Actualités
Sylvain Betto.
Sylvain Betto. © B. Lafeuille

Du champ au moulin, Sylvain Betto veille au grain

Agriculteur-meunier en Isère, il a choisi de vendre ses farines bio à des professionnels, en se démarquant par la qualité.

Au Moulin du vieux chêne, sur la petite commune de Lavars, en Isère, du grain est moulu vingt-quatre heures sur vingt-quatre, six jours sur sept et cinquante-deux semaines par an, pour approvisionner des boulangers locaux. Le maître des lieux, Sylvain Betto, est lui-même fils de boulanger. Mais avant de devenir agriculteur-meunier, il a élevé des vaches et des moutons sur cette ferme de montagne, qu’il a reprise en 1998 et convertie à l’agriculture bio en 2009.

© B.Lafeuille - Le Moulin du vieux chêne est une exploitation agricole de montagne, située à 750 m d'altitude en Isère.

Aujourd’hui, des équidés entretiennent les prairies qui couvrent la moitié des 130 ha de surface. Le reste est cultivé en blé (80 %), seigle (15 %) et, selon les années, petit épeautre, sarrasin, tournesol ou pois chiche. La totalité du blé, du sarrasin et du petit épeautre est transformée en farine, comme la majorité du seigle et une partie du pois chiche.

L’altitude (entre 700 et 900 m) et les fortes pentes posent moins de problèmes que le dérèglement du climat : « Depuis dix ans, les épisodes violents se succèdent, observe Sylvain Betto. On subit des chaleurs caniculaires au pire moment pour les blés : en juin, en plein remplissage du grain. La qualité n’a pas trop baissé, mais les rendements, si ! »

Il faut adapter le choix des variétés : la résistance au froid, longtemps favorisée eu égard au climat montagnard, devient un critère moins pertinent. « On anticipe des sécheresses mais il peut pleuvoir d’avril à août, soupire-t-il. C’est une remise en question permanente. C’est aussi l’intérêt du métier : nous travaillons en lien avec la nature, le climat, l’environnement.»

© B. Lafeuille - "En bio, il faut intervenir au bon moment, notamment pour désherber, car aucun rattrappage chimique n'est possible", souligne l'agriculteur.

Des variétés de blé semées en mélange

Pour contrôler naturellement les risques liés aux maladies et aux ravageurs, il sème des variétés de blé en mélange. « Mais la composition du mélange à la récolte doit être prévisible car les boulangers ont besoin d’une qualité de farine la plus constante possible, reprend-il. Je choisis les variétés sur leur valeur panifiable, leur résistance à diverses maladies, mais aussi leur cycle végétatif, pour qu’elles arrivent à maturité en même temps.» Chaque année, il teste des variétés pures sur des bouts de parcelle avant d’éventuellement les intégrer au mélange. Il sème aussi des variétés anciennes, à la demande de certains boulangers, mais constate des rendements très aléatoires et une sensibilité à certaines maladies.

© B. Lafeuille - Les conditions de stockage sont aussi importantes que la qualité du blé et celle du moulin, assure Sylvain Betto.

« Il faut du bon blé et un bon moulin, mais cela ne suffit pas », Sylvain Betto

Quand il a produit sa première farine en février 2017, l’agriculteur ne savait pas à qui il la vendrait. « Mon père m’avait dit qu’aucun boulanger n’achèterait sans tester d’abord, se souvient-il. J’ai investi dans un petit moulin et je me suis lancé. L’Adabio [Association pour le développement de l’agriculture biologique, NDLR] m’a mis en contact avec des boulangers et des magasins. Le bouche à oreille a fonction­né. J’ai investi au fur et à mesure que mon activité se développait : 200 000 euros au total, pour la meunerie et le stockage.» Aujourd’hui, Sylvain Betto a quatre moulins, écrase 100 tonnes de blé et a créé un emploi sur sa ferme. Près de 85 % de sa production est vendue en sacs de 25 kg à des professionnels ; le reste, en petits sacs, est proposé à la ferme ou en magasin pour les particuliers.

© B. Lafeuille - "En déroulant le grain au lieu de l'écraser, les moulins à meule de pierre évitent l'échauffement de la farine", fait observer Sylvain Betto.

Son père l’ayant encore prévenu du fait que les boulangers ne manquent pas de farine, il a misé sur la qualité pour se démarquer. «Il faut du bon blé et un bon moulin, mais cela ne suffit pas, insiste-t-il. Le blé doit être bien trié. Puis, pour éviter les insectes, les impuretés et la germination, il est stocké dans des cellules parfaitement hermétiques et ventilées, de façon à abaisser la température par paliers avant l’hiver.» Avant d’être moulu, son grain est brossé. Certains font l’impasse sur cette étape, mais lui est catégorique : « La brosse à blé a deux rôles importants : enlever les poussières et champignons et scarifier le grain pour qu’il se défasse mieux, à la meule. »

© B. Lafeuille - Le grand moulin (à gauche) est dédié aux farines sépciales, pour ne pas encrasser les trois petits, au fond.

La partie meunerie comporte trois petits moulins de type Astrié (construits à la main, selon un cahier des charges précis) et un autre plus gros, tous à meule de pierre. Le dernier est dédié aux farines spéciales pour éviter d’encrasser les trois premiers, réservés au blé. « En n’écrasant pas le grain comme un moulin à cylindres, on évite de l’échauffer, note le meunier. Il tombe dans les stries de la meule et se déroule en se déplaçant vers l’extérieur.» Puis la farine tombe à travers le tamis, de façon purement mécanique : « Il n’y a pas d’injection d’air, donc aucune oxydation », souligne-t-il.

© B. Lafeuille - La farine tombe du tamis par gravité.

Tous ses clients boulangers sont venus sur son exploitation. « Je voulais leur montrer comment je travaille. Cela justifie mon prix de vente et facilite la discussion en cas de souci. » Le bouche à oreille lui vaut d’être régulièrement contacté par de nouveaux boulangers. Mais autant être prévenu : il ne peut plus prendre de nouveau client professionnel depuis avril 2019.

© B. Lafeuille - Le développement de l'activité meunerie a permis à l'agriculteur d'embaucher un salarié à temps plein, Sylvain (en photo).
© B. Lafeuille - Les petits conditionnements destinés aux particuliers sont vendus à la ferme ou en magasins.
À lire également
Claire et Christophe Passédat ont créé L’Atelier chez Lucien : quelque 90 m2 aménagés dans trois anciens conteneurs maritimes.

Initiatives

Semaine du goût : la première boulangerie artisanale certifiée par l’Éducation nationale

À Saint-Nauphary, dans le Tarn-et-Garonne, les artisans Christophe et Claire Passédat de Chez Lucien ont mis au point des ateliers à destination d’un public scolaire, faisant ainsi de leur établissement...

Chaque membre du jury goûte et note les gâteaux sur des critères très précis.

Concours

22e Fête du gâteau basque : gourmandise et légèreté exigées

Le concours du meilleur gâteau basque a récompensé deux apprentis et trois pâtissiers amateurs lors de la fête traditionnelle du même nom, organisée les 4 et 5 octobre derniers à Cambo-les-Bains, dans...

Les vainqueurs : Lilian Pensuet, Samuel Dejonghe et Dylan Da Silva. À droite : le président de la CNBPF Dominique Anract.

Concours

Meilleur croissant de France : un jeune occitan remporte le concours 2025

Lilian Pensuet, 21 ans, a décroché, ce 8 octobre 2025, la première place du concours national du meilleur croissant au beurre. Cette 6e édition était organisée dans la Drôme par la Confédération nationale...