Cher monsieur, De longue date, la jurisprudence de la Cour de cassation estime que l’absence injustifiée et de manière prolongée d’un salarié ne peut être considérée comme une manifestation claire et non équivoque de sa part de rompre le contrat assimilable à une démission (chambre sociale, 24 janvier 1996, 92-43.868 ou 30 avril 2002, n° 00- 42952). Cela obligeait l’employeur à licencier le salarié en abandon de poste pour faute grave.
La loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein-emploi du 21 décembre 2022 a introduit une présomption de démission en cas d’abandon de poste.
L’article L1237-1-1 du Code du travail dispose que le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste est présumé avoir démissionné.
Le décret d’application, publié au Journal Officiel le 18 avril 2023, fixe les modalités d’application de ce nouveau dispositif.
À quoi dois-je veiller pour respecter la procédure de mise en demeure ?
Vous ne pouvez rompre le contrat de travail de votre salarié sans l’avoir d’abord mis en demeure par lettre recommandée de justifier son absence et de reprendre son poste. Avant cela, un délai de quarante-huit heures minimum doit lui être laissé pour justifier par lui-même son absence (il peut en effet avoir subi un accident l’empêchant de vous prévenir, par exemple).
Au sein de la mise en demeure, vous devez :
- préciser le délai dans lequel votre salarié doit reprendre son poste, que vous êtes libre de fixer mais qui ne peut être inférieur à quinze jours calendaires (week-end et jours fériés compris) à compter de la date de notification de la mise en demeure ;
- demander au salarié la raison de son absence afin d’en recueillir la justification ;
- rappeler au salarié que s’il ne reprend pas son poste dans le délai fixé, il sera présumé démissionnaire. Il est possible également de lui préciser les conséquences qui en découlent, notamment l’absence de droits aux allocations de l’assurance chômage. À l’issue du temps imparti, si votre salarié refuse de reprendre son poste, ou ne répond pas malgré la mise en demeure, il est considéré comme démissionnaire et doit alors respecter un préavis prévu par le contrat de travail ou, à défaut, par la convention collective.
Il pourra être décidé d’un commun accord de ne pas l’exécuter. Le salarié ne sera, dans ce cas, pas rémunéré.
Une fois le délai achevé, le contrat est rompu immédiatement et vous devrez remettre au salarié les documents de fin de contrat (certificat de travail, attestation Pôle emploi, reçu pour solde de tout compte).
Le salarié a-t-il invoqué un motif légitime pour justifier son absence ?
La demande de justifier la raison de l’absence du salarié est fondamentale, puisque l’article R1237-13 du Code du travail permet au salarié d’écarter la présomption de démission si ce dernier invoque un motif légitime. La présomption de démission ne peut pas être invoquée pour un abandon dans les cas suivants :
- raisons médicales ;
- exercice du droit de retrait ou du droit de grève ;
- refus du salarié d’exécuter une instruction contraire à une réglementation ;
- modification du contrat de travail à l’initiative de l’employeur.
En résumé
Veillez à réagir rapidement en cas d’abandon de poste, les délais commençant à courir à réception de votre lettre de mise en demeure, en veillant à laisser le temps au salarié de justifier son absence avant l’envoi de la lettre. Par ailleurs, il est indispensable de prêter une attention particulière aux motifs qui pourraient être invoqués par votre salarié. Nous vous recommandons de contacter votre avocat avant d’engager la procédure.