Face à la hausse des prix de l'électricité, n'est-il pas normal d'envisager toutes les solutions possibles ? Parmi elles, l'achat groupé semble se développer, 35 Fédérations départementales de boulangers mettent ainsi en avant leurs liens noués plus ou moins récemment avec le courtier Collectif Energie. Ainsi, voilà peu, c'est la Fédération des boulangers de Seine-Maritime qui a passé le pas. Alain Découflet, son secrétaire, témoigne : « On a contacté ce courtier et suggéré à des boulangers de voir ce qu'ils pourraient obtenir. Mais il faut être prudents parce que, dans le passé, des achats groupés, notamment de matières premières, n'ont pas duré. Ce que je veux dire, c'est que nos entreprises sont tellement affaiblies qu'il ne faut pas se manquer. Cela dit, toutes les initiatives sont bonnes. Les marges sont tellement réduites qu'il faut tenter quelque chose. »
« Aucun n'est revenu en arrière »
Cela dit, s'inscrire à un achat groupé, est-ce partir à l'aventure ? « Moi, je n'ai eu aucune coupure, aucune baisse de service », assure Patrice Tenaud, boulanger à la Roche-sur-Yon. Il a fait partie de la cinquantaine de boulangers qui, les premiers en France, ont participé à ce genre d'initiative, à l'appel de la Fédération de Vendée en 2015. Son président actuel, Aurélien Allaizeau, souligne : « Aujourd'hui, sur environ 270 boulangers du département, 190 sont adhérents de notre syndicat et pratiquement 110 sont sur de l'achat groupé. Et, parmi tous ceux qui s'étaient lancé, aucun n'est revenu en arrière. » Il faut dire que le dernier gros achat groupé avait été réalisé il y a 3 ans et les boulangers ont signé pour des prix qui oscillent autour de 50 euros le mégawattheure. Des prix fixes jusqu'à fin 2023 ! « C'est sûr que j'ai des prix très intéressants par rapport à ceux que je vois circuler », confirme M.Tenaud.
Il ne faut toutefois pas crier victoire trop vite... Pour les achats lancés plus récemment, les prix restent amers. Ainsi, Franck Fanet, qui a deux boulangeries à Fauville-en-Caux et Breteville-en-Caux, a renégocié son contrat le 23 décembre, avec Collectif Energie, comme l'y incitait La « Fédé » de Seine-Maritime. « On est à un prix de 243 euros le mégawattheure. Sans ce groupement, on était à plus de 280 euros. Bref, ce courtier est sérieux, on le remercie, mais ça reste insuffisant. » « C'est sûr qu'on pouvait espérer mieux, admet Nathan Ragot, responsable développement Grand-ouest de Collectif Energie. On estime, en gros, que ces boulangers ont économisé un mois de facture. »
Un appel d'offres lancé le 27 février
Il résume : « L'idée, c'est de mutualiser nos forces pour avoir du poids ». Ainsi, Collectif énergie espère rassembler 500 boulangers de toute la France (et pas seulement des 35 Fédérations qui ont un partenariat avec ce courtier), « qu'ils soient adhérents ou non au syndicat ». Cet achat, pour lequel l'inscription est ouverte jusqu'au 27 février, porte sur la consommation d'électricité de 2024 et 2025. Car l'un des enjeux, assure M.Ragot, est l'anticipation : « S'en préoccuper maintenant permet de sécuriser le budget énergie pour les deux prochaines années. Et puis, en s'y prenant à l'avance, les boulangers ont le temps de la réflexion ; par ailleurs, la résiliation peut prendre du temps ; et, souvent, l'échéance est à la fin de l'année, en plein rush pour les boulangers, qui n'ont pas le temps de s'y pencher. » Reste que certains espèrent toujours que le prix baissera dans les prochains mois : « Il a chuté de 200 euros par rapport à l'année dernière, mais le marché est plutôt stable depuis un mois, analyse M.Ragot. Nous pensons qu'il s'approche des prix qu'on devrait payer dans le futur. »
Dans ce contexte, les boulangers ont un atout : leur profil. Ils consomment davantage d'électricité quand les autres n'en ont pas besoin, la nuit et, éventuellement, davantage l'été. « C'est aussi pour ça qu'on fait un groupement d'achat entre boulangers, reprend le professionnel. Ils ont des profils comparables et intéressants. » Et il conclut sur un argument : « Plus on sera nombreux, plus on pourra obtenir de bon prix. » M.Allaizeau va dans le même sens : « Maintenant, la seule chance, c'est d'être en collectif. Même si ce n'est pas toujours naturel pour des boulangers-pâtissiers. » Et même si les tarifs obtenus seront bien plus élevés que ceux décrochés il y a seulement quelques années...