Avec ses yeux noirs, son teint hâlé et une fraise tatouée sur le bras droit, Margaux Bellorgey n’est pas une patronne comme les autres. À commencer par son parcours atypique. À 18 ans, après de courtes études de langue, cette bordelaise passionnée de cuisine depuis son plus jeune âge se lance dans un CAP pâtisserie au centre de formation l’Institut des Saveurs (Bordeaux).
Diplôme en poche, elle court se former auprès de grands chefs, dans des bistrots et des hôtels de renom. Avide de rencontres et de connaissances, elle multiplie les expériences et se forme seule en cuisine. Après deux ans de bons et loyaux services, la jeune femme choisit de parfaire son cursus à quelques milliers de kilomètres de la métropole. Direction, les Antilles. Là-bas, un séjour d’un an se transforme en une vie. Elle y restera treize ans.
Des îles d’outre-mer à Montmartre
C’est d’abord à Saint-Martin, puis à Saint-Barthélémy qu’elle pose ses valises. Sur l’île, Margaux Bellorgey crée sa propre structure de pâtisserie, baptisée Une Part de gâteau, et se spécialise en entremets de fête. En parallèle, elle propose des repas à domicile sur mesure pour riches vacanciers. Là, elle rencontre son futur associé, Sébastien Aubé, entrepreneur parisiano-antillais à la tête de plusieurs établissements, devenu client de ses pâtisseries.
De retour en France en 2021, Margaux Bellorgey prend la direction d’ateliers de cuisine et de pâtisserie à l’école Chefsquare avant d’entreprendre aux côtés de Sébastien Aubé l’aventure Armande. Un nom emprunté à une œuvre cinématographique. « Je suis une grande fan du film britannico-américain Le Chocolat, avec Johnny Depp et Juliette Binoche. On y découvre une jeune femme franco-mexicaine qui ouvre une chocolaterie, mais aussi une vieille dame caractérielle qui se prénomme Armande. Reprendre ce nom était une façon de rendre hommage au film grâce auquel je suis devenue pâtissière tout en faisant la part belle aux femmes », explique-t-elle.

Pour installer leur comptoir traiteur et pâtisserie, les deux associés choisissent Montmartre, à Paris (18e), et son ambiance de village. Dans un décor chaleureux, en bois, on se sent comme à la maison. Des grands-parents y côtoient une troupe de comédiens. Tous viennent déguster une cuisine de partage 100 % faite maison, aux recettes classiques mais revisitées sur fond d’inspirations méditerranéennes. Tous les plats sont proposés à la portion et présentés en vitrine. « Ici, les gens achètent avec les yeux. Tout est montré, on ne peut pas être surpris ni tricher. J’aime l’idée d’une grande tablée avec beaucoup de choses à partager », détaille la jeune femme. Le végétal est très présent dans les recettes avec, par exemple, des gnocchis de pommes de terre au zaatar et olives, crème de parmesan et romarin frit.
Une sandwicherie artisanale
Côté sucré, la pâtisserie est régressive. À l’image de la tarte au citron meringuée au citron noir acidulée et sa meringue italienne saupoudrée de citron noir et de bergamote ; ou la Bomba, un beignet pomme-cannelle garni de compote de pommes Golden inspiré de ceux vendus sur les plages d’Andalousie (Espagne).
Il y a quelques mois, alors qu’Armande commence à rencontrer son public, les deux associés ont l’idée d’ouvrir une sandwicherie. « Il y a beaucoup de touristes à Montmartre et l’offre de snacking et de sandwichs de qualité nous paraissait maigre. Cela manquait d’une bonne enseigne de finger food [nourriture préparée pour être mangée avec les doigts, NDLR] ! » C’est comme cela qu’est née Armande Lepic, une sandwicherie artisanale installée dans la rue du même nom, au numéro 24. Côté décoration, pas de surprise, la convivialité est de mise, avec des meubles en bois et des carreaux de ciment façon zellige dans les tons bordeaux au mur.

La carte est courte. Six sandwichs réalisés avec le pain du Meilleur ouvrier de France Frédéric Lalos. Des recettes de saison originales, faites maison, concoctées avec des ingrédients de qualité : le Croq truffe (béchamel à la truffe et comté), le club Lepic (un club-sandwich revisité avec une mayonnaise au miso et du poulet croustillant, chou blanc vinaigré aux baies roses, oignons rouges en pickles, œufs durs et coriandre) ou encore le Ptit Veggie (cream cheese, concombre, pommes Granny, oignons rouges, menthe et poivre), tous réalisés avec un pain de mie ; le Chiche zaatar (labney au zaatar citron et ail confit, aubergines japonaises, fêta, menthe, persil et pois chiches croustillants) avec pain bun ; le Crispy campagne (effiloché de poulet, mayonnaise végane, céleri rémoulade, pommes Granny et sucrine) avec un pain ciabatta ; ou encore le Prince (chiffonnade de jambon Prince de Paris, cantal affiné, beurre fouetté au piment d’Espelette, cornichons et cerfeuil) présenté dans une baguette ficelle de tradition.
Une carte courte également du côté du sucré avec un financier, un cookie, une brioche, ou encore la Bomba crème brûlée : un beignet à la crème pâtissière de vanille de Madagascar et caramel croquant. Sans oublier un Banana bread géant en forme de cake à trancher, pour un dessert sans gluten ni lactose. Le tout avec un ticket moyen autour de 12 €. Simple mais frais, bon et copieux. Les ingrédients du succès.