Une fois les blés et farines analysés en laboratoire, comme vu dans le numéro 368 de La Toque magazine, des tests de panification sont effectués, une étape clé dans la filière blé-farine-pain. Il existe différents tests normalisés par l’Association française de normalisation (Afnor), dont le NF V03-716 (ex-Bipea) pour le pain courant et le NF V03-800 pour la farine de tradition, développé par le Lempa-Laboratoire national de la boulangerie-pâtisserie. « Chaque type de farine a son test aujourd’hui, à l’exception de la T110 et de la T150 », relève Pierre-Tristan Fleury, directeur du Lempa (pour Laboratoire d’essais des matériels et produits alimentaires), basé à Rouen (Seine-Maritime).
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Ces tests s’appuient sur des diagrammes définissant précisément la fabrication du pain à chaque étape : du pétrissage au pointage, jusqu’au façonnage et à la cuisson (vitesse, durée, température, matériel utilisé, etc.). Comme les analyses physico-chimiques sur les blés et les moutures, ils sont réitérés tout au long de l’année afin de garantir une qualité et, surtout, une régularité des farines aux boulangers.
Les laboratoires d’analyse accrédités ainsi que certains moulins abritent des fournils d’application équipés de banc de (cinq ou dix, voire plus) pétrins d’essai, permettant de réaliser des tests comparatifs sur les farines en lançant plusieurs panifications simultanément selon une recette donnée.
À chaque étape, différents paramètres sont relevés (température, hydrométrie, etc.) et reportés dans une grille pour une analyse objective de la qualité de la pâte et du pain, point par point. Cette évaluation de la qualité se répartit en trois phases : au pétrin, au façonnage et après cuisson.
Avant fermentation, l’objectif est de jauger le collant des pâtes, le lissage, l’extensibilité, l’élasticité, le relâchement. Avant la mise au four, l’analyse se porte sur la détente, l’allongement, le déchirement, etc. Pour le produit fini, il s’agit d’évaluer sa forme, sa régularité, son développement, la couleur (de la croûte et de la mie), son aspect, son odeur, sa croustillance, et son goût bien sûr, le critère le plus subjectif. « Il y a une trentaine de descripteurs au total », note Pierre-Tristan Fleury.
À l’issue des tests de panification, on obtient une note pondérée sur 300 points qui traduit la valeur boulangère d’une farine. « Chaque cahier des charges a ses propres exigences. Pour la farine de tradition française Label Rouge, la note ne peut être inférieure à 260 », précise le directeur du Lempa, qui analyse un tiers de la meunerie française.
Corriger les défauts en assemblant différents lots de farine
Ces résultats contribuent à guider les moulins et les mixeurs dans l’ajustement de leurs maquettes de farines, en leur suggérant l’assemblage de différents lots aux propriétés complémentaires, par exemple.
« Dans le cadre d’un mélange, le but est de corriger les défauts identifiés lors des tests », indique Cédric Tailfer, directeur technique chez Millbäker, implanté à Torcy-le-Petit (Aube). Également fabricant de solutions pour la filière blé-farine-pain, cette entreprise de 60 salariés peut suggérer l’emploi de tel correcteur, améliorant ou ingrédient afin d’optimiser de manière ciblée la qualité des farines sur les plans technologique, sensoriel ou nutritionnel. Et ce, dans le respect des cahiers des charges réglementaires (farine de meule Label Rouge, par exemple) ou propres aux moulins pour la création de produits exclusifs.
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Dans le même esprit, certains meuniers proposent à leurs clients l’élaboration de farines signatures pour des applications spécifiques, en panification mais aussi en biscuiterie, crêperie, etc. Dernier test, grandeur nature cette fois, pour les moutures dûment analysées et validées : la panification chez les boulangers, qui peuvent être amenés à leur tour à faire des retours qualité aux meuniers en vue d’ultimes retouches sur les maquettes de farines.