L e 1er mars 2011, Nicolas Sarkozy, en visite sur le Campus des Métiers et de l'Entreprise à Bobigny (93), a précisé les axes d'une réforme destinée à diminuer le chômage des jeunes. Honneur a été donné aux filières de l'alternance jugées porteuses d'emplois durables, avec en première place l'apprentissage.
Elles se voient renforcées par un nouveau plan de soutien et un apport de 500 millions d'euros. « C'est très simple, regardons l'Allemagne : 2/3 des jeunes y sont formés par l'alternance, contre 1/3 des jeunes en France. La stratégie et l'objectif sont limpides, on va combler notre retard », déclarait le chef de l'Etat.
Parallèlement, le dispositif de sauvetage de l'apprentissage mis en place en 2009 est définitivement arrêté. Les deux mesures phares (le dispositif « zéro charge » et la prime de 1800 euros pour les TPE recrutant un apprenti) ne seront désormais plus reconduites en l'état. Changement de cap donc, avec un désengagement net, à l'heure où le gouvernement racle les fonds de tiroirs.
Bâton ou carotte ?
En réalité, les entreprises seront bel et bien contraintes de porter à elles seules le financement de l'apprentissage grâce à une réforme de la fameuse taxe du même nom, jugée injuste. Le quota obligatoire de 3% d'alternants est relevé à 4%. La Contribution Supplémentaire à l'Apprentissage (CSA), due par les entreprises qui ne remplissent pas ce quota et fixée habituellement à 0,1% de la masse salariale, sera modulée en fonction de l'effort de l'entreprise. Concrètement, les mauvais élèves (embauchant moins de 1% d'alternants) paieront une CSA de 0,2% alors que les plus méritants (qui dépassent le seuil des 4%) s'en verront exonérés et toucheront même une prime de 400 euros par contrat. Un bonus qui ressemble davantage au « bon point » qu'on donnait aux enfants sages plutôt qu'à un véritable coup de pouce ! Avec la réorganisation de la destination des fonds perçus par la taxe d'apprentissage en faveur des filières de formation d'apprentis, il est évident que ce système de bonus malus vise à financer le projet. Nos entreprises artisanales ne sont toutefois pas concernées. Seules celles qui ont plus de 250 salariés sont poussées à participer à cette « mission d'intérêt général ».
Ceinture
Concernant les PME et TPE de moins de 250 salariés, l'exonération totale des charges sociales sur les contrats d'apprentissage (« zéro charge ») ne sera désormais appliquée que sur les six premiers mois. Elle sera déduite du montant total des cotisations dues par l'employeur à compter du 1er mars 2011, sans que celui-ci n'ait à faire de démarche.
La prime de 1800 euros est par contre définitivement enterrée.
Les 500 millions d'euros sont destinés à rénover en profondeur l'appareil de formation en CFA pour accroître son potentiel d'accueil (places et hébergements) et étendre son offre vers les métiers porteurs. L'apprenti pourra aussi jouir des mêmes facilités que celles octroyées aux étudiants des filières dites supérieures. Avec ce lot de mesures, le Président de la République compte passer de 600 000 à 800 000 jeunes en alternance dans les trois ans à venir. « Il faut engager une révolution culturelle pour changer l'image de l'apprentissage auprès des jeunes et des parents », avait précédemment déclaré Nadine Morano, ministre chargée de l'Apprentissage et de la Formation Professionnelle.
À défaut de prendre à la racine le problème de la désaffection des filières manuelles, il est peu probable que la révolution attendue se produise, même si, au fond, la valorisation du métier auprès des jeunes, c'est à nous de la porter.
par Armand Tandeau (publié le 1er avril 2011)