Enthousiaste quadra récemment reconvertie dans la pâtisserie, Régina Fina se fait remarquer en Provence. Sa pâtisserie fine est très travaillée, autant sur les plans gustatif que visuel, ce qui implique un travail sans relâche. Et tant mieux, car elle aime ça.
Après son bac et une licence en histoire de l’art, Régina Fina a suivi un cursus en animation 3D et effets spéciaux à l’école ARTFx de Montpellier. Le début de sa carrière s’est déroulé dans des pays anglophones — en Australie, au Canada (Québec), en Nouvelle-Zélande —, où la jeunefemme d’alors était infographe 3D dans des studios produisant des films d’animation. On retrouve dans ses desserts le sens du perfectionnement inhérent à ce métier très exigeant. Elle aurait dû intégrer un important studio de Montréal (Québec), quand la pandémie de covid-19 a changé le cours de son histoire...

« Comme mes parents, j’ai toujours aimé cuisiner et innover. Au Québec, la tradition anglo-saxonne des salons de thé est encore très présente. On s’y retrouve après le travail pour un moment convivial et jovial entre collègues, et le dimanche on y prend des brunchs qui durent jusqu’à 16 heures. J’ai eu envie d’ouvrir en France un lieu dans cet esprit, avec une décoration artistique », raconte Régina Fina.
Sa famille soutient son projet. Le diplôme nécessaire est un CAP pâtisserie, qu’elle décide de passer dans l’école d’excellence d’Alain Ducasse, l’École nationale supérieure de pâtisserie d’Yssingeaux (Haute-Loire), une référence dans le monde des arts sucrés.
Au labo sans relâche
« Nous avons eu comme intervenants les meilleurs chefs pâtissiers, dont des Meilleurs ouvriers de France. Si l’on était attentif, on pouvait apprendre beaucoup », dit-elle. Cette bonne élève a fait en huit mois de formation accélérée un très bon travail. « Après les cours et la sieste, je m’exerçais. Et ma logeuse testait ! » Sortie du lot, Régina Fina est major de la promotion 2021-2022. « Je suis toujours en contact avec le responsable pédagogique, le chef Ludovic Puissochet, qui m’a conseillée sur le choix du matériel dans lequel investir pour mon labo pâtissier d’Éguilles [Bouches-du-Rhône]. »
À l’entrée d’une vaste pièce coule du chocolat dans une tempéreuse. Une grande fenêtre apporte de la lumière naturelle sur le plan de travail. Le projet d’un salon de thé a évolué. Après une étude de marché, Régina Fina renonce à créer son entreprise à Nîmes et préfère se rapprocher d’Aix-en-Provence, où elle peut toucher une clientèle CSP +. Avant de s’installer, elle fait le tour des pâtisseries alentour avec des amies pâtissières titulaires d’un brevet de maîtrise ou d’une mention complémentaire. Elles testent et notent les goûts, la sucrosité, l’originalité, la diversité, et scrutent les prix ainsi que les commentaires Google.
Sourcer avec précision
Fin 2024, sa boutique en ligne sur commande click and collect est lancée. Régina Fina propose une pâtisserie fine artistique, désucrée et personnalisable. « Je réduis la quantité de sucre des recettes que j’ai apprises à l’école d’Alain Ducasse, explique-t-elle. Ma tarte au citron, par exemple, a quarante-trois pour cent de sucre en moins. Par contre, j’ai renoncé à une gamme sans sucre blanc. » Pour embellir les goûts, qu’ils soient bien présents, la pâtissière s’inspire des chefs renommés. Elle source des produits de haute qualité, qu’elle travaille avec une grande précision.

Dans son réfrigérateur, les gousses de vanille de Madagascar — ou d’ailleurs — infusent trois jours dans le lait. Ici, la crème pâtissière est maison ! Au frais également, des dizaines de récipients étiquetés du nom des préparations qu’ils contiennent. Le congélateur est du même acabit, avec des flacons contenant les zestes de différents agrumes. Elle a choisi chez certains producteurs des variétés de citron, de pamplemousse et d’orange ; et chez d’autres, le calamansi des Philippines ou encore le chinotto, un hybride mandarine-orange. Sur l’étagère de sa réserve, les noisettes viennent du Piémont, les amandes de Provence et les pistaches de Bronte. Les pistoles de chocolat d’un torréfacteur local contiennent 60, 70 ou 80 % de cacao. « Cela me permet de personnaliser le dessert en fonction des préférences des clients. » Idem pour les thés à infuser, les vanilles et les poivres — plus ou moins rares — qu’elle travaille.
Le pur plaisir de décorer
Chez Régina Fina, l’art pâtissier est visuellement spectaculaire, avec des cercles, des arabesques, des feuillages et des papillons en chocolat dorés à la poudre de feuilles d’or broyées. Elle a un immense plaisir à créer elle-même ses décorations sophistiquées. Afin de retranscrire en fil de chocolat une image, elle la dessine sur film rhodoïd.

Depuis l’enfance, le dessin est l’un de ses modes d’expression favoris. « J’ai beaucoup copié, jusqu’à ce que ma professeure d’art, Marie-Claude Delcourt, m’aide à trouver ma patte. Aujourd’hui, je suis toujours en contact avec elle, livre Régina avec beaucoup de gratitude. Quand je suis en panne d’inspiration sur un décor, Marie-Claude prend le temps de me suggérer tel ou tel courant artistique. »
Parfois, pour l’anniversaire d’un enfant, sa clientèle particulière d’Aix-en-Provence, Éguilles et Velaux (Bouches-du-Rhône) réclame un ballon de football sur le gâteau… La professionnelle fait au mieux pour satisfaire la demande sans verser dans trop de réalisme. Un traiteur propose aux futurs mariés ses créations, choux et mignardises, qu’elle prend patience à réaliser en grand nombre. Expérimenter et mettre au point des nouveautés demeurent ses leitmotivs.