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Les Alchimistes recyclent les déchets organiques des boulangeries et du labo central de Land and Monkeys.
Les Alchimistes recyclent les déchets organiques des boulangeries et du labo central de Land and Monkeys. © Alexie Valois

Composter les biodéchets (2/4)

Un biodéchet alimentaire, non dangereux et biodégradable, peut être composté. La loi se fait même contraignante pour amener à progresser vers ou à revenir à cet usage. Mesure de bon sens soutenue par des solutions innovantes, le compostage est déjà le quotidien d’artisans partout en France.

Mélanger dans une même poubelle des épluchures de légumes, des pains rassis, des bouteilles en verre et des sacs en plastique ne devrait jamais arriver. Même lorsque l’on manque de temps pour tout. Le tri à la source est une question de bon sens et, depuis le 1er janvier, une obligation si vous produisez plus de 5 tonnes de déchets par an (quel que soit le poids à partir de 2024).

La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (loi Agec) oblige les producteurs de biodéchets à les réduire, à les trier et à les valoriser. Les fonds de pétrins, gâteaux périmés, pains inutilisables, coquilles d’œufs, épluchures, etc. — 200 à 800 kg par mois, selon la taille de l’entreprise — ne sont plus voués à l’élimination mais entrent dans l’éco­nomie circulaire de la matière organique.

© Alexie Valois - Les Alchimistes Marseille recyclent les déchets organiques de la boulangerie Pétrin couchette.

Incinérer des biodéchets réclame une énergie toujours plus coûteuse et émet du CO2. Le fait de les mettre à la décharge engendre des fermentations et l’émission de gaz à effet de serre en grandes quantités : le méthane a un pouvoir de réchauffement global 25 fois supérieur à celui du CO2. À l’inverse, la valorisation organique via le compostage, l’épandage ou la méthanisation fait retourner au sol des matières organiques brutes ou les transforme en une matière valorisable — le compost ou le digestat — adaptée aux besoins agricoles.

© Les Alchimistes - Site de production de compost des Alchimistes, les biodéchets deviennent de l'engrais naturel.

Transformer en fertilisants les déchets de la cuisine n’est pas nouveau. À la campagne, le compostage au jardin est une évidence, si bien que des boulangers instal­lés en zone rurale ne mettent pas à la poubelle classique ce qui peut retourner dans le sol. Comme Magali Braja, à Saint-André-de-Boëge, en Haute-­Savoie (lire LT n° 343).

Des collectes de déchets organiques

Avec l’augmentation des prix des transports et de l’énergie, la facture liée au traitement des déchets explose. Pour la réduire en zone urbaine, les collectivités commencent à organiser la collecte séparée des déchets organiques. Au total, une centaine de villes sont déjà engagées dans cette démarche. Paris met ainsi des bacs spécifiques à disposition de ses habitants et les biodéchets sont ensuite traités par des entreprises prestataires. Dans la communauté d’agglomération Nantes Métropole, il existe plus de 200 composts partagés en milieu scolaire, au sein de résidences et de jardins familiaux.

© Alexie Valois - Les Alchimistes Marseille recyclent les déchets organiques de la boulangerie Pétrin couchette.

Des initiatives privées ont été précurseurs. Les Alchimistes (entreprise solidaire d’utilité sociale) collectent et compostent les déchets alimentaires des professionnels depuis 2018.Ils sont présents à Paris-Île de France, Marseille, Lyon, Toulouse, Nice, Nantes, Toulon, Montpellier, Lille, et sur l’île de La Réunion. Leur trentaine de sites de compostage sont destinés à fournir jardins et agriculteurs.

En janvier dernier, l’opération Sirha Collect a récupéré lors du salon professionnel trois tonnes de biodéchets, que Les Alchimistes ont traitées. À Marseille, l’équipe de Pétrin couchette (lire LT n°340) a, dès le début de son activité, intégré des poubelles brunes estampillées Les Alchimistes. Tandis que les boulangers s’affairent, un employé des Alchimistes Marseille emporte le bac plein et le remplace par un container propre et désinfecté. Il repart également avec le bac biodéchets mis à disposition de la clientèle.

Les tarifs de ce service sont calculés selon le nombre de passages effectués, la quantité et la qualité collectées et le nombre de bacs à nettoyer. Autrement dit : mieux vous triez et moins vous gaspillez, moins vous payez.

Des formations au tri

Chez Land & Monkeys, boulangerie-­pâtisserie-snacking francilienne pionnière et militante, lutter contre le gaspillag­e alimentaire passe par des dons le soir à des initiatives solidaires qui en assurent la distribution. Mais aussi, depuis 2021, par la récupération et le compostage des déchets alimentaires par les Alchimistes au labo central et dans les six magasins.

© Les Alchimistes - Les biodéchets entrent dans l’économie circulaire de la matière organique.

« Sur une année environ, nous avons collecté chez ce client trente-cinq tonnes de biodéchets. La putréfaction peut être rapide et créer des odeurs. Nous mettons en place des scénarios de collecte à un rythme régulier pour remplacer les bacs », explique Pauline Fons, qui s’occupe de former ses clients. Si cartons et plastiques sont mêlés au compost, un nouveau tri manuel est obligatoire pour créer du terreau fertilisant, et cela a un coût. Quand Pauline initie une équipe au tri, elle s’assure que soient présents les personnels de production, de vente, ainsi qu’un manager, qui pourra à son tour faire passer le message en cas de manquements.

© Alexie Valois - Le tri à la source des biodéchets est, depuis le 1er janvier 2023, une obligation si vous dépassez 5 tonnes par an et le sera quel que soit le poids à partir de 2024.

« Faire le tour des locaux et expliquer l’organisation du tri des poubelles fait partie du processus d’intégration des personnes qui arrivent dans l’entreprise, indique Céline Baudour, responsable des opérations chez Land & Monkeys. Des affiches précisent la marche à suivre, ce n’est pas compliqué ! » Dans les boutiques de la marque, un panneau indique clairement aux consommateurs : “Nos biodéchets sont triés, collectés, compostés pour être revalorisés”. 

© Alexie Valois
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