La tendance créative en pâtisserie et chocolaterie fait la part belle aux associations de saveurs. Et le chocolat, dans sa diversité aromatique exceptionnelle, se prête tout particulièrement à ce petit jeu. Que le mariage soit classique (caramel, fruit, praliné…) ou innovant (légume, épice, fleur…), l'approche séduit toujours un grand nombre de consommateurs. Mais l'opération est assez risquée commercialement, techniquement ou gustativement. Pour éviter certains écueils et bien préparer son coup, mieux vaut sécuriser ses choix dès le départ.
Les règles marketing• Le positionnement à tenir (classique ou innovant) dépend de votre clientèle et de la concurrence. Seule l'expérience vous permet réellement de sentir si la population locale est réceptive à la créativité. Testez ! • Si votre cible est plutôt traditionnelle, misez sur des parfums simples, universels et, mieux encore, sur des ingrédients typiques de votre région (miels, fruits, fleurs, alcools…). L'intérêt des consommateurs pour le patrimoine local ne faiblit pas ! Sur l'ensemble de l'offre, n'hésitez pas cependant à créer un peu de surprise avec des parfums originaux (yuzu, bergamote, anis vert…). • Si votre clientèle est ouverte à la nouveauté, alors foncez ! En matière de combinaison aromatique, tout est a priori possible, mais surfer sur les tendances reste toujours plus porteur : légumes (anciens), agrumes (rares), vins (doux), whiskies (fins), épices (exotiques), herbes (fraîches)… • L'accompagnement marketing d'une innovation est primordial. Le concept du magasin, le packaging ou l'argumentaire de vente sont essentiels pour promouvoir un produit qui aura, dans le cas contraire, toutes les chances de rester inaudible.
Les règles techniques • Dans un mélange homogène (ganache par ex.), le point critique à surveiller est la liaison entre la matière grasse, la matière sèche (sucres, fibres) et l'humidité. Plus la teneur en eau est élevée, moins le produit est stable dans le temps, plus la date de péremption doit être courte et plus la température de conservation doit être basse. • La dégradation enzymatique et microbiologique dépend directement de l'eau libre dans le produit (ou activité de l'eau - Aw). Pour les ganaches et fourrages chocolat, il existe des logiciels qui permettent d'estimer la DLUO (Pro-Choc). En cas de doute, des analyses microbiologiques (études de vieillissement) peuvent être nécessaires. • Privilégiez donc les sources riches en matières sèches/grasses et pauvres en eau : miels, huiles essentielles, épices/fleurs déshydratées… Sachez qu'il existe aujourd'hui une multitude d'ingrédients naturels très intéressants techniquement et gustativement : paillettes de fruits, couvertures de fruits (Inspiration de Valrhona), pâtes de fruits secs ou pralinés originaux (Weiss). • Pour les ingrédients humides (fruits, légumes), veillez donc à baisser l'activité de l'eau par diverses techniques : déshydratation, confisage, cuisson…
Les règles organoleptiques• Les essais et tests de dégustation sont indispensables (voir encadré). N'oubliez pas de goûter aussi les produits après la date de péremption. • Un bonbon de chocolat ou un entremets peut paraître excellent à la première bouchée, mais écoeurant à la troisième (c'est souvent le cas lorsque le produit est trop gras ou sucré). Il est possible de « tromper » la perception de la sensation grasse/sucrée (que beaucoup de consommateurs n'apprécient plus) en accentuant la « fraîcheur » en bouche. Les fruits acidulés et certaines couvertures chocolat sont pertinents à cet effet. • Il existe des outils sensoriels permettant de trouver la bonne combinaison aromatique. Citons les arômes de Cyrano de Belcolade (un coffret pédagogique qui facilite l'identification des arômes du chocolat) et le portail foodpairing.com (un logiciel on-line pour repérer l'éventail des aliments pouvant s'accorder avec un ingrédient).
|
par Armand Tandeau (publié le 10 avril 2017)