Qui s’énerve encore sur Twitter, Facebook, LinkedIn ou Instagram en réponse à des commentaires négatifs ou haineux ? Malheureusement, une ministre, des lanceurs d’alerte, des extrémistes, des sensibles au qu’en-dira-t-on qui, pour exister un court instant, capitalisent sur le degré de passion qu’attisent la provocation et le sensationnel. Aucune justice ne se fait par écrans interposés ni à coups de “haches” tags. Qui croit encore que ce qui est dit à la télévision est le nec plus ultra de la vérité ? Qui croit qu’un influenceur suivi par plusieurs centaines de milliers d’abonnés est plus compétent qu’un expert diplômé sans notoriété ? Un seul serait encore trop. Ceux qui préfèrent sélectionner leurs sources et opposer au virtuel leur propre expérience de la réalité s’épargnent de s’encombrer de fausses informations, de faux événements et de fausses analyses qui répondent aux règles de la vulgarisation, pratique qui consiste à simplifier les choses pour qu’elles apparaissent en blanc ou en noir, en bien ou en mal.
Que dire quand, dans ce numéro, nous parlons des bonnes pratiques des chaînes de boulangerie alors qu’il y a quelque temps M6 livrait une émission de Zone Interdite sur la boulangerie artisanale dont le fond semblait avoir trois années de retard par rapport à la réalité de la profession en 2023 ? Oui, l’industrie a fait du tort à la profession, oui des artisans ont cédé aux sirènes de la chimie et de la facilité à une époque où aucune alternative permettant la survie de leur entreprise ne venait à eux. Avec le temps, les choses rentrent naturellement dans l’ordre et, depuis un bon moment déjà, avec de bons produits et de bonnes pratiques, un établissement est viable. Mais aujourd’hui, il importe que toute entreprise s’engage autant pour la qualité des conditions de travail — afin de conserver ses équipes —, que dans les démarches de transparence et de responsabilité environnementale, pour rassurer les clients en proie à la dissonance cognitive consistant à croire qu’ils votent en achetant (qu’ils consomment, mais en conscience). Alors non à faire d’une exception la règle, non à sceller des réputations à partir d’actualités sensationnalistes qui ne posent jamais d’analyses contextuelles. En revanche, oui à juger des lois trop ambiguës et imprécises qui autorisent à nommer entreprises artisanales celles qui exploitent les vides juridiques au nom du profit plutôt que celles qui incarnent l’exemplarité de la profession.