Envie d’une gestion horizontale plutôt que verticale, avec une répartition des responsabilités ? Telle est la motivation première d’une poignée d’artisans qui ont opté pour un statut juridique de société coopérative (voir encadré). Encore marginal dans le métier, par rapport à la classique société à responsabilité limitée (SARL), ce modèle trouve ses racines « dans la crise du pain cher, au milieu du XIXe siècle », indique Hubert Chiron, spécialiste du pain et ingénieur d’études à l’Institut national de la recherche agronomique (Inrae).
Créatrice de Farinez’vous, Domitille Flichy (à gauche) a opté pour une Scic (à capital variable) pour affirmer la dimension non-spéculative et l’utilité sociale de son projet. © B. GUICHETEAU
Gage de motivation
L’idée : une communauté, fédérée autour de valeurs chrétiennes, de convictions politiques ou d'activités agricoles, finance l’installation d’une boulangerie coopérative pour baisser et stabiliser le prix du pain. « Un modèle historique qui a disparu dans le courant du XXe siècle et non-transposable aujourd’hui », observe Hubert Chiron, qui note toutefois un récent retour de la coopérative boulangère dans une quête de sens et un esprit démocratique de gouvernance partagée. « La coopérative ? Un acte militant en alternative au capitalisme, avec des conditions de travail choisies par les travailleurs et des outils qui appartiennent à tous », confirme Maximilien Besson, l’un des quatre associés-salariés de la Scop Les Passants, à Poitiers (Vienne), et qui bénéficient à ce titre de droits élargis.
Un esprit démocratique de gouvernance partagée.
« Même si chacun a ses domaines de compétences, nous avons tous notre mot à dire dans la gestion de l’entreprise », précise l’artisan, qui organise un temps d’échange informel par semaine et une réunion mensuelle pour aborder les sujets de fond. Idem à la boulangerie Le Pain des Cairns à Grenoble, née en 2014 et convertie en Scop deux ans plus tard pour « un projet collectif, gage de motivation », relève Pierre Bedouelle, l’un des cinq associés-salariés actuels, auxquels s’ajoutent six salariés, la prise de participation n’étant pas obligatoire. La clé du succès ? « Une gestion commune mais des rôles-postes (communication, matériel, etc.) définis, où chacun reste souverain » pour éviter d’interroger l’équipe à la moindre question. « Le travail en collectif prend du temps et de l’énergie », reconnaît Domitille Flichy, la fondatrice de Farinez’vous (Paris), créée en SARL puis transformée en Scic pour « partager le pouvoir, les risques et les responsabilités, tout en ouvrant largement le capital afin de développer des projets », confie celle qui est restée directrice. Et de souligner : « Seul on va plus vite, ensemble on va plus loin. »