Sur une tablette de chocolat, en moyenne, seul 7%[1] revient aux producteur.rice.s. Ils vivent majoritairement sous le seuil de pauvreté et doivent toujours faire face aux enjeux du travail des enfants et de la déforestation. Malgré son poids important dans l’industrie agroalimentaire, la filière du cacao n’est pas durable, ni pour les producteur.rice.s, ni pour l’environnement.
Fait nouveau cette année : tous les acteurs français (entreprises, négociants, administrations, chercheurs, ONG…) ont pris ensemble des engagements forts afin de changer les choses. Choisir du chocolat équitable à Pâques sera donc un geste cohérent et porteur de durabilité, d’autant plus que la guerre en Ukraine risque de faire baisser la consommation et donc les prix du cacao pour les producteurs, dans un contexte d’inflation généralisée.
La consommation de chocolat n’a pas connu la crise du Covid, mais la guerre en Ukraine pourrait la fragiliser.
La crise, malgré les confinements, a profité à la consommation de chocolat, portée par le télétravail, le fait maison, etc... En France, les ventes de produits chocolatés dans les enseignes de la grande distribution ont représenté 354 935 tonnes de chocolat en 2020, soit une augmentation de 2,3 points par rapport à 2019[2].
La tendance pour 2021 devrait se confirmer. En Europe, en 2021, 1,46 million de tonnes de cacao ont été transformées, soit une augmentation de 6,1%, la plus importante enregistrée despuis 1999. Cependant, l’année 2022 démarre avec des incertidudes. Selon l’Organisation internationale du cacao (ICCO)[3] on peut s’attendre à une baisse de la consommation liée également à la baisse du pouvoir d’achat et à la hausse des prix de l’énergie. Du côté des producteurs, cela pourrait se traduire en augmentation des coûts de production.
Le marché du chocolat équitable a connu une belle croissance de + 23 % entre 2019 et 2020 en France (en volume), tout comme en Belgique ou en Allemagne (16% de part de marché atteint Outre-Rhin). En moyenne, sur les 7kg consommés par an par Français, 330 grammes sont équitables, soit environ 4,7% :
• En 2020, 14 300 tonnes de cacao vendues aux conditions Fairtrade/Max Havelaar sur le marché français dont 23% sont également issues de l’agriculture biologique.
• 1 890 références en France portent le label Fairtrade/Max Havelaar, vendues par 96 entreprises engagées.
• Ces ventes ont généré 2,4 millions d’euros de prime de développement pour financer des projets collectifs au sein des coopératives de producteur.rice.s de cacao.
« La hausse de la consommation de chocolat pourrait être une bonne nouvelle. Mais actuellement elle n’implique ni meilleurs revenus pour les producteur.rice.s de cacao, ni absence de travail des enfants ou de déforestation. Et l’année 2021 a été marquée par une inflation généralisée, une augmentation des coûts de transport et de tous les coûts de production sans que les prix payés aux producteur.rice.s n’augmentent … cherchez l’erreur ! La guerre en Ubkraine pourrait accentuer cette situation ! Le commerce équitable montre encore et toujours sa pertinence ». Blaise Desbordes, directeur général, Max Havelaar France
En Côte d’Ivoire, par exemple, pour la récolte 2021-2022, les producteur.rice.s du commerce équitable Fairtrade/Max Havelaar reçoivent 120 $/tonne supplémentaires par rapport aux prix de référence pratiqués.
Une filière dominée par de fortes disparités dans la chaîne de valeur
Le secteur du chocolat est contrôlé par une dizaine de multinationales, qui dominent la transformation des fèves de cacao et la fabrication de chocolat. À l’autre bout de la chaîne, près de 6 millions de producteur.rice.s de cacao font face à une pauvreté endémique et n’ont pas de pouvoir de négociation.
La déforestation[4], le travail des enfants[5], les inégalités de genre s’ajoutent aux défis auxquels ils doivent faire face. Les conséquences du changement climatique (réduction de la fertilité des sols, sécheresse, inondations) rendent encore plus précaire leur condition de vie.
Afin de répondre aux enjeux, en France, les principaux acteurs du secteur, dont Max Havelar France, ont signé en octobre 2021 l’Initiative française pour un cacao durable (cf. article). État, distributeurs, industriels, chercheurs et ONG ont pris des engagements pour atteindre des objectifs de durabilité économiques, sociaux et environnementaux.
« Il s’agit aujourd’hui d’enclencher un changement systémique en portant des engagements ensemble, société civile et entreprise, et d’abord pour relever le revenu des producteur.rice.s scandaleusement bas, divisé par 2 en 20 ans ! La priorité c’est de réduire la pauvreté, elle est la cause profonde du travail des enfants, et de la déforestation. En tant qu’ONG signataire de l’Initiative, nous serons particulièrement vigilants à la concrétisation de ces engagements ». Blaise Desbordes, directeur général, Max Havelaar France.
L’initiative Française pour un cacao durable : un engagement fort
A l’occasion de la Journée Mondiale du Cacao 2021, une étape décisive est franchie avec la signature de l’Initiative Française pour un Cacao Durable qui rassemble l’Etat (Ministère de la transition écologique, Ministère des Affaires étrangères, Ministère de l’Agriculture), la plupart des entreprises du secteur, des enseignes de distribution, des centres de recherche et plusieurs organisations non gouvernementales, dont Max Havelaar France. Les engagements sont à la fois sociaux, économiques et environnementaux :
• Améliorer le revenu des cacaoculteurs et de leurs familles, afin qu’ils puissent atteindre un revenu décent (au sens du « Living Income Community of Practice ») au plus tard d’ici à 2030, en collaboration avec les pays producteur.rice.s;
• Mettre fin, avec l’ensemble des parties prenantes, au plus tard d’ici 2025, aux approvisionnements de l’industrie française du cacao, et ceux de ses partenaires, issus de zones déforestées après le 1er janvier 2020, lutter contre la dégradation des forêts et préserver les massifs forestiers et les zones à forte valeur environnementale demeurant;
• Prendre les mesures nécessaires pour lutter et marquer des progrès contre le travail forcé et le travail des enfants, tel que défini par les Conventions de l’OIT, dans les régions productrices de cacao d’ici à 2025, dans le cadre de la mise en œuvre de l’Objectif de développement durable (ODD) des Nations Unies 8.7 (mettre fin au travail des enfants, au travail forcé, à l’esclavage moderne et à la traite des êtres humains), tout en contribuant à favoriser les droits des enfants et leur accès à l’éducation. Ils contribueront également à l’émancipation des femmes au sein de la filière cacao.
Pour en savoir plus : https://www.ecologie.gouv.fr/initiative-francaise-cacao-durable
[1] Étude comparative de la répartition de la valeur au sein des filières européennes de cacao-chocolat, publié par la FAO et Le Basic en juin 2020.
[2] Syndicat du Chocolat – Les chiffres clé du secteur.
[3] Cocoa Market Report for February 2022.
[4] La Côte d’Ivoire a perdu 80% de ses forêts depuis les 50 dernières années dont ¼ de ces surfaces sont attribuées à la filière cacao. Commodafrica, février 2018.
[5] On estime que 1,6 millions d’enfants travaillent dans les plantations de cacao au Ghana et en Côte d’Ivoire. NORC, 2020.
À propos de l’association Max Havelaar France
L’ONG Max Havelaar France, membre fondateur du mouvement international Fairtrade/Max Havelaar, agit pour un commerce équitable, respectueux des droits humains et de l’environnement. Avec le label Fairtrade/Max Havelaar, elle mobilise les entreprises, les consommateurs et les pouvoirs publics afin de transformer les pratiques et de soutenir les producteur.rice.s et travailleur.se.s défavorisés. Elle sensibilise l’opinion publique et milite en faveur d’une économie mondiale éthique et responsable.
Plus d’informations sur www.maxhavelaarfrance.org