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L’hypothèse selon laquelle les variétés anciennes présenteraient un gluten plus digeste n’a pas été validée par l’étude GlutNsafe de l’Inrae.
L’hypothèse selon laquelle les variétés anciennes présenteraient un gluten plus digeste n’a pas été validée par l’étude GlutNsafe de l’Inrae. ©B. Lafeuille

Pourquoi le gluten n’a pas bonne presse ?

Diverses pathologies sont associées à la consommation de blé. Ni innocent ni seul coupable, le gluten n’a pas encore livré tous ses secrets.

Le blé rend-il malade ? Une part d’entre nous, oui, et certains gravement. Dans des pathologies, le rôle du gluten est clairement établi. Pour d’autres, la cause des troubles est incertaine, et peut être multiple.

La “vraie” intolérance au gluten, ou maladie cœliaque, est une maladie auto-immune qui se déclenche à n’importe quel âge chez des sujets prédisposés génétiquement. « L’absorption de simples traces de gluten déclenche une forte réaction inflammatoire, qui va attaquer la paroi de l’intestin, détaille le Dr Camille Le Quéré, médecin nutritionniste. Certains patients souffriront de diarrhées, de vomissements, d’une grosse fatigue, parfois pendant plusieurs jours… Mais tous ne présentent pas ces symptômes. Le diagnostic médical est posé par une prise de sang, et confirmé par une fibroscopie avec biopsie. » Attention : si un régime sans gluten a débuté avant la prise de sang, celle-ci ne sera pas fiable car les marqueurs de la maladie pourront avoir disparu.

© B. Lafeuille - La méthode de panification influe sur la digestibilité du gluten, d’après des travaux scientifiques en cours.

Cette pathologie lourde concernerait 1 à 2 % de la population française. « Mais seule une petite partie d’entre eux est diagnostiquée, souligne Brigitte Jolivet, présidente de l’Association française des intolérants au gluten (Afdiag). Dans 80 % des cas, les symptômes sont extra-digestifs : il n’est pas évident de faire le lien avec l’alimentation. » La destruction de la paroi intestinale réduit l’absorption des nutriments, induisant des carences susceptibles de causer divers troubles : anémie, problèmes cardiaques ou neurologiques, chute de cheveux, infertilité, retards de croissance chez l’enfant, etc. Alors on ne plaisante pas avec cette maladie : « Le seul traitement est une éviction stricte et à vie du gluten, prévient le Dr Le Quéré. Même un pain sans gluten fabriqué sur une table ayant touché une farine classique est à risque pour un malade cœliaque. » Attention, d’ailleurs, à l’utilisation du logo épi barré (indiquant une absence de gluten) : son usage est strictement réglementé.

La maladie cœliaque diffère de l’allergie au blé. Cette dernière, qui peut déclencher des réactions assez graves (notamment des œdèmes) à la suite de l’ingestion, est relativement rare, et disparaît parfois lorsque la personne atteinte avance en âge.

Hypersensibilité au gluten non cœliaque non allergique

Reste le cas le plus répandu : celui de l’hypersensibilité au gluten non cœliaque non allergique. Là encore, une inflammation de la muqueuse intestinale est en cause et les symptômes sont variables. « Cela peut entraîner des troubles intestinaux plus ou moins aigus, mais aussi des réactions inflammatoires, comme des douleurs articulaires », reprend le Dr Le Quéré. Le diagnostic est malaisé car, contrairement à la maladie cœliaque, aucun marqueur n’est détectable dans le sang et la paroi intestinale n’est pas détruite. « Un travail sera fait avec un médecin nutritionniste en retirant certains aliments pour voir comment réagit le corps », explique Brigitte Jolivet. L’éviction des aliments contenant du gluten améliore l’état de santé de ces patients. Toutefois, pas sûr que le gluten — qui a bon dos — soit le seul coupable. Les causes de cette hypersensibilité sont encore mal connues. D’autres protéines du blé sont suspectées. Et les Fodmaps (pour fermentable oligosaccharides disaccharides monosaccharides and polyols, sucres faiblement absorbés et fermentescibles, comme le fructane) sont de plus en plus montrés du doigt.

© B. Lafeuille - L’hypothèse selon laquelle les variétés anciennes présenteraient un gluten plus digeste n’a pas été validée par l’étude GlutNsafe de l’Inrae.

Tous les glutens ne se valent pas

Pour ces personnes sensibles mais ni allergiques ni malades cœliaques, tous les glutens ne se valent pas. Certains produits, bien que contenant du gluten, s’avèrent mieux tolérés. Produire des pains (et des gâteaux, des brioches, etc.) plus digestes est donc un enjeu, au moins pour cette population. Mais comment faire ?

Un discours en vogue pointe la sélection variétale comme une cause possible de l’explosion des troubles liés au gluten. En faisant primer les caractères technologiques sur les facteurs nutritionnels, on aurait sélection­né des blés au gluten résistant mais peu digeste. D’où l’engouement pour les variétés dites anciennes. L’étude GlutNsafe*, dont les résultats ont été publiés en mai 2022, ne confirme pas cette hypothèse. « Nous avons comparé dix-sept génotypes de blé, que nous avons classés en variétés anciennes et modernes, en plaçant la limite en 1960, présente Mélanie Lavoignat, chercheuse à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae). Les mêmes méthodes de culture et de panification ont été appliquées. Puis, les pains ont été digérés in vitro pendant deux heures. Or, les mesures de digestibilité que nous avons réalisée­s ne montrent aucune différence significative entre les variétés anciennes et modernes. »

« Les mesures de digestibilité que nous avons réalisées ne montrent aucune différence significative entre les variétés anciennes et modernes de blé » [l’Inrae]

© B. Lafeuille - Le grain de blé contient 10 à 15 % de protéines, dont des gliadines et des gluténines en proportions variables, qui formeront le réseau du gluten.

Même si le caractère “ancien” ne s’est pas avéré déterminant, toutes les variétés ne s’en tirent pas de la même manière. « Pour certaines à haut potentiel de rendement, nous avons observé qu’une plus faible digestibilité du pain était associée à une plus forte proportion d’albumines-globulines [qui ne sont pas des constituants du gluten, NDLR] dans la farine, reprend Mélanie Lavoignat. Pour le dire autrement, les farines les plus riches en gluten n’étaient pas associées à une plus faible digestibilit­é. »

Globalement, aucune corrélation négative n’a été observée entre les variables d’intérêt techno­logique (force boulangère, élasticité de la pâte, etc.) et celles d’intérêt nutritionnel. Avec prudence, Mélanie Lavoignat admet que « cela laisse penser qu’il serait possible de sélection­ner des variétés de blé en vue d’une meilleure digestibilité tout en gardant une bonne qualité pour la transformatio­n ».

Une nouvelle étude de l’Inrae est en cours, afin de tester, cette fois, l’influence de la méthode de panification sur la digestibilité du pain. « Il est clair qu’il y a des différences, mais il faudra attendre quelques mois pour communiquer sur des résultats », nous indique-t-on.

* Lavoignat M, Denis S, A. Faye. GlutNsafe : “Vers la sélection de variétés de blés au gluten plus digestible ?” 8e rencontre scientifique du Fonds de soutien à l’obtention végétal. Paris: FSOV; mai 2022. https://hal.inrae.fr/hal-03676774/document.

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