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Présentation des plantes comestibles aux chefs à la ferme de Charly, dans le Rhône.
Présentation des plantes comestibles aux chefs à la ferme de Charly, dans le Rhône. © B. LAFEUILLE

Des variétés végétales méconnues ou oubliées en test pour les pâtisseries de demain

La troisième édition de l’évènement Collections végétales s’est tenue dans le Rhône le 30 juin dernier, invitant des chefs cuisiniers et pâtissiers à découvrir et à évaluer des variétés adaptées aux enjeux climatiques et sociétaux.

Au moindre froissement de ses feuilles, les effluves de l’origan de Syrie s’élèvent dans l’air chaud. « Il sent très fort, j’aimerais beaucoup avoir votre avis dessus, indique Stéphane Crozat à l’adresse des chefs cuisiniers et pâtissiers qui l’entourent. Vous pouvez tous en emporter un peu. »

Sous un soleil de plomb, armés de paniers en osier et de sachets kraft, ils sont quelques dizaines à suivre le directeur du Centre de ressources de botanique appliquée (CRBA) à travers les micro-massifs d’arbustes fruitiers, les céréales, légumes maraîchers et autres plantes comestibles appartenant à des variétés méconnues, exotiques ou tombées dans l’oubli.

Ce 30 juin 2025 se tient la troisième édition de Collections végétales, un évènement organisé par la Fondation pour la cuisine durable by Olivier Ginon avec le CRBA à Charly, dans le Rhône. Les chefs sont invités à découvrir les variétés qui y sont cultivées à des fins de conservation ou de test par le CRBA ; sur 2,3 hectares (ha) prêtés par la municipalité.

Ils sont autorisés à sentir, toucher, goûter, et même emporter des échantillons des différentes variétés de pêches, abricots, courgettes et autres produits de saison. Un carré leur est même réservé : le “potager des chefs”, créé il y a trois ans, dans lequel sont cultivées des variétés de légumes, amaranthes et plantes aromatiques attendant d’être testées en cuisine.

Exploiter l’existant plutôt que de créer de nouvelles variétés

« Nous cultivons sur la ferme cent vingt variétés locales en conservation ; et d’autres, exotiques, en acclimatation, détaille Stéphane Crozat. Nous avons par ailleurs quatre mille variétés conservées sur notre plateforme logistique à Lyon, en chambre froide ou en congélation, où elles peuvent être stockées trente à soixante-dix ans. La mission du CRBA est de mettre ces ressources génétiques — qui sont à la base de notre alimentation — à la disposition de tous. C’est crucial, dans un contexte où il faut s’adapter aux dérèglements climatiques. »

La philosophie du CRBA s’oppose à l’approche conventionnelle consistant à créer de nouvelles variétés pour s’adapter aux enjeux climatiques et aux attentes sociétales (en matière de nutrition et de pesticides, notamment).

Présentation des plantes comestibles aux chefs à la ferme de Charly, dans le Rhône. (© B. LAFEUILLE)

« La création d’une variété en laboratoire prend au moins dix ans et coûte très cher, alors qu’il existe déjà des tas de ressources génétiques à se réapproprier, estime Stéphane Corzat. Surtout, les variétés existantes ont co-évolué avec leur environnement, contrairement à celles sorties d’un laboratoire : or, c’est l'une des clés pour s’adapter au changement climatique. »

Testées et validées par des chefs pâtissiers et cuisiniers

Afin de faire émerger les variétés répondant aux enjeux de demain, l’évènement Collections végétales s’inscrit dans un protocole de sélection participative bien rodé, qui s’étale sur trois ans.

« La première année, on cultive cent cinquante variétés de courgettes, par exemple, pour les comparer sur des critères agronomiques, comme le comportement face à la sécheresse ou aux maladies, explique Stéphane Crozat. La deuxième année, on en conserve quarante et on ajoute des critères. La troisième année, il en restera une dizaine à évaluer, avec encore davantage de critères. On en sélectionnera pour finir trois ou quatre, confiées à des agriculteurs pour les multiplier avant d’être distribuées gratuitement sur le territoire. »

C’est au terme de la troisième année que s’ajoute la dégustation par les chefs, qui va aider à sélectionner les produits sur leurs qualités organoleptiques. Ce 30 juin, ils sont sollicités pour noter la texture, l’apparence et la saveur d’une douzaine de variétés de laitues. Les gagnantes seront multipliées dans la ferme semencière, et disponibles dès 2026 pour les agriculteurs du territoire. Charge à eux de diffuser ces variétés... et aux chefs de s’en faire les ambassadeurs.

D’ici là, ceux présents lors de cette édition 2025 auront fait leurs retours sur les variétés de fruits, légumes et plantes aromatiques dont ils ont rempli leur petit panier, afin d’aiguiller les futurs choix de mise en culture du CRBA. « J’aimerais beaucoup avoir davantage de relations avec les pâtissiers, pour acquérir une meilleure connaissance de leurs besoins », glisse Stéphane Crozat.

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