Petit nœud papillon, chaussures jaunes à paillettes, veste de tailleur... On peut dire que Nanou d'Haese détonne parmi les exposants du marché de Saint-Cernin, dans le Lot, le mardi soir. Comme elle le résume, « c'est mon pain, mon look, mon caractère ! » Et, côté personnalité, on peut dire que la toute nouvelle quadragénaire est audacieuse.
Pour preuve, elle s'est lancée comme paysanne-boulangère, début 2020, après seulement une semaine de formation ! « Je faisais mon pain, avant, avec des amis. Ca me plaisait, se souvient-elle. Et j'avais comme une pulsion, une mission : il fallait que je nourrisse les gens. » Et les débuts ont été facilités : « Je n'ai pas eu à créer mon entreprise, mais seulement à m'installer aux côtés de mon mari Jason », éleveur de vaches Aubrac et céréalier. « Il a aussi semé les blés que je faisais transformer en farine, avant d'acheter mon moulin », témoigne-t-elle. La boulangère a aussi pu compter sur le four à bois de la ferme, qui date sans doute de la moitié du XIXe siècle. Jason d'Haese : « C'est un four authentique d'époque, à chaleur descendante ».
Une farine fraîche
La Lotoise cherche d'ailleurs à réaliser son pain « au plus proche de la façon dont le faisait les paysans, avant ». Vieux four, donc, mais aussi céréales bio produites sur l'exploitation et de variétés anciennes. Des variétés au rendement faible mais « valorisés de façon pertinente », se félicite M.d'Haese. « Ce que j'aime avec ces blés anciens, ajoute sa femme, c'est qu'ils n'ont pas été trafiqués, ils ont le gluten qu'ils ont... C'est à vous, boulanger, d'adapter votre technique de façonnage, de pétrissage, d'hydratation de la pâte pour avoir une belle boule ».
Nanou d'Haese fait aussi son levain, à partir de petit son. La farine, elle, est produite sur place, depuis l'achat d'un moulin de type Astrié, en avril 2020. « Je voulais une farine fraîche, moulue peu avant la fournée, tranche-t-elle. Avec cette farine, qui est par ailleurs toujours semi-complète, la pâte est plus facile à travailler, plus belle, plus souple, plus malléable... » Elle propose donc une diversité de pains, à base de farines de blé et de petit épeautre : nature, olive, noisette, noix, raisin, graines... et même chocolat.
Car la modernité a bien sûr sa place dans ce modèle. A commencer par la commercialisation. Nanou vend ses pains le mardi sur un marché et le vendredi en livraison à domicile dans quatre communes proches. « Même sur le marché, 90% de mon pain est écoulé sur commande, souligne-t-elle. Ça limite les pertes. » Cette formule lui permet aussi de ne travailler que le lundi, mardi, jeudi et vendredi et d'être donc disponible pour ses deux enfants le mercredi et le week-end. Elle se félicite : « Je me suis fait mon planning en fonction de ma vie privée ».