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      Pour David Bourgeois, les farines bio donnent le meilleur 
      d'elles-mêmes avec le type 80.
Pour David Bourgeois, les farines bio donnent le meilleur d'elles-mêmes avec le type 80.

Bio, bilan d'une première décennie

Les Moulins Bourgeois réussissent un joli #10yearschallenge, en fêtant cette année les 10 ans de leur moulin bio à Verdelot (77). Une décennie de développement de filière, d'élargissement de gamme et de formations.

DANS LA VIE D'UN MOULIN COMME DANS CELLE D'UNE BOULANGERIE, certaines étapes nécessitent des choix stratégiques, plus ou moins engageants, plus ou moins coûteux... Parfois, ils apparaissent aux dirigeants comme des coups de poker, et se signent comme on saute à l'élastique (en serrant les dents et en croisant les doigts). Chez les Bourgeois, le dernier grand virage date d'il y a dix ans et à l'époque, la question tournait autour du bio.

Cap ou pas cap ?

« Depuis quatre générations, nous nous

consacrons à 100 % à la boulangerie artisanale, en livrant nos farines dans un rayon de 300 km autour de notre moulin, rappelle David Bourgeois, co-dirigeant des moulins éponymes. Il y a quinze ans, nous nous sommes retrouvés face au bio avec une interrogation majeure : faut-il investir, ou non ? » A l'époque, le contexte était très différent, le bio, encore anecdotique, s'approchant en balbutiant des préoccupations des consommateurs et de certains artisans.

« Nous avions à l'époque des contacts avec

des boulangers qui souhaitaient lancer une gamme de spéciaux bio et d'autres - plus rares - prêts à basculer toute leur production. Nous sentions alors que le bio pouvait être une niche importante pour la boulangerie haut de gamme. Et nos convictions personnelles nous soufflaient que ce label allait prendre de l'importance. Or, nous voulions rester un interlocuteur pour la boulangerie d'excellence et nous savions qu'en tant que producteur, nous serions plus convaincants que comme simples revendeurs. » Entre indices et intuitions, les Bourgeois se lancent et bâtissent, à côté du moulin historique, un nouveau bâtiment entièrement dédié au bio...

Une filière à construire

La première année, 350 tonnes de blé sont écrasées. L'an passé, 7 000 tonnes y sont

passées. « En 2008, nous avons confié la conduite du nouveau moulin à Luc Peinturier, ancien élève

de l'école de meunerie et qui affichait dix ans d'ancienneté chez nous, reprend David Bourgeois. Luc est devenu un spécialiste du bio en France et il a réussi à monter un réseau d'approvisionnement alors que la filière française ne répond qu'à 80 % de la demande. Nous attachons beaucoup d'importance à écraser exclusivement des céréales françaises, cultivées dans les régions voisines du moulin. »

Pour satisfaire les exigences des boulangers, l'offre initiale de blé est peu à peu complétée par d'autres céréales : seigle, épeautre, engrain et

sarrasin. « En outre, nous avons développé, avec le concours de quelques agriculteurs passionnés, une production de blés

de population, mélanges de variétés anciennes. »

La gamme a également été enrichie de farines toastées à Verdelot : le maïs et le blé malté. Enfin, au rayon des projets, « nous envisageons de proposer des produits originaux à partir d'avoine et d'épeautre ». Affaires à suivre !

Des formations adaptées

Le choix du bio s'est accompagné d'autres décisions, sur la technique d'écrasement, par exemple. « Nous avons immédiatement associé le bio à la meule, car les farines bio donnent le meilleur d'elles-mêmes avec le type 80 et pour

l'obtenir, la meule est la meilleure option. Cependant, nous avons également de la demande pour la farine de tradition T65, pour laquelle le cylindre est plus indiqué. Nous sommes donc équipés des deux mécaniques. »

Sur meule, mais aussi sur levain : pour les Bourgeois, c'est évident. Alors, pour accompagner leurs clients qui souhaitent prendre le virage du bio, ils proposent des stages, d'initiation ou de perfectionnement. « Sur deux jours, les boulangers travaillent sans levure, en pétrissant à la main afin d'avoir un vrai contact avec la matière. Pour ceux qui envisagent une ouverture 100 % bio, nous personnalisons également l'offre avec un stage adapté et un accompagnement en boutique. En 10 ans, nous avons recruté trois personnes pour mener le moulin et quatre boulangers-conseils supplémentaires. » Le signe d'un engagement fort !

Cécile Rudloff

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