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Les variétés de blé sont multiples et ne sont pas toutes inscrites au Catalogue officiel. © C. MICHEL
Les variétés de blé sont multiples et ne sont pas toutes inscrites au Catalogue officiel. © C. MICHEL

actus L’épopée des blés

Quelles sont les variétés de blés actuelles ? D’où viennent-elles ? Comment ont-elles évolué ? Et comment s’y retrouver entre les blés durs ou tendres, anciens ou modernes, homologués ou de pays, meuniers ou biscuitiers ? Notions clés.

Le terme « blé » désigne les céréales qui appartiennent au genre Triticum et à la famille des Poacées (anciennement Graminées). Les blés actuels proviendraient d’un premier croisement entre deux Poacées sauvages à 14 chromosomes (un égilope et un triticum ancestral) intervenu il y a 500 000 ans et qui aurait donné naissance à l’amidonnier sauvage (28 chromosomes). Avec sa domestication, cette nouvelle espèce aurait évolué vers la grande famille des Triticum turgidum : les amidonniers, les blés poulards et les blés durs (28 chromosomes).

La seconde hybridation serait intervenue il y a 10 000 ans entre l’amidonnier cultivé et une autre Poacée sauvage (un autre égilope) dont la descendance aurait engendré la famille des Triticum aestivum (42 chromosomes) : les épeautres et les blés tendres.

La conquête du monde

L’origine de toutes ces espèces proviendrait d’une région du Proche-Orient : le fameux Croissant fertile (un arc de cercle qui englobe ce qui est actuellement Israël, la Syrie, le sud de la Turquie, le nord de l’Irak et l’ouest de L’Iran). C’est à partir de cette terre ancestrale que le blé va suivre les déplacements des populations humaines (invasions, migrations, voies commerciales). Sa diversité va alors se séparer en deux grands groupes génétiques : l’un se dissémine en Europe par le Danube, l’autre arrive en Asie par la Route de la soie. Ces deux groupes ne se croiseront plus. Des siècles plus tard, le blé européen embarque sur les navires à la découverte des contrées lointaines (Amérique, Australie).

La biodiversité agronomique explose à la fin du XIXe siècle.

Révolution agro-industrielle

Vers la fin du XIXe siècle, la révolution industrielle fait progresser la génétique des plantes et la sélection variétale. La biodiversité agronomique explose et de nouveaux groupes génétiques voient le jour à partir des blés tendres d’Europe de l’Est et du Sud. Ces groupes génétiques essaiment et deviennent rapidement dominants partout en Occident.

Dans les années 1950 en France, l’interdiction des semences non homologuées fait chuter drastiquement la biodiversité cultivée. Seules les variétés les plus productives, les plus riches en protéines et les plus faciles à panifier (gluten fort) sont retenues. Il faut nourrir la France à grand renfort d’engrais chimiques, de pesticides et d’additifs. La méthode « pain blanc » dopée à l’acide ascorbique fait la fierté des boulangers. Centrés sur des variétés de l’Europe du Nord-Ouest, les sélectionneurs français (mais aussi allemands et britanniques) élaborent dans les années 1970 des variétés musclées dites « modernes » qui évolueront assez peu et qui apparaissent aujourd’hui très différentes du reste du monde. Mais les choses changent : le réchauffement climatique progresse, l’industrie chimique n’a plus la cote dans nos champs et nos assiettes, le gluten fort et le pain blanc sont boudés. Maintenus trop longtemps sous perfusion, les blés modernes ne peuvent plus se passer d’azote et de pesticides. Ils ne sont pas non plus adaptés à la sécheresse et aux canicules. Pour répondre aux nouveaux défis agro-écologiques, il faut retrouver les réservoirs de gènes qui permettaient aux variétés anciennes de nourrir les populations et de résister au manque d’eau. Les blés de pays d’avant 1950 et les variétés asiatiques pourraient bien constituer une réponse.

Comprendre les variétés actuelles

Les variétés modernes

Blés protégés (par un Certificat d’obtention végétale) inscrits au Catalogue officiel français et commercialisés par l’industrie semencière. Certaines variétés sont toutefois sorties du catalogue officiel et ne sont plus cultivées. Ces blés répondent aux critères agronomiques et techniques dominants du marché (agriculteurs, boulangers, consommateurs) et sont cultivés majoritairement en France depuis les années 1970. Une partie croissante des consommateurs leur reprochent de contenir un gluten trop fort (difficile à digérer) et de favoriser un modèle agricole polluant, dépassé et non résilient vis-à-vis du changement climatique.

Les variétés recommandées

Parmi les blés tendres modernes (autorisés et cultivés), certaines sont conseillées par Arvalis pour les agriculteurs ou par l’Association nationale de la meunerie française (ANMF) pour les meuniers. Arvalis distingue les blés panifiables (BP), les blés panifiables supérieurs (BPS) et les blés biscuitiers (BB). L’ANMF établit également sa liste de blés pour la meunerie française (BPMF) pour la boulangerie et la biscuiterie (bio ou conventionnelle). Dans cette liste, les meilleures sont les « variétés recommandées par la meunerie » (VRM). En 2020, la liste de l’ANMF contenait 136 variétés BPMF dont 86 VRM. Les plus cultivées en France en 2020 sont Chevignon (BPS/BPMF), LG Absalon (BP/VRM), KWS Extase (BPS/VRM), RGT Sacramento (BPS/VRM), Rubisco (BP/VRM). (Source : FranceAgriMer.)

Les variétés pures anciennes ou de pays

Blés tombés dans le domaine public (libres) non inscrits au Catalogue officiel qui étaient courants avant 1950, ils sont maintenus dans des banques de semences (Centre de ressources biologiques, Inrae), et certains réseaux tentent de les remettre en culture afin d’identifier des variétés plus écologiques ou plus digestes (gluten faible). Il existe aussi de nouvelles créations paysannes (utilisation en accord avec le réseau). Ex. : Cloche, Concorde, Dattel, Noé, Rouge du Roc, Talisman, Vilmorin 23.

Les variétés populations anciennes ou de pays

Blés non inscrits au Catalogue officiel qui se transmettent via des réseaux associatifs. Ces blés correspondent à un ensemble hétérogène et indéfini de blés anciens ou de pays issus de croisements libres que l’on récolte et qu’on ressème l’année suivante. Il existe d’anciennes variétés populations (libres), des mélanges, des blés poulards et de nouvelles créations paysannes (utilisation en accord avec le réseau). Ex. : Angoulême, Carré de Crète, Chiddam d’automne, Petit rouge du Morvan, Rouge de Bordeaux, Touselle blanche barbue.

Armand Tandeau
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