Il faut sauver la filière blé bio !

La filière blé tendre cultivée en Agriculture Biologique est fragilisée par les dernières récoltes, ainsi qu’un désengagement des agriculteurs qui s’accélère. Les niveaux d’importation devenus nécessaires décrédibilisent aussi la force du label. La résilience du modèle agricole doit être repensée.

La campagne blé tendre 2023-2024 a été marquée par des conditions météorologiques déplorables, avec des pluies incessantes intervenues sur l’ensemble de l’itinéraire cultural. Le bilan présenté par FranceAgriMer le 16 octobre 2024 est sans appel : la récolte nationale de blé tendre biologique (certifié et en deuxième année de conversion C2) chute de 54 % par rapport à l’année précédente. Les volumes de blés bio pour la période commerciale 2024-2025 devraient ainsi atteindre péniblement les 195 000 tonnes ([t] contre 424 067 t pour la campagne précédente). Du jamais vu depuis près de quarante ans.

Alors que la France était largement excédentaire entre ses ressources (stocks, collectes, importations) et ses utilisations (meunerie, fabricants d’aliments pour bétail, industries agroalimentaires, etc.), lui permettant de se constituer un bon matelas de sécurité, ce ne sera pas le cas pour 2024-2025, avec des stocks en chute de 53 %. Les importations devraient mécaniquement grimper à 50 000 t (contre 1 115 t l’an passé !) pour combler les besoins du marché français, notamment ceux de la meunerie (estimés à 188 000 t, comme l’année précédente).

Même si elle est un rempart contre la hausse des prix, l’importation massive de blés biologiques n’est pas un bon signal envoyé aux consommateurs et aux professionnels, qui doutent déjà de la force du label. FranceAgriMer enregistre en effet une baisse significative des blés en conversion bio, et ce, pour la quatrième campagne consécutive. Pour la période commerciale 2024-2025, la part de blé tendre bio classé C2 chute ainsi à 2,5 % alors qu’elle atteignait 27 % sur 2020-2021… Convaincante sur le plan agroécologique, ce modèle agricole montre encore quelques fragilités en matière de résilience économique et climatique.

Une qualité rassurante

Signe plus encourageant : la qualité des blés bio est au rendez-vous, malgré des poids spécifiques assez médiocres (75,7 kg/hl), comme on pouvait s’y attendre. Cependant, 59 % des lots se situent au-dessus du seuil de qualité Supérieur, fixé à 76 kg/hl. Pour le reste, les niveaux des critères de qualité sont plutôt très satisfaisants. Malgré les pluies abondantes tombées à l’approche des moissons, les indices de chute de Hagberg sont à 97 % au-dessus de 240 secondes, ce qui est excellent (les grains n’ont donc pas germé sur l’épi). De même, l’humidité des blés à l’entrée des silos, évaluée à 14,1 % en moyenne, assurera une bonne conservation des grains. Le taux de protéines national, à 11,2 %, est aussi très correct, d’autant que 73 % des blés affichent un taux supérieur à 11 % (classe Supérieur) et 31 % un taux supérieur à 11,5 % (classe Premium). Cette qualité de protéines se traduit par un bon comportement des pâtes en panification. La force boulangère (W) atteint la valeur de 181, ce qui est parfait sachant que 65 % de la collecte présente un W supérieur à 170 (classe Premium). Les tests de panification en tradition française sont également convaincants, avec une note moyenne de 260 sur 300 (et 77 % de la collecte située au-dessus de 250). Ainsi, même sans correction, les pains bio promettent de bons développements, de belles grignes et une mie bien alvéolée. La meunerie et la boulangerie ne seront pas déçues. Ce signal rassurant doit inviter l’artisan et le meunier à garder confiance en le bio.

Il faut sauver la filière blé bio !

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