La routine : voilà ce qui tue toute possibilité de vendre plus. Vous le savez (et vous en êtes souvent le témoin impuissant), en entrant dans le magasin, le client sait d'avance ce qu'il veut acheter. Le plus souvent, la discussion qui s'engage est réduite à sa plus simple expression et rien ne vient déranger cet échange purement conventionnel. Pour reprendre la main sur une vente aussi codifiée, il faut y investir de l'énergie. Objectif : séduire les clients pour les faire évoluer dans leurs habitudes.
La magie de NoëlPour Pascal Roger, qui tient avec son épouse une grande boulangerie-pâtisserie à Prix-lès-Mézières (08), cela ne fait aucun doute : le secret des ventes additionnelles tient à l'ambiance festive du magasin. « Les clients apprécient énormément l'atmosphère chaleureuse de l'Avent qui précède Noël. Pour créer une ambiance féérique originale, ce n'est pas avec trois bouts de guirlandes poussiéreuses et un Père Noël défraîchi qu'on peut y parvenir ! Parents et enfants doivent pouvoir s'émerveiller à l'extérieur du magasin, comme à l'intérieur. Cette année, nous allons louer des automates qu'on mettra en vitrines. Nous allons lancer une méga animation entre le 1er et le 24 décembre sur le principe du calendrier de l'Avent. Chaque jour, les clients découvriront une surprise : une dégustation, un jeu, une promotion, un cadeau… 4000 flyers seront distribués pour communiquer sur l'événement. Nous proposerons une offre sur les bûchettes (3 achetées, 1 offerte) qui permettra aux clients de découvrir les différents parfums de la gamme. Nous en profiterons pour valoriser toute notre production de Noël : pains spéciaux, chocolats, bûches, pains d'épices, pâtisseries alsaciennes… Les produits susceptibles de faire des ventes additionnelles sont souvent ceux qui permettent d'apporter chez soi un peu de cette ambiance chaleureuse du magasin. Ils doivent pouvoir être offerts en petit cadeau ou servir à faire une belle table, à décorer le sapin… Le visuel et la présentation de ces produits d'impulsion doivent être travaillés à cet effet », explique-t-il.
Avant l'Avent Sylvie Reynaud travaillait autrefois dans la vente de produits bancaires. Elle gère aujourd'hui avec son mari une boulangerie réputée à Ablis (78). Pour elle, la vente additionnelle n'est tenable que si elle fonctionne sur un échange gagnant/ gagnant. « Tout le secret de cette vente réside dans la relation qui s'est tissée au fil de l'année avec chaque client. On ne peut pas vouloir vendre plus pour les fêtes si on ne connaît pas d'abord chacun d'eux, au moins les habitués. Les anciens aiment par exemple qu'on connaisse leur nom, leurs habitudes d'achat et leurs préoccupations (de santé notamment). Les quadra et quinqua vont être sensibles aux petits services que vous pouvez proposer et au fait que vous vous investissiez dans la vie locale. L'objectif d'une vendeuse n'est pas de chercher le bon stratagème qui permettra de vendre plus, mais de comprendre au mieux les goûts et les besoins réels de chaque personne pour pouvoir y répondre avec justesse. Quand ils sont en confiance, les clients parlent plus facilement de leur vie : l'arrivée des petits-enfants, une soirée entre amis, un anniversaire, une maladie… En repérant leurs habitudes d'achat, on peut aussi avoir une idée de leur aisance financière. C'est avec toutes ces données qu'on peut trouver la bonne idée qui fera tout de suite mouche. La confiance est indispensable, non seulement pour obtenir de l'information, mais aussi pour qu'une proposition débouche sur une vente additionnelle », indique-t-elle. Notez que c'est aussi avec des petits gestes d'attention qu'on construit une relation dans le temps : mettre de côté un produit qu'un client a l'habitude de demander, prendre des nouvelles suite à un problème de santé, demander si le produit vendu la veille a été apprécié… La « positive attitude » se décline de mille manières !
La Toque : Quels conseils pouvez- vous donner pour doper les ventes en boulangerie-pâtisserie, en particulier au moment des fêtes ? Gérard Baillard : En boulangerie, la relation d'achat est très stéréotypée et a finalement très peu évolué en comparaison à d'autres secteurs. Le client arrive avec une idée précise et repart sans surprise avec le produit sous le bras. La boulangerie est pourtant un secteur privilégié pour les ventes additionnelles : les clients sont nombreux, la fréquence d'achat est élevée et les dépenses par acte sont faibles. Mais ce potentiel est souvent peu ou mal exploité. Pour augmenter l'efficacité commerciale d'un point de vente, on peut par exemple faire vivre au client une expérience d'achat à travers une animation conviviale ou une ambiance festive. Dans une boutique traditionnelle, il n'est bien sûr pas toujours possible de conduire ce type de dispositif tous les jours, mais on peut très bien l'imaginer pour les occasions qui procurent une certaine magie comme Noël ou la Saint-Sylvestre. La mise en avant de pâtisseries créées pour l'occasion, la théâtralisation des vendeuses, la scénographie de l'espace de vente ou la réalisation d'animations particulières sont des outils à exploiter à travers un concept défini.
L.T. : Quelles sont les techniques de ventes additionnelles les plus performantes ? G.B. : Doubler, voire tripler, le panier moyen du client reste relativement aisé grâce à des techniques faciles à mettre en oeuvre : offre découverte promotionnelle, un gratuit sur un lot acheté, dégustation de produits avec des invitations toutes simples comme « Allez-y, servez-vous, c'est une nouveauté pour les fêtes », « Tenez, je vous mets ce petit biscuit de Noël en plus, vous me direz ce que vous en pensez », « Vous vous demandez ce que c'est ? Regardez, je vais vous montrer : c'est prévu pour la table du réveillon ». L'investissement est faible en coût matière et fort en impact client. En résumé, les ventes peuvent commencer à repartir à la hausse quand on parvient à enrichir les échanges avec les clients et quand on arrive à transformer un acte d'achat rébarbatif en un moment plus sympa, notamment par l'entremise de petits gestes commerciaux.
par Armand Tandeau (publié le 19 décembre 2013)