Equipements de laboratoire Que choisir ?

Avant de se lancer dans la confection de chocolats, un minimum d'investissements en matériel est nécessaire. Sur quels critères se fonder pour faire le bon choix sans casser la tirelire ? Trois maîtres mots : facilité, flexibilité, évolutivité.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

Bien que la fabrication du chocolat demeure relativement traditionnelle et que la passion des consommateurs pour le produit soit toujours intacte, le chocolatier doit rester vigilant pour ne pas s'éloigner des attentes de ses clients qui, elles, évolueront sans l'attendre !

Etre en veille permanente sur son marché, que ce soit en termes d'emballages, d'idées de décoration, de matières premières, de recettes ou d'équipements, permet en fin de compte de ne pas rater les multiples occasions de vendre mieux et plus.

Aussi la chaîne de fabrication doit-elle rester souple et modulable à volonté pour répondre au surcroît d'activité (Noël, Pâques, Nouvel An…) et aux innovations que vous serez amenées un jour ou l'autre à proposer. Evidemment, équiper son laboratoire mérite de s'arrêter longuement sur la question.

Malgré les sollicitations des fabricants qui sont multiples et variées, il faut savoir raison garder pour faire les choix porteurs !

- Partir d'une simple « trempeuse » quand on commence est-il raisonnable ?

- Ou faut-il aller directement voir du côté des « tempéreuses continues » ?

- Et comment faire évoluer son équipement sans avoir à pousser un jour les murs du fournil ?

Bref, sur quels critères s'arrêter quand on se pose sérieusement la question de démarrer une activité chocolat ?

A la recherche du cristal rare

La clef de voûte du bon chocolat est le tempérage, et plus précisément la cristallisation du beurre de cacao présent dans le produit.

Alain Housset , directeur de Procitech et distributeur exclusif de la marque italienne Selmi en France, a travaillé longtemps dans le chocolat. Ingénieur de formation, il connaît parfaitement la question épineuse de la cristallisation. Il explique que « les principaux cristaux (alpha et gamma) qui se forment quand on refroidit simplement du chocolat fondu ne sont pas stables. Ils donnent aux bonbons un aspect mat, une texture huileuse et granuleuse et une mâche collante. Ces cristaux de beurre de cacao finissent par évoluer vers une forme stable (beta), ce qui se traduit en superficie par l'apparition d'un voile blanchâtre ».

Dès lors, suivre la courbe de cristallisation (définie au degré près pour chaque couverture) est une difficulté pour l'artisan qui n'a pas le coup de main. Après un chauffage vers 40-45°C suivi d'un refroidissement sur marbre des deux tiers environ jusqu'à 26-29°C (et ce, avec un « travail » permanent à la spatule !), il convient de réchauffer ensuite vers 30-32°C et de maintenir à cette température tout le temps nécessaire.

« La technique de tempérage permet en fait d'obtenir un chocolat liquide suffisamment riche en cristaux stables (environ 10 %). Ainsi, lors du refroidissement, ces « cristaux liquides » vont servir de modèle à la cristallisation finale, ce qui donnera un chocolat parfaitement brillant, cassant et homogène », poursuit Alain Housset.

C'est de cette base théorique difficile, mais incontournable, qu'il convient de partir quand on veut se plonger dans le sujet. Régis Bouet, maître chocolatier-confiseur et démonstrateur chez PatisFrance pour la marque belge Belcolade (finaliste au concours de l'un des MOF 2007) connaît les difficultés rencontrées par les artisans qui découvrent le travail du produit.

« La température est certes très importante, mais il ne faut pas oublier le temps, qui doit être suffisant, et surtout le mouvement, qui doit être permanent. Remuer le chocolat permet d'éviter les gros cristaux qui ont tendance à se former et de bien répartir les plus petits qui doivent coloniser la masse », conseille-t-il.

Débit assuré pour les enrobeuses à tempérage automatique ou continu.

Huile de coude ou beurre de cacao ?

Cela paraît certes complexe, mais rassurez-vous, le produit se laisse apprivoiser facilement. Si le tablage traditionnel vous semble difficile, il existe d'autres méthodes qui ont l'avantage de ne demander aucun investissement lourd, notamment pour ceux qui font de très petites quantités de chocolat ou qui veulent simplement « s'y essayer ».

« Dans la méthode par ensemencement, on incorpore de 20 à 30 % de pastilles solides dans du chocolat fondu à 40-45°C et on mélange jusqu'à arriver à 29-32°C ; la température exacte dépend du produit. Si la couverture est présentée sous un petit format, 30 % en poids seront nécessaires. S'il s'agit de plus gros morceaux, 20 % suffiront. Dans  la méthode au beurre de cacao, on refroidit d'abord la couverture fondue à 34°C (noir) et on incorpore 1 % de beurre de cacao en « gouttes » (cristallisé). On remue jusqu'à 32°C et c'est prêt ! », précise Régis Bouet en bon pédagogue.

Démarrage en douceur

Avec ces techniques (qui gagneraient à être davantage connues), l'artisan peut débuter rapidement et simplement. Pour plus de confort, il lui faudra une petite trempeuse et un thermomètre précis. La trempeuse est une sorte de bain-marie (à air ou à eau) qui permet de fondre et de garder le chocolat tempéré (mais pas de le précristalliser).

La trempeuse,la solution idéalepour de petits volumes.

Beaucoup de pâtissiers s'en contentent, d'autant que certains modèles à plusieurs bacs permettent de travailler avec plusieurs couvertures. L'intérêt de la trempeuse et de ses grandes cousines (fondoir, tank, fontaine…), c'est qu'elle restera toujours utile, même si vous vous décidez à passer à l'échelle supérieure.

Dès que la production en bonbons s'étoffe en volume, il faut penser sérieusement à une enrobeuse avec tempérage automatique qui permet d'accélérer les cadences.

Gilles Labergerie, directeur de Savy-Goiseau, explique que « l'appareil de référence est muni d'une cuve chauffée, d'un groupe de froid et d'un banc d'enrobage. Le tempérage automatique permet d'imposer au chocolat les trois températures de la courbe de cristallisation. Il ne reste plus alors qu'à charger le tapis avec les intérieurs à couvrir ».

Par le biais de transporteurs, les fourrages (solides) passent d'abord sous un rideau de chocolat, puis sous une soufflerie (pour chasser le surplus) et arrivent sur une table vibrante (pour égoutter le chocolat en excès) avant de finir au coupe-queue (pour lisser le dessous des chocolats). Et voilà, il n'y a plus qu'à laisser cristalliser !

Il existe bien sûr de multiples options ou améliorations :

- table vibrante chauffante (pour les moulages de sujets),

- enrobage à « double rideau »,

- variateur de vitesse avec embrayage,

- cellule de détection,

- sonde de température,

- doseur volumétrique avec pédale de contrôle,

- commande numérique,

- dérouleur mécanisé de papier sulfurisé...

Sans oublier bien sûr le nec plus ultra : le tempérage en continu !

N'oubliez pas de regarder de près le fonctionnement du SAV.

- Comment cela se passe-t-il si votre machine tombe en panne ?

- Les pièces seront-elles facilement accessibles ?

- L'intervention sera-telle rapide ?

Les équipements actuelsconjuguent évolutivité,gain de place et performance.

Quel tempérament !

La tempéreuse continue, tous les chocolatiers en rêvent ! Mais le prix (environ 20.000 €) tempère les ardeurs… « Le chocolat est d'abord fondu dans la cuve et maintenu à 40-45°C. Il est alors aspiré par une vis sans fin recouverte d'une double enveloppe dans laquelle circule une eau refroidie par un groupe frigorifique. En passant, le chocolat redescend à 26-29°C avant de remonter à 30-32°C.

Les gros cristaux qui se forment sont immédiatement fragmentés. En sortie de bec cependant, il y a ce qu'il faut de cristaux beta, ce qui est parfait pour travailler. Le chocolat qui retombe dans la cuve est décristallisé », explique Alain Housset (Procitech/Selmi). Le critère de performance d'un tel équipement résidera dans sa capacité à garder le plus longtemps possible le chocolat fondu sans « vaseliner », ni « pommader ».

Par expérience, Régis Bouet, sait que le talon d'Achille de toutes ces machines se situe précisément là. « Il faut que la masse de chocolat restante en cuve soit toujours suffisante pour que la décristallisation opère. Toutes les heures, il faut donc rajouter 1 kg de chocolat fondu à 38-40°C (décristallisé) pour 10 à 15 kg de chocolat en cuve. Après 2 minutes d'attente, la décristallisation redémarre et on retrouve une bonne fluidité », conseille-t-il en insistant pour que le message passe auprès de nos lecteurs.

Pouvoir tout fairedans une seule machine,c'est possible...

Voilà, c'est chose faite ! A préciser que « les enrobeuses à vitesse réglable permettent de travailler tout seul ou bien à deux : l'un charge pendant que l'autre décharge. Avec une bonne organisation, on double très vite les rendements », note Alain Housset. Certaines tempéreuses continues peuvent être équipées d'un banc d'enrobage et d'une plaque de coulage. Cette dernière permet le remplissage de moules pour la confection de bonbons simples (sans fourrage) ou de « bicouches » : avec un intérieur semi-liquide (déposé à la poche) et/ou une seconde couche de chocolat.

Polyvalence à l'honneur

Evidemment, le portefeuille d'un simple boulanger-pâtissier-chocolatier n'est pas extensible, ni son laboratoire ! Dans bien des situations, le critère déterminant d'une machine restera sa polyvalence. Rappelons l'avancée majeure que représente le « Trittico » de Bravo sur ce point.

Dominique Fieurgant, démonstrateur et pilier du développement du produit en France (depuis trente ans !) explique que « la machine cuit et refroidit n'importe quelle préparation de manière totalement automatique. L'artisan peut y faire ses glaces, sa crème pâtissière, ses ganaches, ses appareils… et bien sûr le tempérage de son chocolat avec une très haute précision ! »

L'artisan qui réussit dans le chocolat (et qui a de la place) peut un jour aller encore plus loin. Il peut s'équiper d'un enrobeur à truffe (Selmi), d'un tunnel de froid pour accélérer la cristallisation des bonbons de chocolat après enrobage ou d'une extrudeuse pour donner une forme bien spécifique à ses intérieurs (Savy-Goiseau).

Les dresseuses-pocheuses sont adaptées pour les ganaches pochables (pralinés, truffes, gianduja…) mais aussi pour le dressage des coques de macarons, pâtes à chou, meringues, etc. (Méca Biscuits, Alimat Tremblay).

Le tout maintenant, c'est de se lancer. Régis Bouet, qui se souvient de ses débuts quand il était à son compte, aura le mot de la fin : « Si on n'est pas vraiment sûr, il ne faut pas hésiter à démarrer avec peu de moyens et voir ensuite comment réagit la clientèle. Il faut savoir que le travail du chocolat, c'est un vrai métier. Les démonstrateurs sont là pour épauler ceux qui débutent. Il faut y aller modestement et commencer par des recettes faciles avec deux ou trois couvertures de bon chocolat et une dizaine d'intérieurs bien faits. Les choses les plus simples plaisent beaucoup ! Si ça prend, ce sera une récompense et l'artisan pourra alors envisager d'aller plus haut, beaucoup plus haut ! ».

Les 4 étapes d'un tempérage express au micro-ondes

 Disposer quelques poignées de pastilles de couverture dans un cul-de-poule.

Au micro-ondes (700-800 W), par tranche de 1 minutes, faites chauffer et retirez pour mélanger énergiquement le chocolat.

 Lorsqu'il reste environ 10 % de chocolat encore solide, terminez l'opération  en remuant jusqu'à ce que le contenu soit totalement fondu.

Laissez refroidir à 33°C. Vous pouvez utiliser le chocolat dans la demi-heure qui suit.

Le petit matériel du chocolatier

Bac calorifugé : trempeuse de petite capacité (3,5 l) pour travailler les toutes petites quantités.

Cul-de-poule : récipient utilisé pour fondre, travailler et garder au chaud le chocolat.

Etuve : petite cabine chauffée pour stocker pistolets, culs-de-poule, siphons à mousse, colorants, etc.

Guitare : coupe rapidement des plaques de ganaches ou d'intérieurs solides avant enrobage. Plusieurs formats d'abaisse sont proposés.

Pistolet : permet de pulvériser le chocolat fondu et tout autre liquide alimentaire pour la décoration des chocolats. En magasin de bricolage ! 

Table chauffante : surface en Inox chauffée pour fondre les moulages de sujets avant collage.

Thermomètre à infrarouge : rapidité et précision pour mesurer les températures de surface. Attention, veillez à bien mélanger le chocolat avant la mesure !

par Armand Tandeau (publié le 8 octobre 2009)

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement