La Toque Magazine : Des blés anciens sont de nouveau cultivés en Provence, pour quelle raison ?
Damien Fornengo : Le Parc naturel régional du Luberon a soutenu le retour du blé meunier d’Apt en 2012. Cette variété ancienne avait été conservée mais ne servait qu’à nourrir les poules. Entre 2015 et 2019, Agribio 04 [groupement de producteurs bio des Alpes de Haute-Provence, NDLR] et Arvalis [institut technique agricole, NDLR] ont mené des essais sur différents blés tendres panifiables rustiques s’adaptant bien au climat sec et chaud de la Provence. Puis des tests de panification ont été effectués par des boulangers impliqués dans la filière Blé paysan bio.

LTM : Quelles variétés sont aujourd’hui produites, et par qui ?
D.F. : Les variétés retenues les plus intéressantes sont : la saissette, qui donne une farine grasse et parfumée — elle représente la moitié de la production actuelle —, puis le rouge de Bordeaux, le barbu du Roussillon, les semences fermières touselles et la florence aurore, qui apporte de la force. Et, bien sûr, les arômes varient selon les terroirs.
LTM : Qui cultive et à destination de quels meuniers ?
D.F. : Une vingtaine d’agriculteurs du pays de Forcalquier, de la vallée de la Durance et de la Camargue. Le Moulin Pichard [installé à Malijai, Alpes-de-Haute-Provence, NDLR] et le Moulin Saint-Joseph [à Grans, Bouches-du-Rhône, NDLR] s’engagent à leur acheter un volume de blé à un tarif deux fois supérieur à celui des cours pour qu’ils soient mieux rémunérés.
« En 2022, en Provence, le rendement des blés modernes est tombé au niveau de celui des blés anciens »
LTM : Les rendements sont-ils différents ?
D.F. : Avec le climat très sec de 2022, en Provence, le rendement des blés modernes est tombé au niveau de celui des blés anciens. Avec ou sans irrigation, avec ou sans fertilisants, le rendement est constant. En septembre, nous nous réunissons pour décider quelles superficies seront cultivées. Les agriculteurs voudraient consacrer davantage de surfaces aux blés anciens, pour davantage de boulangers. Il en faudrait une cinquantaine en tout pour pérenniser la filière Blé paysan bio.
LTM : Comment rejoindre le groupe ?
D.F. : Les boulangers qui souhaitent nous rejoindre sont les bienvenus. Nous organiserons au second semestre 2023 des formations de deux jours, prises en charge par les opérateurs de compétences, délivrées par Henri de Pazzis et Matthieu Fillacier, tous deux paysans-meuniers-boulangers en Provence. Les professionnels qui s’engageront à nos côtés devront avoir dans leur gamme certains pains purs farine de blé anciens.
Informations et calendrier des formations sur : www.bio-provence.org/Ble-Paysan-BIO-une-filiere-100-locale-et-BIO-en-Region-Sud-PACA
Lien vers une enquête destinée à identifier les boulangers intéressés par des formations de panification : https://docs.google.com/forms/d/e/1FAIpQLSdIEnfzfkj4grpXOTPzaOyE0GjHsZj2A7l9aInrsJFAiRon2A/viewform