Rencontres
Daniela Capuano fréquente les caféiers depuis son enfance au Brésil.
Daniela Capuano fréquente les caféiers depuis son enfance au Brésil. © DR

Daniela Capuano : révélatrice d’arômes

Meilleur ouvrier de France torréfactrice et barista, la Brésilienne Daniela Capuano nous confie ses recommandations pour optimiser la préparation, la dégustation et les applications du café.

Enfant, Daniela Capuano a joué entre les caféiers de la ferme de ses grands-­parents au Brésil. Étudiante en graphisme, elle décroche un job de barista, et se prend vite au jeu. Elle participe bientôt à des championnats de barista et de torréfaction au Brésil, puis à l’étranger. En 2012, elle emménage en France et prend part à l’essor d’une nouvelle scène café, accéléré par la crise sanitaire et les confinements successifs. « On trouve désormais des coffee shops partout à Paris, et même en province. Et ce n’est qu’un début ! » se réjouit la jeune femme, sacrée Meilleur ouvrier de France torréfactrice en 2019.

Daniela Capuano fréquente les caféiers depuis son enfance au Brésil. (© DR)

La Toque magazine : Comment définiriez-vous un “bon” café ?

Daniela Capuano : C’est d’abord un café bien traité, de sa production à sa préparation. Ensuite, comme dans le vin, il n’existe pas un bon café mais une multitude, suivant les préférences de chacun. Personnellement, j’aime autant les pures origines que les mélanges, y compris ceux intégrant du robusta, qui fait historiquement partie des habitudes de consommation des Français. Aujourd’hui, la tendance est aux cafés plus punchy, avec des notes fruitées et acidulées. Mon dernier coup de cœur est un arabica de Colombie de la variété Sudam Rumé, cultivé par la ferme Inmaculada et torréfié par Momus en France. Complexe, il révèle des saveurs subtiles de mangue et d’ananas.

LTM : En quoi consiste la torréfaction ?

D.C. : C’est une transformation physique et chimique du grain de café par la chaleur. Établir un profil de torréfaction revient à définir une recette de cuisson, variable suivant les types de cafés et les objectifs recherchés. On attend d’un torréfacteur qu’il respecte sa matière première. En France, les cafés ont longtemps été trop brûlés, un excès de torréfaction [comme de sucre, NDLR]servant à camoufler les défauts des grains, cueillis trop verts ou trop mûrs. Mais c’est en train de changer sous l’influence des cafés de spécialité, qui offrent des gages de qualité et de traçabilité aux consommateurs, avec des aromatiques plus marquées et une expression des terroirs, comme dans le vin.

Les Cafés BOC au Mans : un lieu de vente et de transmission autour du café, parrainé par Daniela Capuano. (© B. GUICHETEAU)

LTM : Quels sont vos conseils pour préparer un café ?

D.C. : Déjà, choisir un café de qualité, livré régulièrement pour garantir sa fraîcheur. Éviter aussi de moudre des grains à l’avance. Mieux vaut d’ailleurs ne pas acheter de café moulu. S’il ne fallait acheter qu’une seule machine, je conseillerais d’investir dans un moulin à café, et de proposer du café filtre, avec une granulo­métrie adaptée. La préparation d’un expresso requiert une mouture plus fine qu’une cafetière à piston, par exemple. Aujourd’hui, il existe un très large choix de matériel de qualité — dont des machines automatiques —, pour tous les budgets. Au quotidien, il faut veiller à la propreté et aux réglages de ses équipements. Attention, enfin, à la qualité de l’eau, qui compose 95 % de la boisson. Pour les recettes lactées, il y a des dosages précis de café, de lait, de mousse de lait, à respecter. Investir dans une formation de barista peut aider à adopter les bons gestes.

LTM : Quels profils de cafés travailler en pâtisserie ?

D.C. : Je conseille d’utiliser des cafés au caractère suffisamment marqué pour que leur aromatique résiste à leurs associations avec d’autres produits. Il y a encore un travail de pédagogie à faire auprès des pâtissiers pour qu’ils considèrent le café comme un ingrédient au même titre que la vanille ou le chocolat : aux origines variées et sélectionnées suivant les applications. Certains se marient mieux avec le chocolat, d’autres avec les produits laitiers ou les fruits. Par exemple, les cafés du Kenya aux notes de fruits rouges peuvent être travaillés en accord avec des fruits rouges, ou l’on peut jouer le contraste. Pour un usage en infusion, je recommanderais de concasser au préalable les grains, afin de libérer au maximum les arômes.

Entremets « tong » au café signé Arnaud Larher sur la scène du Paris Coffee Show. (© B. GUICHETEAU)

LTM : À quoi ressemble votre journée type ?

D.C. : Je n’ai pas vraiment de routine. En tant que consultante, je donne des formations, j’interviens sur des salons, je réalise des missions de sourcing et de conseil. Par exemple, j’accompagne les cafés BOC, au Mans, dans leur développement. Je suis également associée chez Momus, un éditeur de cafés d’exception. Comme caféologue, j’assure le sourcing des cafés, le contrôle qualité et la torréfaction. Et on peut me croiser à la boutique, à Paris: j’aime le contact client.

LTM : Et quel est votre meilleur souvenir culinaire ?

D.C. : À l’époque où je travaillais à L’Arbre à Café, nous avions organisé un évènement avec la cheffe Anne-Sophie Pic autour du café. J’avais en charge la réalisation des boissons, et je garde un souvenir fort d’un plat d’huîtres au café réalisé avec du café Bourbon Pointu de La Réunion, torréfié par nos soins et préparé en Chemex [cafetière à filtre manuelle, pour uneextraction douce, NDLR] façon irish-­coffee. Un incroyable mariage en bouche ! Côté sucré, je me rappelle d’un éclair signé Yann Couvreur au café d’Éthiopie, chocolat et anis. Je déteste ce dernier goût, et pourtant l’association des trois saveurs fonctionnait à merveille.

www.capuanocoffee.com

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