Lors d’un procédé de transformation, l’énergie fournie est rarement utilisée en totalité. En fonction du rendement de l’opération, une partie plus ou moins importante est transformée en chaleur, généralement rejetée dans l’air ou dans l’eau. C’est en raison du caractère inéluctable de ces déperditions qu’on parle de chaleur « fatale » (le mot étant utilisé dans le sens inévitable). Celle-ci n’est cependant pas tout à fait assimilable à la chaleur « perdue », car la chaleur fatale peut être récupérable, au moins en partie.
Ressource inépuisable
Pour l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), la chaleur fatale constitue une ressource d’énergie considérable en France, qu’elle estime à 36 % de la chaleur produite par les combustibles consommés en industrie, soit près de 110 TWh ! À titre de comparaison, la production française d’électricité d’origine nucléaire représente environ 380 TWh (source : EDF 2019). Les plus gros postes de déperdition sont (par ordre d’importance) les séchoirs et les systèmes frigorifiques sans compresseurs (à équivalence), les fours, les chaudières et les compresseurs d’air ou de froid. La chaleur la plus rentable à récupérer est celle des fumées ou des vapeurs brûlantes dont la température dépasse les 100°C (fours, séchoirs, chaudières…). Celle-ci représente près de 48% de la chaleur fatale totale (53 TWh). Avec l’inflation des prix de l’énergie et les risques de pénurie de gaz et d’électricité, le défi de récupérer et de recycler cette énergie fatale revient au cœur des enjeux nationaux et internationaux. Aussi, dans le cadre du Fonds Chaleur (voir encadré), l’Ademe soutient les études ou les investissements visant à valoriser cette chaleur fatale.
Chaleur fatale en boulangerie
La panification industrielle et semi-industrielle (fournil central avec plusieurs points de vente) peut être concernée par le dispositif à condition de justifier d’une récupération d’au moins 1 GWh par an (voir encadré). La boulangerie-pâtisserie traditionnelle ne peut y prétendre car sa consommation énergétique moyenne est bien inférieure (environ 0,1 GWh par an dont 0,065 MWh pour la cuisson – Source : Engie). Toutefois, l’artisan peut être accompagné par l’Ademe dans les études en amont (opportunité, faisabilité) et le montage de dossiers de financement (d’autres aides existent en région). En effet, la récupération des calories perdues reste un enjeu économique et écologique majeur en artisanat. La chaleur fatale s’échappe surtout dans l’air via les fumées de combustion (fours boulangers à gaz, fuel, bois), les buées de cuisson (fours boulangers et pâtissiers), les vapeurs de lavage (lave-batteries) ou l’air chaud produit lors du refroidissement des groupes frigorifiques (climatisation des locaux, armoires et chambres de conservation négative ou positive, surgélation, fermentation…).
Se faire accompagner
Dans les petites boulangeries, la chaleur fatale peut donc être captée à différents niveaux par différentes techniques et technologies (voir Parlons Technique). Elle peut être stockée et distribuée vers d’autres usages, tels que le chauffage des locaux ou la production d’eau chaude sanitaire. Elle peut aussi être transformée en eau glacée (via un groupe à absorption) pour augmenter le rendement des groupes frigorifiques. Des économies substantielles vous attendent si vous identifiez un gisement de chaleur fatale au sein de votre organisation (le plus souvent il s’agit du four de production ou d’une centrale frigorifique). L’Ademe nationale et ses relais locaux peuvent vous accompagner dans le cadre du Fonds Chaleur (voir encadré). Vous pourrez bénéficier (gratuitement) de conseils et de pré-études d’opportunité et de faisabilité. Vous pouvez obtenir aussi une véritable étude de faisabilité, avec un soutien technique (solutions envisageables, cahier des charges), économique (rentabilité du projet, retour sur investissement) et financière (montage de dossiers administratifs). Dans cette période où le moindre kWh vaut de l’or, ces solutions réchauffent le cœur.
Aides Ademe sur la chaleur fatale (2022)
Sur la récupération de chaleur fatale, l’Ademe peut soutenir la boulangerie-pâtisserie artisanale via deux aides distinctes :
- Aide au financement d’une étude de faisabilité de récupération de chaleur fatale : elle est envisageable pour toutes les boulangeries-pâtisseries artisanales ;
- Aide aux installations de récupération de chaleur fatale : elle est ouverte en priorité aux projets permettant une valorisation d’énergie thermique supérieure à 1 GWh/an (soit environ 85 tep/an). Aussi, seules les boulangeries-pâtisseries artisanales qui peuvent récupérer un tel gisement (généralement celles qui ont une production semi-industrielle intégrée à un fournil central) sont éligibles à cette aide, à condition d’avoir réalisé un diagnostic énergétique ou bénéficié d’une étude de faisabilité de moins de 2 ans.
En savoir plus : agirpourlatransition.ademe.fr (rechercher « chaleur fatale »)
L’Ademe accompagne les artisans boulangers qui cherchent à limiter les déperditions thermiques.
Les boulangeries semi-industrielles peuvent bénéficier d’un soutien technique et financier important. A Tandeau
La combustion des énergies fossiles constitue un gisement majeur de chaleur fatale. pxhere
Le Fonds Chaleur
Le Fonds Chaleur
Créé en 2009 par l’État français dans le cadre du Grenelle de l’Environnement, le Fonds Chaleur est un dispositif de soutien financier visant à développer la production renouvelable de chaleur en France. Sa gestion a été confiée à l’Ademe. Il concerne l’habitat collectif, les collectivités et les entreprises (agricoles, industrielles ou tertiaires). La Loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (2015) prévoit que la France atteigne 32 % d’Énergies renouvelables et de récupération dans son bouquet énergétique en 2030.