L’héritage centenaire de La Fabrique de chocolat reprend vie
Au cœur du moulin de La Bastide-Clairence, dans les Pyrénées-Atlantiques, la chocolaterie renaît. Anaïs et Gabriel y perpétuent de nouveau une tradition oubliée depuis plus de cent ans. L’occasion de goûter une recette originelle retrouvée de manière impromptue.
Décor industriel, mélange de bois brut et de métal noir, étagères d’époque retrouvées au grenier, tables et chaises de bistrot glanées parmi les reliques familiales… Vous voilà immédiatement plongés dans l’ambiance de la chocolaterie du début du xxe siècle. Avec une touche subtile de modernité, pour rappeler que l’on est bien en 2024. En bonus, La Fabrique de chocolat nouvellement restaurée, rouverte fin 2023, s’est dotée d’espaces café et musée.
Rien ne prédisposait Anaïs Le Calvez et Gabriel Auzi à devenir chocolatiers. Leur volonté de départ : rénover la maison ayant appartenu au grand-père de Gabriel pour y loger leur petite famille. Et pourquoi pas remettre en route le moulin, jadis employé pour produire de la farine, puis l’électricité du village. Le village en question ? La Bastide-Clairence (Pyrénées-Atlantiques), nichée au cœur de la campagne basque et labellisée parmi Les Plus Beaux Villages de France.
La tablette d’origine
Depuis le point de départ de ce beau projet, huit années se sont écoulées, et une surprise est venue se greffer sur les plans du jeune couple : la chocolaterie qui occupait les lieux plus d’un siècle auparavant a également ressuscité. « Au fur et à mesure de nos restaurations, nous en avons appris beaucoup sur la famille Auzi et sur l’activité du moulin, raconte Anaïs. Un généalogiste nous a révélé qu’il abritait une fabrique de chocolat, tenue par l’aïeul de Gabriel, Jules Auzi, entre 1903 et les années 1930 environ. »
Voilà leur curiosité piquée au vif. Elle va les mener, de fil en aiguille, à retrouver nombre de trésors du passé. Accumulés dans les affaires familiales d’abord, comme les moules d’époque. Au travers de rencontres, ensuite. « Lors de la fermeture de la chocolaterie, toutes les machines avaient été cédées à la famille Noblia [chocolatiers historiques de Cambo-les-Bains et l’une des dernières maisons de la région à travailler la fève de cacao, NDLR] », poursuit Anaïs le Calvez. La descendante promet de les rendre à Gabriel Auzi, « à condition qu’il en fasse quelque chose ». L’idée de faire revivre La Fabrique de chocolat était née.
Après plusieurs formations auprès de grands chocolatiers français (avec 20° Nord 20° Sud, puis Stéphane Bonnat), Gabriel est fin prêt à produire son propre chocolat dans la maison de ses ancêtres. Quid de la recette ? Un heureux hasard a mis sur leur chemin un vieil emballage de tablette tout jauni datant de 1903. À l’arrière, griffonné à la main le mélange exact de fèves concocté par Jules. De quoi faire renaître la saveur de ce chocolat d’antan, mélange de fèves de six origines contenant 65 % de cacao. En complément, les nouveaux propriétaires proposent une version “lait”, une version “corsée” à 75 %, ainsi que quelques déclinaisons avec des noisettes, des cacahuètes…
Une pause au fil de l’eau
Après avoir fait le plein de gourmandises chocolatées, les visiteurs ont l’opportunité de s’installer pour prendre un chocolat chaud ; l’occasion aussi de découvrir toutes les machines d’époque (lire encadré). Le tout bercé par le bruit du ruisseau qui s’écoule juste derrière la maison, à l’architecture typique de la région.
La Fabrique de chocolat revit depuis seulement quelques mois, et déjà, l’esprit des néochocolatiers fourmille de projets : remettre en route les machines, pour travailler le chocolat depuis la fève jusqu’au produit fini et, peut-être un jour, les faire fonctionner avec l’électricité fournie par le moulin. Pour l’heure, un pas à la fois. L’odeur du chocolat commence tout juste à embaumer, de nouveau, le quartier.