En 2019, Yvan Chevalier décroche le titre de MOF chocolatier-confiseur, du premier coup. Un coup de maître donc, qui ne lui donne pas la grosse tête mais l’impulsion pour quitter le laboratoire de Vincent Guerlais, son maître d’apprentissage puis patron à Nantes, afin de créer son entreprise. Cap sur sa Bretagne natale et sa capitale, Rennes, où il ouvre une boutique à son nom en septembre 2021, dans le quartier des métiers de bouche, près du centre-ville et des halles. L’environnement est concurrentiel mais cela n’effraie pas le jeune trentenaire ; au contraire, il y voit une source d’émulation créative : « C’est là que tout se passe », sourit le Breton, lauréat de plusieurs concours (dont le trophée Pascal Caffet et la sélection France des World Chocolate Masters) et rôdé aux challenges.
Ce goût de l’effort et du dépassement de soi, qu’il retrouve dans le sport, le porte dès sa scolarité. Entré en boulangerie-pâtisserie par vocation, il enchaîne les diplômes : CAP-BEP, puis Mention complémentaire et BTM en pâtisserie. En fin de formation, Vincent Guerlais lui confie la responsabilité de sa chocolaterie tout en l’accompagnant dans son évolution et dans la préparation des concours, jusqu’à son émancipation en 2021. Ses années passées à Nantes lui permettent d’approfondir sa connaissance du chocolat, sa matière de prédilection ; et son approche du management et de la transmission, avec jusqu’à onze personnes à encadrer. Juste renvoi d’ascenseur : une fois installé, Yvan Chevalier a pris le fils de Vincent Guerlais en apprentissage. Autre preuve de son goût pour le compagnonnage : il a confié la création de son logo (ses initiales entrelacées) à la femme d’Étienne Leroy, un artisan de sa génération sacré champion du monde de pâtisserie en 2017.

Des pâtisseries fraîches
À Rennes, il fait appel à sa famille et à son réseau d’artisans locaux pour transformer un ancien magasin de vêtements en un lieu à son goût : accessible et chaleureux, design mais pas tape-à-l’œil, avec une façade blanche et grise évoquant la pierre bretonne et, à l’intérieur, du blanc (murs, meubles) et du bois (sol, étagères). « On souhaitait que les gens n’hésitent pas à pousser la porte et se sentent bien une fois entrés », relève l’artisan, qui aime échanger avec ses clients en boutique. « Mon objectif est de fabriquer des produits pas que pour moi, avant tout pour les autres. » En parallèle, il aménage son laboratoire dans une ancienne biscuiterie située à 15 minutes du magasin : un local confortable de 150 m2 qui n’est pas de trop pour produire l’ensemble de sa gamme.

Car, à l’instar de Vincent Guerlais, Yvan Chevalier est un pâtissier-chocolatier touche-à-tout mais pas n’importe comment, expertise oblige. Classique à première vue, sa collection de dix ou douze desserts saisonniers se démarque par ses textures, plus travaillées, ou par ses matières premières de qualité. Exemple avec le praliné, à la fois fondant et avec du grain, « foisonné pour le texturer, comme le veut la méthode ancestrale », précise le MOF. Il décline sa recette de la classique noisette (du Piémont) aux plus originaux praliné à la vanille (de Madagascar ou de Tahiti) grillée (deux heures au four), praliné au maïs (inspiré par un séjour à Barcelone [Espagne]) ou praliné au sarrasin bio breton, l’un de ses ingrédients fétiches. On retrouve ce dernier en bonbon, en tablette et au cœur de son entremets signature, le Breizh, une irrésistible association de croustillant et de mousse infusée au sarrasin, de caramel tendre beurre salé, de mousseux caramel et de graines de sarrasin toastées. Dans sa collection, très peu de desserts glacés, mais une majorité d’entremets frais, « illustrations du savoir-faire artisanal », estime cet adepte du désucré et des goûts francs, comme en témoignent ses pâtisseries Intense vanille ou chok(olat).

Chocolat origine Sao Tomé
Côté chocolat justement, il apprécie les origines Sao Tomé, « douce et florale », et Pérou, « pour son goût originel de cacao », qu’il travaille notamment en ganache dans ses bonbons, « à 80% plutôt classiques pour ne pas me perdre », observe-t-il. Là encore, la qualité prime avec la recherche des meilleurs fournisseurs. Parmi ses récents coups de cœur : le chocolatier-torréfacteur Nicolas Berger (lire LT n°340) ou le couverturier suisse Felchlin, pour des saveurs affirmées. ?

À l’heure du goûter
En boutique, Yvan Chevalier propose un large choix de tablettes (fourrées caramel beurre-salé, praliné-crêpes dentelle-fleur de sel de Guérande, gianduja, etc.), de douceurs à tartiner, de gourmandises en picking (florentins, oursons guimauves, rochers, sablés enrobés, barres chocolatées) et de gâteaux de voyage. « J’ai toujours aimé l’univers du goûter », sourit le jeune MOF. Son approche ludique s’exprime aussi à travers ses moulages ou ses pièces artistiques, tout au long de l’année. Autant de produits valorisés en vitrine et sur les réseaux sociaux qui esquissent un univers faisant la part belle à l’enfance, à l’imaginaire et à l’excellence artisanale.

Repères
Superficie : espace de vente : 70 m2 ; laboratoire : 250 m2
Taille de l’équipe : 15 personnes
Gamme : env. 10-12 pâtisseries et 30 bonbons au chocolat.
