut, avec ma femme, on sera là comme arbitres. » Et dans les sociétés familiales, si la situation se tend trop, un regard extérieur peut avoir son utilité. Beaucoup savent qu’ils n’auront pas à aller jusque-là. Gaëtan et Maverick Garrelis sont même catégoriques : travailler avec leur frère est une chance… mais avec leur compagne, jamais !