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Selon la légende, la madeleine de Commercy est née au XVIIIe siècle..
Selon la légende, la madeleine de Commercy est née au XVIIIe siècle.. © D. PÉRONNE

Le bon goût d’antan, un produit d’appel

Les calissons d’Aix, le kouign-amann en Bretagne, les madeleines de Commercy, les bredele et manele en Alsace... : les produits traditionnels, issus de savoir-faire locaux et qui racontent une histoire ont la cote depuis plusieurs années en boulangerie et, surtout, en pâtisserie. Une tendance de fond, en réaction à la standardisation des fabrications.

DEMANDE

La vague du tradi-nostalgie

L’engouement des consommateurs pour des produits traditionnels est né en même temps que la mode du vintage, les disques vinyles, les voitures anciennes, les friperies,… « Il y a une réelle appétence pour ces “madeleines de Proust”, explique Pascal Lardellier, professeur de sociologie à l’Université de Bourgogne*. Leur succès est lié à un sentiment de nostalgie vis-à-vis de l’enfance — de la jeunesse pour ceux nés dans les années 1960 et 1970. Chez les plus jeunes, il correspond à une réaction contre la standardisation et ce que j’appelle l’ubérisation, voire l’“amazonisation” de l’offre. Les consommateurs sont prêts à payer plus cher des produits originaux, les jugeant de meilleure qualité que les produits industriels. Cette tendance est aussi liée à la volonté de valoriser le patrimoine culinaire français, de soutenir l’économie locale, et d’obtenir plus de transparence au sujet de la composition des produits. »

CONTES ET LÉGENDES

Un supplément d’âme

Ces gâteaux, desserts au parfum d’antan ont souvent une histoire, que les clients sont avides de connaître car elle vaut pour eux certificat d’authenticité. La tarte Tatin serait née par accident dans un hôtel français au XIXe siècle. Les sœurs Tatin auraient renversé une tarte aux pommes et, pour sauver leur dessert, auraient ajouté une pâte par-dessus et fait recuire le tout. La madeleine de Commercy, elle, est née au XVIIIe siècle, quand le pâtissier en chef du dernier roi de Lorraine est tombé malade. Il aurait demandé alors à l’une des servantes de le remplacer. La jeune fille, prénommée Madeleine, confectionne alors un gâteau dont la recette lui vient de sa grand-mère, originaire de Commercy. « La petite histoire dans la grande donne à ces produits un supplément d’âme », souligne Pascal Lardellier.

RECETTES

Retrouver des saveurs, des arômes

Pour s’assurer de la confection d’un produit typique, il faut bien souvent aller chercher dans les cahiers de recettes d’une grand-mère, les archives de la boutique, les anciens livres de cuisine. C’est le cas du gâteau du Poilu, que deux jeunes pâtissiers de Verdun ont remis au goût du jour en hommage aux soldats de la Grande Guerre. Certains artisans regrettent d’ailleurs la disparition de matériaux comme le fer-blanc au profit du polycarbonate, les moules en fer-blanc étant gages d’une cuisson — donc d’une consistance et d’une saveur — inégalée. Il est parfois difficile de retrouver les qualités organoleptiques d’un gâteau d’autrefois, tant les ustensiles, les modes de cuisson même ont changé.

Les livres de recettes de grand-mères peuvent être utiles en vue de fabriquer un produit typique (© D. PÉRONNE)

EMBALLAGES

Privilégier les matériaux bruts

Éviter le papier, le carton, l’aluminium et surtout le plastique. Pour être en adéquation avec le contenu, le contenant se doit d’être en matériaux “nobles” : bois, verre, grès, corbeille en osier, belle boîte métallique décorée. En Normandie, il serait inconcevable de présenter la teurgoule — cette spécialité de riz au lait parfumée à la cannelle cuite longuement au four — autrement que dans une terrine en terre cuite. Le coût de revient final s’en trouve majoré, mais cela fait partie du packaging et le client est prêt à débourser davantage pour que le tout soit bon et beau. Surtout s’il peut conserver de jolis coffret ou boîte, ce à quoi sont aussi sensibles les plus soucieux de réduire leur empreinte carbone.

En Normandie, il serait inconcevable de présenter la teurgoule spécialité de riz au lait parfumée à la cannelle cuite longuement au four, autrement que dans une terrine en terre cuite. (© D. PÉRONNE)

JURIDIQUE

Les contrefaçons en embuscade

Attention aux légendes inventées pour mieux vendre. Les férus d’histoire, les curieux, les détenteurs d’appellations et de noms déposés veillent au grain. À Nancy, une confiserie a été condamnée le 10 novembre dernier à indemniser la Maison des Sœurs Macarons pour, comme le précise la publication judiciaire, « avoir tenté de s’approprier son histoire à travers la communication qu’elle a menée sur son site internet et dans un musée créé à cette fin dans l’ancien local historique des Sœurs Macarons, commettant ainsi une contrefaçon de marque et une concurrence déloyale. » À Nancy toujours, François Adam est le seul détenteur de la marque lui permettant de fabriquer le Saint-Epvre, un gâteau très prisé localement. Depuis quarante ans, il a déposé cent quatre-vingts signalements pour contrefaçon.

* Dernier ouvrage paru : Éloge de ce qui nous lie. L’étonnante modernité des rites. Éditions de L’Aube, 2023.

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