Ce quinquagénaire, savoyard d’origine, rêvait depuis ses 8 ans de racheter un grand fournil. Ingénieur, forgé par l’expérience d’une vie professionnelle dans de grandes entreprises, il retourne à l’école pour préparer sa reconversion. Diplômé de l’Executive MBA HEC Paris en 2010, avec, pour l’anecdote, un mémoire de fin d’études portant sur la reprise d’une boulangerie, il enchaîne avec un CAP de boulanger. En 2011, il reprend un fournil à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), puis un autre trois ans plus tard à Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis). La priorité est donnée à la fusion des activités sur un seul site de production, avec à la clé un nouveau fournil et une équipe fidèle et engagée.
Façonnage à la main pour certaines recettes. C. De Almeida
Fournir du bon pain bio artisanal
Patrick a conçu et construit de bout en bout son nouveau fournil, dans lequel il a emménagé en 2017, et qu’on pourrait comparer à une dark bakery (en référence aux dark kitchens). En effet, il ne distribue qu’en direct et fournit de manière très large restaurants, hôtels, épiceries, écoles (Paris et petite couronne), et également les particuliers. Pas de boutique en physique, mais un site internet pour régler ses commandes 24 heures/24 ainsi qu’un service de livraison maison optimisé. Côté fabrication, le sourcing est bio à 90 % et local à 100 %, avec pétrissage lent, pointage en cuve, façonnage à la main pour certaines recettes, pousse lente et cuisson sur soles de pierre. Pour répondre aux exigences (les siennes et celles de ses clients), la plupart des recettes sont au levain, parfois avec un peu de levure, comme pour le pain Signature, un campagne subtil et peu acide, qui ne prend pas le dessus sur un plat. Parfait pour les restaurants qui souhaitent séduire une clientèle large.
L’idée qu’il se fait d’un bon pain artisanal. C. De Almeida
La pâte de l’ingénieur n’est jamais bien loin pour faire coïncider la réalité avec l’idée qu’il a en tête. Après la qualité des pains, les risques TMS sont sa principale préoccupation au moment du choix de l’équipement du fournil. Pour faire du volume tout en restant artisanal, il a, par exemple, optimisé le vaste laboratoire avec un automate d’enfournement puisqu’il avait l’exigence de ne travailler qu’avec des fours à sole de pierre. « Cet équipement n’a pas d’incidence sur la qualité des pains, c’est simplement l’automatisation d’une manutention pénible, évitée à mes boulangers. » Si les coûts de la dark boulangerie ne comptent pas de seuil ni de personnel de vente, ils se retrouvent côté logistique et livraison : la flotte d’utilitaires a été optimisée pour qu’en toutes saisons le pain soit le moins impacté par le voyage, grâce un système d’isolation, de ventilation et de chauffage. La livraison par vélo est quant à elle externalisée. « Mon ambition était de faire du bon pain artisanal, bio et local, avec des exigences fortes en termes d’ergonomie et de protection de mes boulangers. Je n’ai d’ailleurs pas de turnover », explique Patrick Gomez, avant de conclure : « Je me sens à ma place comme jamais en exerçant ce métier. »
Patrick Gomez se sent plus que jamais à sa place dans cette profession. C. De Almeida