La protéine du lait de vache… sans lait et sans vache ! Voilà ce que mijotent les start-up françaises Verley Food et Standing Ovation dans leurs grandes cuves de fermentation. À ne pas confondre avec la culture de cellules en laboratoire. Leur technologie est déjà utilisée depuis plusieurs décennies dans l’agroalimentaire. « La majorité des fromages fabriqués en France emploient de la présure [coagulant du lait extrait du quatrième estomac de ruminants non sevrés, NDLR], obtenue par fermentation de précision, souligne Romain Chayot, docteur en microbiologie et cofondateur de Standing Ovation. Elle est aussi utilisée pour produire la vanilline, des vitamines… »
Un travail de bactéries et de levures
Dans le cas des protéines laitières, l’idée est de se passer de l’animal en déléguant le travail à des bactéries ou à des levures. Nourris avec des coproduits de l’industrie agroalimentaire, ces micro-organismes sont génétiquement modifiés pour produire la protéine voulue.
« Mais on ne mange pas l’organisme génétiquement modifié et il n’y en a pas trace dans le produit fini : ce n’est qu’un auxiliaire technologique, insiste Romain Chayot. À la fin du process, on obtient une protéine pure 100 % identique à celle animale. »
Standing Ovation s’est spécialisée dans la caséine, protéine principale du lait, qui confère aux produits laitiers leur goût et leurs qualités technologiques (filant, onctuosité, émulsifiant, etc.). « Utilisée seule dans une recette végane, elle peut en améliorer le goût et la texture, reprend le microbiologiste. En complément de protéines animales, elle peut réduire l’empreinte environnementale d’une recette, puisque notre caséine consomme moins d’eau et de terre et émet moins de gaz à effet de serre. Nous savons aussi créer une protéine à façon pour répondre aux besoins des professionnels qui veulent plus de crémeux, de moussant… »
Véganes et sans lactose
Verley Food s’est positionnée sur la protéine du lactosérum — la whey, prisée des sportifs — avec le même process et les mêmes promesses pour le bien-être animal et l’environnement. « L’intérêt principal est de l’intégrer dans un produit conventionnel à base de lait de vache pour améliorer sa valeur nutritionnelle : la demande décolle très fort pour les produits hyperprotéinés, comme les yaourts, glaces… », observe Thibault Lafargue, chargé du marketing de la start-up, qui propose aussi des protéines « fonctionnalisées » (par exemple, avec plus de pouvoir gélifiant).
Sans trace de lactose, la caséine et la whey véganes peuvent être consommées par les intolérants ; mais pas par les allergiques aux protéines de lait de vache, puisqu’elles sont strictement identiques.
Après avoir obtenu une pré-autorisation aux États-Unis, les deux start-up visent un lancement commercial en 2026 outre-Atlantique et en 2027 en Union européenne, auprès de qui les démarches de demande d’autorisation sont en cours. Elles ont déjà commencé à augmenter leur capacité de production sur leurs différents sites afin d’être au rendez-vous.