Loin de se limiter à une simple contrainte opérationnelle, la gestion des invendus constitue un axe d’optimisation financière à travers la mise en place de dispositifs fiscaux incitatifs, notamment le crédit d’impôt sur les dons alimentaires. Ce mécanisme offre une réduction significative de l’impôt sur les sociétés tout en renforçant l’ancrage social et environnemental des entreprises concernées. Dans le même temps, face à la précarisation croissante d’une partie de la population et à l’impératif de réduction du gaspillage alimentaire, la redistribution des invendus s’inscrit dans une logique d’optimisation des flux de production.
Nombre d’artisans recourent à des plateformes de revalorisation, telles que Too Good To Go ou Phenix, qui permettent une cession des invendus à prix réduit, bien que cette démarche ne soit pas toujours financièrement optimale. Une alternative méconnue, mais juridiquement encadrée, consiste à faire don de ces produits à des associations reconnues d’utilité publique afin de bénéficier d’un crédit d’impôt.
Don à des associations
Le dispositif repose sur une évaluation fiscale forfaitaire des biens donnés. Conformément aux dispositions en vigueur, les entreprises qui effectuent des dons alimentaires peuvent déduire 60 % de la valeur des produits remis aux associations, dans la limite de 20 000 € ou de 5 ‰ de leur chiffre d’affaires annuel, selon la borne la plus favorable.
Prenons un exemple chiffré : une boulangerie ayant donné 3 000 kg de pains et de viennoiseries sur une année pourra déclarer une valeur comptable de 3 000 €, débouchant sur un crédit d’impôt de 1 980 €, directement déductible de l’impôt sur les sociétés. Les étapes à respecter sont : l’identification des structures éligibles à la réception des invendus (par exemple : Le Pain partagé, les Banques alimentaires, Pain contre la faim) ; la mise en place d’un processus de collecte structuré avec pesée des volumes cédés ; l’émission en fin d’exercice du document Cerfa n° 11580 par l’organisme bénéficiaire, attestant de la nature et de la quantité des produits remis ; la déclaration comptable et l’intégration de la réduction d’impôt dans l’assiette fiscale de l’entreprise.
Au-delà du gain fiscal direct, cette stratégie présente plusieurs externalités positives. Il s’agit d’un levier d’engagement sociétal. Contribuer à la sécurité alimentaire des populations vulnérables renforce la légitimité sociale de l’entreprise. Mais aussi d’un avantage concurrentiel immatériel : les consommateurs sont de plus en plus enclins à préférer des entreprises engagées dans une démarche responsable. De plus, en favorisant la redistribution, les commerces réduisent leurs frais de destruction des produits invendus et répondent aux exigences réglementaires ainsi qu'aux engagements en matière de réduction du gaspillage alimentaire.
Les boulangeries exclusivement bio ne pouvant pas toujours optimiser leur fiscalité via ce dispositif, disposent d’une alternative intéressante : la cession de leurs invendus à des structures de transformation, comme les biscuits Kignon à travers la biscuiterie Handi-Gaspi, qui rachètent les pains bio invendus en vue de les convertir en produits secondaires, tels que les cookies. Cette valorisation permet non seulement d’éviter le gaspillage mais aussi de générer un revenu additionnel.
En résumé
Loin d’être une simple contrainte de gestion, la valorisation des invendus via le mécanisme du crédit d’impôt constitue une stratégie intégrée conciliant performance économique, impact social et alignement avec les enjeux environnementaux. Cette approche permet aux artisans boulangers-pâtissiers de transformer une perte potentielle en avantage concurrentiel, tout en répondant aux attentes d’une société en mutation.