Rencontres
Alain Chartier.
Alain Chartier. ©DR

Alain Chartier, au cœur de la matière première

Après avoir construit sa notoriété en glacerie, le MOF, s’aventure aujourd’hui dans le chocolat bean-to-bar à Vannes, dans le Morbihan. Un nouveau challenge pour cette figure du métier.

Même après 35 ans de métier, Alain Chartier se démarque toujours par sa curiosité, moteur de développement, et par sa connaissance des matières premières, tant sur les plans nutritionnel que mécanique.

Dès son apprentissage, il construit ce savoir-faire de pointe, gage d’une maîtrise hors pair des produits et de leurs “barrières de sécurité”, définissant un cadre d’utilisation à respecter. CAP et brevet de maîtrise pâtisserie en poche, le jeune Vendéen multiplie les expériences en restauration et en boutique, en France et à l’étranger (Espagne, Belgique), pour « découvrir et tester toutes les facettes du métier », éclaire l’artisan.

© L. RANNOU - Une collection tournante d’une vingtaine de bâtonnets glacés : un produit gourmand et facile à servir en magasin pour un gain de temps en vente.
© DR - Aux côtés de ses créations glacées, il propose également de la pâtisserie fraîche sur certains points de vente, far breton ou millefeuille Breizh, découpé à la forme de la Bretagne.

En 1997, il intègre l’École nationale supérieure de pâtisserie (ENSP) d’Yssingeaux (Haute-Loire) comme assistant-formateur : un poste stratégiqu­e. « En une année, j’ai gagné dix ans de métier ! » Il enchaîne avec une autre année déterminante au sein du pôle innovation, où il affine son expertise sur les sucres, gélifiants et autres texturants. Ce bagage l’incite à se spécialiser en glacerie pour présenter les concours. À 30 ans, en 2000, il décroche le titre de Meilleur ouvrier de France (MOF) glacier, puis celui de champion du monde des desserts glacés en 2003.

Entre-temps, il a lancé sa société de consulting, élargie en 2004 par la création de son entreprise spécialisée dans les desserts glacés à l’année, les macarons et la chocolaterie, à Vannes (Morbihan). En 2007, il ouvre son laboratoire et son deuxièm­e magasin dans un bâtiment de 1 000 m2 où il organise des cours pour amateurs dans le cadre de son école des dessert­s.

Sa marque compte aujourd’hui sept points de vente : en centre-ville, en périphérie urbaine et sur la côte, pour mixer les emplacements et équilibrer ainsi la fréquentation à l’année. Dans le même objectif, il travaille sa profondeur de gamme, avec des produits d’appel et des tarifs évolutifs. Certains points de vente proposent même de la pâtisserie fraîche.

© L. RANNOU - Son nouveau laboratoire-boutique est équipé de panneaux photovoltaïque.
© L. RANNOU - Son nouveau laboratoire-boutique dédié au chocolat bean-to-bar a été inauguré au printemps 2022, à Theix, en périphérie de Vannes.

Représentant 40 % de son chiffre d’affaires, le chocolat fait également figure de relais de vente à l’année. Depuis le printemps 2022, il bénéficie même d’un bâtiment de 600 m2 dédié à la production bean-to-bar (de la fève à la tablette), avec laboratoire et boutique. Un projet né de la volonté du MOF d’aller toujours plus loin dans la connaissance des produits, en l’occurrence les fèves de cacao, qu’il sélectionne lui-même en voyageant dans les plantations. Fermentées et séchées sur les sites de production, elles sont ensuite triées, torréfiées, broyées et mélangée­s à d’autres ingrédient­s, suivant les recettes (lait, sucre, etc.), en Bretagne. À la clé : douze origines et 52 tablettes biologiques, « avec une matière première la plus qualitative et éthique possible », note Alain Chartier, membre du club des Chocolatiers engagés.

© L. RANNOU - Sa gamme de chocolats noirs biologiques pures origines (sans assemblage) présentent deux pourcentages de cacao (100 % ou 72,5 %) pour une meilleure expression des terroirs.
© L. RANNOU - Bordeaux (origine Afrique), rouge (origine Amérique), rose (lait origine), vert (bien-être), orange (tablettes gourmandes), noir (ligne bretonne) : à chaque collection, son code couleur.
© DR - Sa gamme de chocolats noirs biologiques pures origines (sans assemblage) présentent deux pourcentages de cacao (100 % ou 72,5 %) pour une meilleure expression des terroirs.

Cette collection est répartie en plusieurs familles, identifiables grâce à leur code couleur distinctif : bordeaux pour la gamme d’origine africaine (Liberia, Sao Tomé, etc.), rouge pour l’américaine (Pérou, Équateur…), noir pour les chocolats “bretons” (intégrant du lait local, de la fleur de sel de la presqu’île de Rhuys, etc.), vert pour la gamme bien-être — avec, par exemple, du sucre de coco à l’index glycémique inférieur à celui du sucre de betterave français utilisé par ailleurs.

Nutrition et naturalité

Autre terrain d’exploration de longue date pour le MOF : la nutrition et la naturalité. « On va vers une démarche de plus en plus végétale, sans additifs. L’augmentation du coût des matières premières, comme le lait, le beurre, la crème en glacerie, nous oblige à penser et à procéder autrement pour faire aussi bon mais moins gras et moins sucré, avec le meilleur rapport goût/coût. » Ce qui requiert une grande agilité chez les artisans « et une maîtrise technologique des produits, souvent parent pauvre de la formation, pointe Alain Chartier. Par exemple, en cas d’excès de gras, un mélange risque de trancher. »

À chaque matière (grasse, humide, sèche) son problème… et sa solution ! Cette expertise, alliée à ses titres, a valu à Alain Chartier de nombreuses missions de formation et de conseil pour des grandes enseignes (dont Valrhona ou La Fruitière du Val Evel). Une activité de consulting toujours d’actualité, comme son engagement dans le métier au sein d’associations, à l’instar de Relais Desserts. Ses laboratoires de production lui permettent aussi de fabriquer des glaces à façon pour d’autres maisons. Autant de collaborations, sources de croissance pour son entreprise et d’innovation pour son travail en nom propre.

© DR - Livre Alain Chartier
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