Rue de la Chine, à Ménilmontant (Paris 20e). La boutique-fournil rouge attire en continu des clients aux profils variés, tous inquiets de savoir s’il reste du pain. À la suite du reportage d’Envoyé Spécial (21 janvier) consacré à la démarche de Pane Vivo, la promesse d’un pain au gluten digeste et bon pour la santé a fait son œuvre : l’équipe tourne à plein régime et a entamé les aménagements pour s’agrandir.
Les trois piliers du pain de demain
Adriano Farano est un polymathe : il informe autant qu’il enfourne. En 2010, il a lancé une start-up en Californie à la suite du succès de Café-Babel, un site d’information hybride et multilingue qui lui a permis de décrocher une bourse à l'université de Stanford. Fabriquant son pain à la maison, l’enjeu de la qualité est devenu sa marotte. À force d’enquêtes et de recherches, il dénonce la situation de l’industrie du pain : blés issus de variétés modernes (blés japonais nains qui requièrent engrais, herbicides et pesticides sur un sol auquel son biotope ne s’est pas adapté), mouture sur cylindres, levure...
« Le pain peut changer le monde »
Selon lui, ces optimisations modernes ont conduit à appauvrir la filière blé-farine-pain. Il qualifie son livre de plaidoyer pour « un pain qui fait du bien », credo blasonné sur la devanture de sa boutique.
Il propose une offre réduite entièrement à base de farine bio de blé dur ancien, d’eau et de sel marin de l’Île de Ré, avec une fermentation de plus de vingt heures au Viviana, levain plus que centenaire : le Panone en 2 kg, le Sapiens en 1 kg, le Gaïa en 400 g, deux spéciaux : le Livia à l’olive et romarin et le Carpe Diem aux figues et chocolat ; le Flambetto, petit format en forme de flamme, au chocolat, et le Figuetto à la figue. L’ensemble des matières premières est bio.
Là où la tendance des blés anciens peut parfois relever d’une certaine nostalgie, il revendique une approche tripartite : des blés anciens, une mouture intégrale aux meules de pierre et un pain fermenté au levain naturel.
Le prix de la santé
Son livre-manuel détaille toute sa démarche, entamée il y trois ans et demi : on y retrouve les analyses scientifiques qui l’ont amené à choisir le Russello, une variété ancienne de blé dur de Sicile à la teneur forte en protéines (14 %) et qui ne présente aucun résidu de protéines insolubles.
Il déplore un manque de transparence de l'étiquetage : « Pourquoi ne pas indiquer sur les étiquettes la variété de céréale utilisée, l’année de récolte, la présence d’additifs et le taux d’extraction ? »
Les pains aux farines de blés anciens sont riches en minéraux et antioxydants. Les clients sont unanimes concernant leur digestibilité, y compris par des intolérants aux farines de blé, qui peuvent à nouveau manger normalement du pain.
Pour Adriano, si le client ne s’arrête qu’au produit qu’il achète (et il est prêt à y mettre le prix), l’équation gagnante implique toute la filière : « Le pain peut changer le monde. »