Historiquement, l'artisanat s'est toujours distingué de l'industrie par une fabrication manuelle. Ce savoir-faire pouvait être valorisé commercialement car la qualité des produits était bien distincte. « Aujourd'hui l'industrie a atteint des niveaux tels que l'artisanat parvient plus difficilement à se démarquer sur la qualité. Pour être compétitif, dans un contexte de pénurie de main d'oeuvre, il est incité à automatiser toujours un peu plus sa production. Mais jusqu'où doit-il aller ? », s'interroge Guillaume Crase, responsable commercial et marketing Artisanat chez Werner & Pfleiderer France.
Ligne de démarcation Après avoir abandonné le travail manuel de la pâte au profit de la mécanisation, l'artisan ne dispose plus guère de lieux où il peut apporter sa valeur ajoutée, si ce n'est dans la pâte elle-même (farine/ fermentation/pétrissage). Mais là aussi, la concurrence a nettement progressé… Soulignons néanmoins que de plus en plus de « petits » boulangers reviennent au façonnage à la main, avec une réussite commerciale impressionnante. « L'artisan est poussé à se démarquer soit sur le terrain marketing, par la créativité, l'accueil, le conseil ou le service, soit sur le terrain de la productivité. De plus en plus de grosses boulangeries « artisanales » mettent en place des lignes totalement automatisées. Mais peut-on encore parler d'artisanat ? Le débat est ouvert… Pour la boulangerie traditionnelle, nous défendons l'idée d'un certain équilibre entre une fabrication essentiellement « manuelle » sur ce qui fait le coeur du métier et une production davantage automatisée », reconnaît-il.
Compact Pour un grand nombre d'entreprises, un des principaux freins à la mécanisation des process reste le manque de place. Aussi de plus en plus de fabricants cherchent-ils aujourd'hui à minimiser au maximum la taille de leurs groupes automatiques pour les adapter aux artisans. « Le groupe Pro+ que nous venons de sortir va encore plus loin en terme d'encombrement au sol et peut produire jusqu'à 1380 pâtons/h. Il peut intégrer une peseuse volumétrique et une façonneuse horizontale », indique Yves Decoster, responsable marketing chez Jac. De même, le concept Bakepod de Mérand se résume à un investissement très limité : un pétrin, une chambre froide, une diviseuse-formeuse (Atoupains ou Aquapan) et un four. Grâce à une fermentation lente (8-72 h) en chambre froide (3-4°C), on obtient une pâte prête à être divisée-formée (en une étape) et enfournée sans délai. Un gain de place considérable pour une productivité et une réactivité nettement augmentées. Vous l'aurez compris, l'artisanat doit miser sur son savoir-faire pour pérenniser le long terme, et en même temps doper sa productivité pour rentabiliser le court terme.
Le choix de l'automatisation 6 bonnes questions à se poser 1 La productivité : la machine me permettra-t-elle de répondre à une demande de volume ? de diversification ? à un manque de main d'oeuvre ? 2 La rentabilité : la machine augmentera-t-elle les marges, le volume des ventes, l'excédent brut d'exploitation ? 3 La qualité : la machine améliorera-t-elle le visuel, le goût et la texture des produits ? 4 L'image : l'image artisanale et la notoriété du commerce seront-elle mises en péril ? Pourrai-je ouvrir mon fournil au grand public ? 5 L'éthique : la transmission et la sauvegarde du savoir-faire traditionnel est-il important à mes yeux ? La machine fait-elle disparaître ces valeurs ou permet-elle de les protéger ? 6 La stratégie : la mécanisation est-elle en phase avec ma vision, mon positionnement de fond ? Me permet-elle de concurrencer la grande distribution, de m'en démarquer ? |
par Armand Tandeau (publié le 12 octobre 2012)