En termes de consommation hors domicile, et dans le cadre de formules snacking, le marché des boissons suit la tendance des consommateurs qui se tournent vers des produits moins sucrés et plus naturels. L’année 2019 a été marquée par le recul des « soft-drinks » dont le volume a chuté de 3,6 % en GMS, selon une étude Nielsen (1). Les grandes marques ont fait face à cette situation en musclant leur offre et ont développé les boissons infusées au thé : Fuze Tea (marque de Coca Cola) par exemple a vu ses parts de marché augmenter de 161,6 % entre octobre 2018 et octobre 2019, selon Iri-Cam (2). Un autre axe d’innovation important dans le secteur des BRSA (boissons rafraîchissantes sans alcool) est celui des boissons fermentées, avec un enthousiasme pour le kombucha et désormais le kéfir de fruits. Initialement vendues en magasins spécialisés, ces recettes se généralisent, et pour cause, les ferments qui les composent permettent de réguler la flore intestinale et de détoxifier le corps, faisant de ces boissons des produits santé. La jeune génération est plus sobre que ses aînés et suit la tendance « nolo » (voir encadré ci-contre), ce qui explique la montée en puissance de boissons apportant de nouveaux plaisirs : infusées au CBD - ou cannabidiol, un composant du cannabis non-psychoactif (pour déstresser), fermentées (pour le confort digestif), épicées (ex. : shots de gingembre et curcuma pour un coup de fouet) ou exotiques (ex. : eaux de coco, d’aloe vera pour la découverte). Le secteur des eaux aromatisées, plates ou gazeuses, continue de très bien se porter, progressant d’environ 15 % depuis plus de 3 ans (LSA sept 2018, Iri-Cam 2019). (3)
La cantine bio Yumi propose divers shots vitaminés et épicés dans des bouteilles écologiques, en résidus de canne à sucre.
Personnalisation et santé
Les jus et les smoothies sont en tête de liste des boissons « saines », tendances qui s’ancrent de plus en plus chez les consommateurs. Composées de fruits, de légumes (kale, épinard, carotte, betterave), voire de super- aliments (guarana, spiruline, curcuma), elles sont idéalement préparées à la minute et sont personnalisables. Une offre de soupes froides en été, de jus de fruits pressés (orange, pamplemousse, citron), de thés glacés maison voir même de cold brew (café mixé avec glaçons) seront de bons produits d’appel.
Pour toucher davantage la clientèle, la boulangerie Farinez-vous (Paris) par exemple, a adopté un système de bouteilles en verre consignées, étiquetées à son nom, pour ses boissons maison : « les clients jouent le jeu et reviennent, nous allons même décliner les pots en verre pour les yaourts, en plus des boîtes déjeuner Reconcil » témoigne-t-elle.
L’offre boisson mérite elle aussi une mise en avant en boutique.
On voit aussi émerger des shots vitaminés à base d’épices aux effets protecteurs et préventifs (marque Yumi par exemple). À base d’ingrédients dit adaptogènes, tels que le gingembre, le citron, le curcuma ou le piment, ils promettent « un coup de fouet » et différents bienfaits (récupération, détox, énergie…). Ils s’inscrivent dans la tendance des aliments fonctionnels, répondant aux besoins du moment du consommateur. Côté boissons chaudes, la soupe en hiver constitue un repas nutritionnellement complet. La tendance à manger à l’extérieur doit permettre au consommateur de trouver des repas faciles à manger et de composition la plus simple et naturelle possible, idéalement bio. Proposer une recette différente chaque jour peut être un moyen de fidéliser la clientèle. Quant au thé et au café, ces incontournables doivent sans arrêt se renouveler. D’un côté, le café peine encore en France à être consommé comme un moment de dégustation, il reste pris « par habitude » (le matin ou après le déjeuner pour l’effet stimulant). L’enseigne Starbuck a ouvert la voie aux déclinaisons lactées, pour tous les moments de la journée. Pour une offre distinctive, le torréfacteur Dimitri Grodwohl de Oven Heaven (à Bordeaux) conseille : « un café filtre avec du café de variété pour accompagner la viennoiserie le matin, un espresso à la machine automatique avec un blend plus complexe avec une pâtisserie ou pour terminer le déjeuner. Si l’on souhaite se positionner sur une offre étendue (latte, cappuccino), l’expertise d’un barista est nécessaire. Mais l’origine du café est désormais une qualité à mettre en avant. »
Quant au torréfacteur Pierre Guérin (café Piha, Bordeaux), qui accompagne le boulanger Louis Lamour (Bouloulam) pour son offre café, il préconise « une grosse machine automatique équipée d’une cartouche pour filtrer l’eau (très calcaire à Bordeaux) et un blend qui répond au goût français (peu acide et rond). »
Au café Piha, à Bordeaux, le torréfacteur Pierre Guérin s’attache à proposer un café au goût français (peu acide et rond).
Planète et naturalité
Avec la tendance du fait maison qui s’est accrue durant le confi nement (4), les recettes préparées devant le client ou produites localement seront plébiscitées (colas régionaux, limonades artisanales, jus de fruits bio locaux). Autres tendances : les eaux en bouteille en verre ou du robinet. Les fontaines à eau filtrée séduisent car elles répondent à l’enjeu de réduction des emballages et à l’envie de consommer une eau de qualité.
La boulangerie vegan Land & Monkeys (Rodolphe Landemaine, Paris) met à disposition de sa clientèle une fontaine à eau du robinet ainsi qu’une eau parfumée faite maison.
En France, la marque Castalieest devenue la référence pour les restaurateurs engagés et exigeants, désireux de servir une eau de dégustation, fraîche, plate ou gazeuse et à volonté. La marque Brita fournit également les professionnels avec sa gamme Vivreau (comme le modèle ViTap, équipé de touches à effleurement). Les solutions professionnelles Brita permettent de disposer à tout moment et à volonté d’une eau rafraîchissante plate ou gazéifiée, et d’une eau chaude pour préparer les thés et soupes minute.
La start-up Castalie va accélérer sa croissance et lancer une gourde à eau made in France pour les particuliers.
Côté engagement citoyen, les capsules de café ne sont toujours pas idéales pour l’environnement en termes de recyclage. Les experts font un calcul rapide pour démontrer qu’elles ne sont pas économiques non plus : « 1 kilo de café de terroir revient en moyenne à 19 euros, l’usage d’une machine automatique (type Delonghi pour une moyenne de 30 cafés jour) nécessitera 10 g de café par tasse et pourra se vendre à 2 euros. La tasse de café frais revient à 19 centimes, alors qu’une capsule non recyclable contenant 5 g de café revient à 35 centimes la tasse (soit 65 euros le kilo pour un café d’origine inconnue au goût standardisé) », explique Pierre Guérin du Café Piha.
En conclusion, les produits et leur labellisation doivent gagner en transparence face à un consommateur de plus en plus exigeant sur la qualité, précis dans ses attentes (traçabilité et sourcing, positionnement « sans » gluten/ lactose/sucre, etc.) et qui a développé une conscience écologique et anti-gaspillage (y compris pour la livraison). En prévision de la future loi de 2022 sur la réduction d’emballages, la consigne et les recettes maison sont des stratégies à anticiper.
Pour éviter les emballages, Land&Monkeys fait une remise de 10% à ceux qui ramènent leur récipient.
La boulangerie Tatup a opté pour les contenants en verre weck de 33 cl consignés non soumis à la TVA, qui lui reviennent à 90 centimes.
Tendance « nolo »
# Plus qu’une mode, la tendance « nolo » pour « no or low alcool » prend de l’ampleur. En 2018, le secteur des boissons sans alcools a fait un bond de 30,5 %. En 2019, ce sont même les sodas qui voient leurs chiffres en berne (- 3,6 % en GMS selon Nielsen) : les BRSA - boissons rafraîchissantes sans alcool - constituent désormais la catégorie la plus innovante de l’alimentaire avec 7,9 % de l’ensemble des nouveaux produits pour cette année.
