Piliers de la motivation et de la fidélisation des salariés, le confort et la sécurité au travail constituent depuis des décennies un défi de fond pour tous les métiers pénibles. La boulangerie ne fait pas exception, avec ses horaires décalés, ses efforts physiques permanents (dont le port de charges lourdes, la station debout prolongée, les postures fatigantes) et son cadre de vie pas toujours très sain (risque de glissade ou de blessure, atmosphère poussiéreuse et bruyante, déficit de lumière naturelle, risque de braquage, incivilités au moment de la vente, etc.).
Si les contraintes physiques ont nettement diminué, elles restent bien souvent difficiles à supprimer totalement. Par contre, retravailler l’environnement de manière élargie et en tenant compte des aspirations contemporaines peut nettement améliorer la manière de vivre le travail.

Des facteurs psychologiques
Il faut d’abord comprendre que le sentiment de bien-être au travail n’est pas seulement une problématique d’ordre physique (comme il l’a longtemps été) mais qu’il est aussi intimement lié à des facteurs psychologiques. C’est pourquoi on préfère parler aujourd’hui de qualité de vie au travail (QVT) : ce vocable dépasse la notion très juridique de “conditions de travail”, qui inclut un volet social (salaires, horaires, contrat de travail, temps de travail, avantages sociaux, etc.) et un volet environnemental (ambiance sensorielle, hygiène et sécurité, accessibilité, etc.).
Ainsi la QVT va-t-elle plus loin que le Code du travail en intégrant une démarche plus subjective (et donc personnalisée) qui vise à améliorer la perception que les salariés ont de leur emploi. Les conditions managériales sont devenues un axe central de la QVT. Même si elles ont aussi leurs limites, certaines méthodes de management amènent les salariés à se projeter dans l’entreprise (formation continue, progression de carrière, nouvelles responsabilités, par exemple), à développer leur estime de soi (sentiment d’être utile, respecté, écouté, valorisé…) ou à trouver du sens à son travail (impression d’agir en faveur de la satisfaction des clients, de la qualité artisanale, de la planète ou de la société, notamment).

L’enjeu de l’ergonomie
Moteur de progrès et de performance pour l’entreprise, l’ergonomie (lire encadré) est aussi un levier essentiel et très actuel pour faire progresser la QVT en boulangerie, ainsi que l’accessibilité des fournils à tous (notamment aux personnes en situation de handicap). Une véritable réflexion ergonomique peut être conduite au travail (avec l’aide d’experts si besoin) à plusieurs niveaux, en particulier concernant :
- le matériel de production ou de vente : posture moins fatigante, nettoyabilité et sécurité maximisées, actionnement et manutention allégés, commande simplifiée, risque d’erreur minimisé, etc. ;
- l’organisation des postes de travail : allégement de l’effort de manutention, raccourcissement des déplacements, adaptation de la hauteur de travail, adaptation biomécanique de la gestuelle répétitive, facilité d’usage des équipements, etc. ;
- la transmission d’informations : consignes plus claires, relations production/vente plus fluides, objectifs plus pertinents et cohérents, procédés et procédures plus accessibles, relevés d’autocontrôle simplifiés, etc.

Mixité et égalité femmes-hommes
L’index de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (défini par la loi du 5 septembre 2018) oblige les entreprises d’au moins 50 salariés à rendre effective l’égalité entre les hommes et les femmes. Même si elle est souvent abordée sous l’angle des salaires et des carrières (conditions sociales), l’égalité femmes-hommes a aussi un lien avec la QVT. Certains facteurs jouent en faveur de l’égalité et de la mixité dans les fournils, par exemple :
- les équipements et les postes de travail peuvent être adaptés pour favoriser l’accès des femmes au métier et limiter la pénibilité physique ;
- les horaires de travail sont susceptibles d’être aménagés, pour les jeunes mamans devant, par exemple, prendre en charge leurs enfants après l’école, ou pour les femmes enceintes ;
- la prévention du sexisme ordinaire, qui relève du droit (article L1142-2-1 du Code du travail) et de la dignité humaine : les dénigrements et comportements inappropriés répétés des hommes envers les femmes (plus rarement dans l’autre sens) ont des répercussions physiques et psychiques (stress, anxiété, dépression, perte d’appétit, anorexie, boulimie, tentations suicidaires, etc.). Le sexisme ordinaire conduit parfois à des faits plus graves, répréhensibles pénalement (harcèlement sexuel/sexiste et agression sexuelle).