Bertrand Girardeau, dirigeant de la Minoterie Girardeau, et des Moulins Associés, rappelle leurs engagements historiques en faveur des filières durables, et annonce de nouvelles ambitions en la matière, engageant davantage l’entreprise dans la transition agroécologique.

La Toque magazine : Depuis les années 1980, vous avez participé activement à la mise en place de nombreuses filières durables. Pouvez-vous revenir sur ces engagements ?
Bertrand Girardeau : Nos premiers pas dans l’agriculture biologique remontent à 1979. À cette époque, nous faisions partie des entreprises pionnières de la bio en France, à l’heure où la consommation de produits biologiques était marginale et perçue comme farfelue. Le bio a depuis connu une très forte croissance et s’est taillé une part non négligeable du marché alimentaire. De notre côté, avec la Minoterie Suire, nous nous sommes très tôt distingués par nos farines de meules. Notre moulin écrase encore à l’ancienne, avec des meules de pierre de silex. Dès 1989, nous avons été aussi très impliqués dans la création de la filière Culture Raisonnée Contrôlée (CRC). Ce cahier des charges rencontre un grand succès dans le domaine des céréales et n’a cessé de progresser sur le volet environnemental (origine française des blés, interdiction des insecticides de stockage, réduction des produits phytosanitaires en champs…) et même économique (juste rémunération des agriculteurs). Il fait aussi partie des modèles les plus crédibles en France, sur cette fameuse troisième voie entre le bio et le conventionnel. N’oublions pas le label Agri-Éthique, lancé en 2013 avec plusieurs meuniers et coopératives du Grand Ouest. Mis en place à l’origine pour sécuriser les exploitations agricoles (face aux aléas des cours boursiers), le label est devenu un modèle du commerce équitable Nord-Nord et un levier pour sortir de la dépendance aux marchés boursiers dans de nombreuses filières végétales et même animales. Agri-Éthique vient le plus souvent consolider les cahiers des charges responsables (Agriculture Biologique, CRC, Label Rouge…) en garantissant un prix équitable aux producteurs sur trois ans.
LTM : Votre minoterie vient de signer une convention avec l’association Pour une Agriculture du vivant. Pour quelle raison ?
B.G. : Le réchauffement climatique, les déficits hydriques, l’effondrement de la biodiversité nous poussent à agir et à faire encore mieux qu’hier. Pour une Agriculture du vivant est un partenaire technique, susceptible d’accompagner les agriculteurs sur le stockage du carbone, la régénération des sols, la gestion de la ressource en eau et la préservation de la biodiversité de l’écosystème agricole. Le pari est audacieux et change nos habitudes en profondeur. Mais ce modèle dit de régénération, ou de conservation est aussi celui qui est le plus pertinent pour garantir une productivité élevée (et une bonne rémunération de l’agriculteur), la réduction de l'impact carbone (et ainsi une limitation du réchauffement climatique) et une amélioration de la qualité nutritionnelle des produits cultivés. La démarche repose sur des fondements scientifiques et un socle technique solide. Derrière ce défi, il y a un enjeu plus large : celui de la souveraineté alimentaire à l’heure où le dérèglement climatique commence à nous impacter dans notre région.
LTM : Ne pensez-vous pas que cette approche, très exigeante, prend le risque d’être boudée par les agriculteurs ?
B.G. : Ne relevant pas d’une certification, cette démarche de progrès laisse une grande liberté aux exploitants et se conjugue avec tous les cahiers des charges durables. L’agriculteur peut y entrer à son rythme, en sécurisant ses investissements et ses techniques. Cette approche a aussi l’avantage d’être adaptée aux terroirs de collecte de notre région (globalement moyennement productive) et au modèle agricole (polyculture-élevage). Les agriculteurs investis à la fois dans les productions céréalières et animales ont aussi en général un niveau technique élevé, ce qui est propice à la réussite de ces techniques innovantes. Les débouchés semblent aussi très importants régionalement.
Pour réussir cette transition agroécologique, nous devons embarquer toute la filière : les artisans boulangers, mais aussi l'ensemble des clients et partenaires soucieux de réduire leur impact environnemental. Plus la demande pour ces filières durables sera importante, plus le modèle sera pérenne et solide. Notre responsabilité de filière ne nous empêche pas de soutenir pleinement la boulangerie artisanale, qui reste notre métier de cœur et même notre cœur de métier ! L'ensemble de nos services d'accompagnement dédiés aux artisans boulangers montrent clairement nos engagements.
En savoir plus sur le pain spécial Grain Gourmand : http://tinyurl.com/34epzdbx
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