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François-Xavier Delemotte pratique dans son nouveau metier le management participatif, la responsabilisation de chacun des salaries.
François-Xavier Delemotte pratique dans son nouveau metier le management participatif, la responsabilisation de chacun des salaries. ©Alexie VALOIS

Chez Aristide, la boulange en musique

Organiser le travail autrement, se démarquer tout en régalant ses clients, tels sont les objectifs d’Aristide, une boulangerie d’Annecy animée par des boulangers en reconversion.

Le lieu est habité : la voix profonde de Johnny Cash sort de l’enceinte Bluetooth posée en hauteur, entre le fournil et l’espace de vente. « Aucun de nous ne pourrait travailler sans musique », explique François-­Xavier Delemotte, le fondateur de la boulangerie Aristide à Annecy (Haute-Savoie). Nous, ce sont six boulangers – Françoi­s, Élodi­e, Kirsty, Océane, Antoine, François-­Xavier –, plus Maxime, l’apprent­i, « qui appren­d vite » ; et Laurian­e, à la vente le samed­i matin. Ils ont entre 30 et 48 ans et l’univers du pain est une nouvelle étape de leur vie professionnelle.

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L’équipe de la boulangerie Aristide comprend six boulangers et un apprenti, tous en reconversion et tous tres impliqués. Photos : A. Valois

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Pour préserver la qualité de vie des boulangers, le fournil-boutique ouvre à 10 heures. Il est fermé le dimanche et le lundi.

Les clients qui entrent profitent aussi de la playlist. Ils peuvent percevoir la compli­cité et la bonne ambi­ance qui règnent. En achetan­t leur pain, ils observent Océane déposer ses méteils sur le tapis et les enfourner ; ils peuvent aussi voir Maxime préparer les pesées ; Élodie effectuer les derniers rabats ; ou encore suivre du regard François, qui divise et met des pâtons en bannetons.

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Les boulangers passent aisément de la production à la vente, ils tournent à chaque poste.

Pas de séparatif, les tours se trouvent au cœur du local, juste derrière les vitrines garnies de pains. « Nous n’avons rien à cacher. Tout est là, devant les clients. Ils nous voient travailler et savent que tout est fait par nous, expli­que François-­Xavier Delemot­te.Supprimer cette barrière entre l’espace de vente et celui de production permet à la clientèle de se sentir incluse. »

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François-Xavier Delemotte pratique dans son nouveau métier le management participatif, la responsabilisation de chacun des salariés.

Boulangers polyvalents

Le local carré, très ergo­nomique, est aussi conçu pour le partage des tâches : « Nous sommes tous au pétrin, en cuisso­n et à la vente. J’ai proposé à mon équipe que tout le monde touche à tout, et nous partageons cette vision. » De façon très fluide, en effet, Antoine passe côté caisse pour servir une cliente puis retourne aider aux pesées ; Kirsty recharge la vitrine, sert un client et revient vers les tours. Il semble que chacun sache quelle est sa place, mais que celle-ci change tout le temps…

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L’absence de séparatif entre l’espace de production et celui de vente crée une proximité entre la clientèle et les boulangers.

François-Xavier a recruté autant de boulangères que de boulangers, avec beaucoup d’autonomie et une réelle maturité. « Ils sont tous impliqués, ils font partie du succès de l’entreprise », poursuit cet adepte d’un management participatif. « L’objectif n’est pas d’imposer mais de décider beaucoup de choses ensemble, pour que chacune et chacun se sente responsable. Le facteur plaisir est important. Il faut que le quotidien soit agréable, c’est ce qui fait qu’on se lève le matin avec envie. »

Se sentir utile

Originaire du Nord, François-­Xavier Delemotte a vécu quinze ans au Canada. De retour en France en 2015, il travaille chez un fabricant de matériel d’alpinisme dans la vallée de Chamonix. Puis il éprouve le besoin de se sentir utile, de faire sa part pour améliorer l’alimentation. Il souhaite revenir à une relation simple, directe et quotidienne avec ses clients. Le métier de boulanger l’intéresse mais la pénibilité le freine. Jusqu’à ce qu’il se renseigne au sujet de l’École internationale de boulangerie de Noyers-sur-Jabron (Alpes-de-Haute-Provence). « J’ai suivi une semaine d’initiatio­n et j’ai vu la lumière… J’ai eu envie de mettre en valeur ce produit au cœur de nos vies. Cela me surprend toujours d’éprouver autant de plaisir avec un aliment si simple. J’ai donc suivi la formation complète. »

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Sur levain de seigle, le pain bio. L’Aristide contient blé T65, blé T110 et seigle T170, sel de camargue et eau filtrée.

Pains bio et lumière naturelle

Les pains de la boulangerie Aristide sont 100 % bio (farines Moulin Marion) et au levain naturel. « Ici, pas de baguettes, de viennoiseries ou de pâtisseries, pas de frigo avec des sodas. Nous vendons des pains, des biscuits, des focaccias », précise le boulanger, qui ouvre à 10 heures du matin (!) et pas tous les jours… Sa boulangerie atypique est en effet fermée le dimanche et le lundi.

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Sur levain de seigle, le pain bio. L’Aristide contient blé T65, blé T110 et seigle T170, sel de camargue et eau filtrée.

Brownie gourmand à la coupe, riche en cacao et noisettes grillées.

Derrière de grandes vitres expo­sées plein sud, le loca­l en angle est baign­é de lumière naturelle. François-­Xavier l’a déniché en octobre 2020, au bord du Thiou, le déversoir du lac d’Annecy. « Nous sommes rue de la gare, au centre-ville mais pas dans la partie piétonne. Des places d’arrêt minute permet­tent de garer sa voiture et bien sûr son vélo. Dans cette rue passante plusieurs commerces de bouche coexistent, un restaurant, une boucherie et une nouvelle fromagerie. »

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Dans le centre-ville d’Annecy, le local aux grandes baies vitrées est très bien situé.

Le goût en héritage

Aristide, son grand-père né en 1900, était lui aussi commerçant. « Je l’ai connu octogénaire. Il nous faisait des gâteaux et m’a donné le gout des bonnes choses. » François-Xavier Delemotte se délecte donc quand une cliente lui dit : « Avant, j’achetais du pain pour accompagner mon fromage, maintenant je choisis des fromages pour aller avec votre pain ! » 

L’an dernier, la boulangerie a eu les honneurs du journal de 20 heures sur TF1, intéressé par les profils atypiques des boulangers, tous en reconversion professionnelle. « Après la diffusion du reportage, nous avons vu la clientèle augmenter soudainement. »

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