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L'industrie levurière européenne sous la pression écologiste

Entretien avec Gérard Blin, président de la Cofalec (Confédération des fabricants de levure de l'Union européenne).

La Toque Magazine : Vous qui représentez l'industrie de la levure en Europe, pouvez-vous expliquer pourquoi il n'existe toujours pas de levure bio ?

Gérard Blin : « Il est vrai que nous avons défendu notre cause face au lobby écologiste afin que la levure n'entre pas dans le champ d'application de la réglementation bio, d'autant que celle-ci nous interdit de conserver les qualificatifs historiques de "bio-industrie" et de "levure biologique". Mais maintenant que la législation est là, nous l'appliquerons scrupuleusement. Le bio implique d'énormes difficultés que les levuriers pourront dépasser sans doute quand ils seront sûrs de pouvoir en vendre. On est donc en phase exploratoire sur un marché incertain. »

Est-ce un défi difficile à surmonter ?

« Oui. Nous sommes tributaires des mélasses de betterave et de canne qui apportent le sucre à la levure. La production sucrière européenne a fortement baissé et l'industrie du bioéthanol se développe par ailleurs. Comme elle est liée aux groupes sucriers, elle se sert la première. On a donc déjà à la base un enjeu important à régler pour l'avenir. Alors imaginez si on doit aller chercher des mélasses bio ! En plus, il y a un réel problème de process industriel. Nous utilisons en effet des acides et des micronutriments d'origine minérale, interdits en bio. Il faudrait passer par des substituts organiques, ce qui est loin d'être simple. Mais difficile ne veut pas dire impossible. Une entreprise allemande s'y est essayée. Certes, on est encore loin de la qualité requise. Mais c'est peut-être là le début de quelque chose. »

Où en est l'industrie de la levure sur les questions environnementales ?

« Il faut savoir que le levurier dépollue le sous-produit des raffineries de sucre. Son activité s'inscrit déjà dans une valorisation d'un déchet industriel. Nos rejets, les vinasses, sont concentrées et vendues pour l'alimentation animale. L'eau qui en résulte est totalement épurée. Lorsqu'on investit 1 € dans un outil de production, il faut rajouter 0,5 € pour que celui-ci réponde aux normes environnementales. Il reste ensuite la question de l'empreinte carbone. Comme toute industrie, nous avons besoin d'énergie et nous disposons pour cela de quotas de dioxyde de carbone. Ceux-ci vont aller en diminuant. Il faut donc qu'on anticipe. Notre organisation mène une vaste étude pour évaluer l'impact carbone de la levure. Cette démarche de progrès vise à optimiser les postes les plus gourmands en énergies fossiles. »

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N.B. : L'industrie européenne de la levure inaugure son nouveau portail : www.cofalec.com

par Armand Tandeau (publié le 8 novembre 2010)

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