Dans la famille Ganachaud, la boulangerie, c’est d’abord et avant tout une affaire de famille.

Tout commence avec le grand-père, Bernard, qui, fraîchement arrivé de la région nantaise, dans les années 1970 installe sa boulangerie rue de Ménilmontant à Paris. Après avoir obtenu le titre de Meilleur ouvrier de France en 1979, il créé en 1981 sa propre baguette baptisée flûte Gana, dont la recette est encore aujourd’hui tenue secrète, et inchangée.

Après Bernard, il y a eu ses trois filles ; dont les deux plus jeunes, Valérie et Isabelle, ont rapidement pris la succession. CAP en poche, elles ouvrent dès les années 1980 leur propre boulangerie rue des Pyrénées (Paris 20e), puis à Vincennes (Val-de-Marne).
Quelques temps plus tard, c’est l'aînée, Marianne, qui entre en jeu. Après avoir elle aussi ouvert sa boulangerie rue de la Convention (Paris 15e), elle lance avec son père le concept de licence de marque de la flûte Gana. Objectif : partout en France, les boulangers qui le souhaitent peuvent obtenir la recette et fabriquer la flûte en échange du versement de royalties.

Place aux jeunes
Aujourd’hui, alors que Bernard et Isabelle sont décédés et que Valérie et Marianne s’apprêtent à prendre leur retraite, c’est la troisième génération de Ganachaud qui prend les rênes. Il y a d’abord Hugo, fils de Valérie qui, CAP en poche et après un cursus dans le commerce, décide de rejoindre l’aventure familiale en ouvrant sa boulangerie en 2015 rue de Charonne (Paris 11e). En huit ans, le jeune homme ouvre huit boulangeries, toutes à Paris.
Il s’apprête à inaugurer une nouvelle boutique avenue Ledru-Rollin (Paris 11e) avec sa soeur Morgane. La petite dernière de la famille, dernière aussi à rejoindre l’aventure, n’avait pourtant pas le profil. Après un diplôme de l’École supérieure de commerce de Paris, elle passe cinq ans chez KPMG dans la finance, puis cinq ans dans la stratégie retail chez LVMH. Mais l’amour du pain la rattrape.
Elle raconte : « Je savais que j’allais aller en boulangerie, mais je ne savais pas quand. Un jour, alors que je travaillais pour la marque Celine en pilotant la performance de cent-vingt boutiques, je me disais : ce que je fais ici, je pourrais le faire pour un produit que j’aime et que j’ai dans le sang. Ca a été une révélation ». Début 2020, la jeune femme se lance et passe son CAP à l’École de boulangerie pâtisserie de Paris. Après une formation sur le tas dans les boulangeries familiales, elle ouvre fin 2022 sa propre enseigne rue de Charenton dans le 12e arrondissement de la capitale.

Une nouvelle ère

Aujourd’hui, Hugo et Morgane sont les dignes représentants de leur grand-père, entrepreneurs et amoureux du produit. Avec une treizième boutique qui ouvrira bientôt ses portes, ils portent haut l’héritage des Ganachaud, tout en imprimant leur patte. « Mon grand-père avait une vision claire du produit, du pain qu’il voulait faire. Par la suite, ma maman et mes tantes ont raccourci la gamme, rendu l’offre plus lisible, travaillé l’ADN de la marque. Mon frère est un businessman et un entrepreneur dans l’âme. Quant à moi, je vais essayer d’apporter mes compétences, notamment en travaillant la communication et les partenariats », résumeMorgane.

Comptoir en bois, chandeliers en fer forgé… dans les boutiques Gana, le décor est sobre et l’accent est mis sur le savoir-faire du boulanger. Preuve en est, dans toutes les boutiques, la partie fournil est ouverte et à la vue des clients.

Exit le pain en retrait derrière le vendeur sur des étagères. Ici, les pains trônent tout devant, en vitrine. Car aux côtés de la flûte Gana, produit phare de la maison qui, du haut de ses 275○grammes incarne le flambeau et l’héritage de la maison, figurent pléthore de pains spéciaux, tels un pain bio, un pain de campagne, un pain complet, un pain aux céréales, un petit épeautre, un pain à la châtaigne, un pain de seigle ou encore un pain de blé khorasan.
Côté viennoiseries, des spécialités régionales côtoient des produits aux origines diverses comme la babka polonaise ou le roulé à la cannelle, d’inspiration scandinave : « Des produits cosmopolites, qui répondent aux attentes de la clientèle parisienne », aime à rappeler Morgane. L’enseigne a aussi créé ses propres spécialités, qui font désormais la renommée de la maison, comme l’étoile : un croissant en forme de moulin à vent avec une pâte feuilletée et un sirop de sucre.

Une offre qui change au fil du temps
Ici, à la manière d’une carte courte en restauration, la maison fait avec ce qu’elle a, avec les humeurs du boulanger et les saisons. Exit la même vitrine de pâtisseries chaque jour. Chez Gana, on joue avec les thèmes.
Début février, Chandeleur oblige, crêpes, bugnes et beignets étaient les rois de la fête, éclipsant peu à peu la galette des Rois.

Pour l’avenir, Hugo et sa soeur Morgane ne manquent pas de projets : outre l’ouverture d’une treizième boutique au printemps, ils travaillent au développement de céréales anciennes pour créer de nouvelles recettes. Et entendent poursuivre les partenariats avec des artistes autour de grands temps forts de l’année. Comme ce fut le cas l’an dernier avec l’illustratrice Tiffany Cooper qui a réalisé pour la marque une collection de fèves et déployé un visuel familial en vitrophanie sur les vitrines des boulangeries.
