La deuxième boutique Graine a ouvert ce 6 février rue de Bagnolet — peu de temps après son second passage dans l’émission La Meilleure boulangerie de France —, dans une partie du 20e arrondissement parisien aux airs de village. Si la toute première affaire de Benjamin et Estelle Vigreux à Jarnac (Charente) bénéficiait déjà d’un emplacement de choix, sur la place de l’église, cette dernière adresse jouit d’un cachet certain : une petite artère pavée qui conduit vers la rue commerçante Saint-Blaise, une pharmacie, un bar-café, ainsi qu’une petite place en contrebas de l’église Saint-Germain de Charonne. « Nous n’avons pas tant craqué pour l’emplacement que pour le local, car il répond à tous nos besoins logistiques : de l’espace, de plain-pied et avec une petite cour à l’arrière qui facilite les livraisons », explique Benjamin Vigreux, tout en sortant de longues brioches tressées du four.

Toutefois, à l’image de leur première boutique ouverte dans le concurrentiel 11e arrondissement en mai 2021, du soin et de la personnalité ont été apportés à la décoration, afin de mettre en valeur le pain et la gamme, entièrement faite maison. L’agence Best Atlantic les a accompagnés pour les deux boutiques, même si le couple avait une idée précise de ce qu’il voulait : un fournil ouvert à la vue du client pour Benjamin, une décoration chaleureuse pour Estelle, qui a choisi le bleu comme couleur principale pour les deux établissements.

Structurer la fabrication
Conscients de l’impact de la notoriété qui accompagne la participation à l’émission de M6 pour l’avoir vécu, la réalisation de leur projet d’ouverture d’un deuxième magasin est devenue presque urgente au regard du gain d’affluence quasi immédiat qui s’est ensuivi : « On se retrouvait à dix à la vente, c’est intenable pour les équipes. »
Les mètres carrés parisiens sont rares et précieux, la création d’un deuxième commerce vient aider à structurer et à rationaliser la fabrication : la pâtisserie est intégralement réalisée dans la boutique du 20e, la viennoiserie dans celle du 11e.

Après son compagnonnage et l’enseignement reçu au cours de l’année de voyage, Benjamin n’a de cesse d’apprendre : « Le levain, je l’ai découvert auprès des Compagnons du devoir. Les farines anciennes, c’est plus tard que je les ai travaillées. Même pour le méteil, j’ai découvert celui des champs alors que j’avais appris à mélanger deux farines dans un bac », raconte le boulanger. Il a depuis remporté le premier prix au concours national du pain bio avec sa meule bio longue fermentation au levain naturel, à base de T110 de la ferme d’Égreville — située à Saint-Germain-Laxis (Seine-et-Marne).
Une offre très boulangère
Aujourd’hui, l’offre de la boutique du 20e est très boulangère. Dès l’entrée, près d’une dizaine de pains à la coupe sont présentés, du complet au quinoa, du seigle au nordique décliné aux fruits, du khorasan aux graines, pains au maïs ou aux noix, pain de mie, focaccias, etc. Ce sont les moulins Foricher qui fournissent le boulanger en farines, avec en complément celles de la ferme d’Égreville, acquises auprès de son propriétaire, Mathieu Coupey, agriculteur-meunier.

Des gâteaux de voyage, des cakes, des financiers, ainsi qu’un coin épicerie viennent compléter la gamme. « La pâtisserie n’est pas notre cœur de métier, je la laisse à ceux qui la maîtrisent, et nous préférons nous concentrer sur des produits qui se conservent », précise l’artisan. Les levains (levain liquide, levain dur qu’il nourrit au miel et à la farine de seigle) et les longues fermentations (de douze à vingt-quatre heures) sont prépondérants et fondamentaux dans sa fabrication. L’offre snacking est également bien développée, avec des quiches et des sandwichs maison généreux, complétés d’une sélection de boissons locales et artisanales.

Le geste de Benjamin est sûr. Pour lui, les machines facilitent grandement les parties les plus pénibles et chronophages du métier, sans toutefois prendre le pas sur la main de l’artisan. « Une chambre de fermentation ne se substitue pas à l’organisation et à la maîtrise des temps de pousse et de fermentation. L’usage d’un laminoir et de pétrins, au vu des technologies disponibles, a désormais vraiment amélioré certaines étapes de notre travail », argumente-t-il, évoquant un métier qu’il a vu évoluer très rapidement entre ses débuts en 2014 dans une ville de province, et ce qu’il vit actuellement à Paris.

Il se reconnaît lui-même comme traditionnel : il aime participer aux concours proposés par la Confédération nationale de la boulangerie-pâtisserie française et impliquer ses équipes. « Pour celui de la meilleure baguette, tout le monde réalise la sienne et on vote pour celle qui sera présentée avec le nom du boulanger qui l’aura réalisée. » Benjamin et Estelle plantent aussi les graines d’un succès collectif.