De Loïc F. (Vaucluse) « Le logement de la boulangerie est inhabitable. Ai-je un recours ? »
La question : « J'ai acheté le fonds de commerce d'une boulangerie il y a quelque temps dont les locaux étaient parfaits sauf l'appartement. Manifestement, aucun de mes prédécesseurs n'y a vécu tant l'état est déplorable : fenêtres non isolées, pas de chauffage ni de salle de bains, électricité non conforme. Je n'ai rien réclamé à mon vendeur à l'époque de mon achat. Ai-je un recours contre lui ou ai-je la possibilité de m'adresser à mon propriétaire ? Certains collègues me disent que c'est un bail commercial et que je ne peux rien réclamer. Pouvez-vous me renseigner ? »
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La réponse de Me Verdier
Je vous confirme qu'à l'égard de la personne qui vous a vendu le fonds de commerce, vous ne pouvez rien réclamer. Si en effet votre vendeur, au niveau de la promesse de vente, ne s'est pas engagé à faire de travaux avant la vente définitive du fonds de commerce, celui-ci ne vous doit rien. Vous avez acheté en l'état après avoir visité. Avez-vous cependant un recours contre le propriétaire ? Tout dépend si cet appartement est votre résidence principale ou si ce n'est qu'une résidence d'appoint. Ce point est extrêmement important puisque les obligations du propriétaire sont différentes selon le cas. Pour démontrer qu'il s'agit de votre résidence principale, vous pouvez en cas de contestation de votre bailleur, fournir la copie de votre avis d'imposition ou de déclaration de revenus.
? S'il s'agit de votre résidence principale Quelle que soit la façon dont le bail prévoit la répartition des travaux ou réparations, le bailleur est tenu de vous délivrer un logement décent, suivant les critères définis par la loi du 13 décembre 2000 (loi SRU) et le décret d'application du 30 janvier 2002. Cette obligation qui pèse sur votre bailleur trouve son origine dans une décision de la Cour de Cassation du 14 octobre 2009 (n° 08- 10955) non remise en cause depuis. Dans celle-ci, un litige opposait un boulanger à son propriétaire concernant la prise en charge de travaux d'équipement et de confort de l'appartement qui faisaient lourdement défaut. A la suite d'une très longue procédure devant les Tribunaux puis devant la Cour d'Appel et enfin, devant la Cour de Cassation, cette dernière a considéré que le propriétaire des murs était redevable à l'égard de son locataire boulanger d'un logement décent et que cette obligation qui pèse sur le bailleur est applicable au bail commercial dès lors qu'il s'agit de sa résidence principale. Qu'est-ce qu'un logement décent au sens de la loi ? Il est défini par le décret du 30 janvier 2002 (n°2002- 120). Vous pouvez vous rendre sur le site www. legifrance.fr pour le consulter, notamment ses articles 2 et 3. Par exemple, un logement décent comprend : - des réseaux et branchements électriques et de gaz, ainsi que des équipements de chauffage et de production d'eau chaude conformes aux normes de sécurité définies par les lois et règlements ; - des dispositifs d'ouverture et de ventilation des logements permettant le renouvellement de l'air ; - des installations d'évacuation des eaux ménagères et des eaux-vannes ; - une cuisine ou un coin cuisine aménagé de manière à recevoir un appareil de cuisson et comprenant un évier raccordé à une installation en eau chaude et froide et une évacuation ; - une installation sanitaire intérieure au logement, comprenant un wc et un équipement pour la toilette comportant une baignoire ou une douche, alimenté en eau chaude et froide ; - un réseau électrique permettant un éclairage suffisant de toutes les pièces.
Comment réclamer la prise en charge de ces travaux à votre propriétaire ? Si l'installation électrique de l'appartement n'est plus aux normes, je vous recommande de faire appel à un bureau de contrôle agréé (type APAVE) pour faire établir un rapport de conformité (ou de non conformité) afin de démontrer la dangerosité. Pour ce qui concerne les autres points de travaux à réaliser (fenêtres, salle de bain…), je vous recommande de faire établir, si cela n'a pas été fait au moment de votre acquisition, un état des lieux par huissier, pièce par pièce avec photographies à l'appui pour justifier du mauvais état.
Dans un premier temps, vous devez demander des devis à des entreprises sérieuses à la suite de quoi, vous devez écrire à votre propriétaire ou à l'agence gérant le bien immobilier pour leur adresser une demande de prise en charge des travaux et de mise en conformité, en leur proposant de se rendre sur place pour constater la situation. Soit vous trouvez un accord amiable, soit vous adressez un courrier recommandé A.R. pour demander la prise en charge, en rappelant les dispositions légales évoquées ci-dessus et en joignant l'état des lieux et les devis. Si à la suite de cette mise en demeure le propriétaire ne réagit pas, vous avez la possibilité d'entamer une procédure judiciaire devant le Tribunal afin d'obtenir sa condamnation à prendre en charge tout ou partie de ces travaux et en demandant parallèlement, si nécessaire, la séquestration des loyers jusqu'à ce que ces travaux aient été pris en charge ou réalisés.
? Si l'appartement n'est pas votre résidence principale Dans une telle hypothèse, l'arrêt de la Cour de Cassation évoqué ci-dessus n'a pas vocation à s'appliquer. Dans ces conditions, c'est le bail commercial qui régit les rapports entre le bailleur et son locataire et détermine qui prend en charge les travaux de rénovation de l'appartement, sachant que le bailleur vous doit au minimum les réparations mentionnées à l'article 606 du Code Civil. Les clauses et conditions d'un bail commercial étant rédigées de façon très différente et quelques fois ambiguës, je vous conseille dans une telle hypothèse de faire appel à votre avocat pour vérifier les éventuels recours que vous pourriez engager contre votre bailleur.
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