Ce citron d’un jaune lumineux à maturité optimale, cueilli à la main dès décembre, provient d’une localité où les terrains cultivables sont rarissimes et escarpés. À Menton, la montagne semble tomber dans la mer. Les vergers de petites superficies sont aménagés en terrasses appelées « restanques ». Elles profitent d’un climat exceptionnellement doux, presque subtropical. Protégés du gel, les agrumes s’épanouissent à ciel ouvert. Depuis 500 ans, le Mentonnais (SRA 625) y est cultivé. Il a connu son âge d’or au XVIIIe siècle, déjà utilisé pour les meilleures tables d’Europe et d’Amérique du Nord. Et il servait aux marins à lutter contre les carences en vitamine C lors des longues navigations. Le déclin des cultures de citronniers s’amorce avec l’essor du tourisme sur la Côte d’Azur. Des villas remplacent les vergers. Le citron mentonnais aurait pu disparaître mais en 1992, face à l’artificialisation des sols, la Ville de Menton s’est engagée à préserver les terres arables de la pression immobilière. Des aides financières ont permis de replanter des jeunes plants de SRA 625. Les agrumiculteurs sont une soixantaine aujourd’hui, réunis en association (sous le nom Association pour la promotion du citron de Menton).
Certains chefs étoilés ne s’y sont pas trompés en se fournissant en citrons de Menton. Maison Gannac
Un fruit signature
Gros fruit charnu, à l’écorce cabossée et gorgée d’huiles essentielles, le citron de Menton a son indication géographique protégée (IGP) depuis 2015. Il n’est jamais amer, et même l’albédo (le zist blanc) est consommable. Le zeste aux arômes puissants et la pulpe à l’acidité modérée ont fait de ce fruit délicat une référence de la gastronomie sucrée et salée. Les citrons de Menton sont livrés avec une feuille attachée au pédoncule, qui garantit sa fraîcheur. Les chefs étoilés Mauro Colagreco et Alain Ducasse, la cheffe Muriel Aublet-Cuvelier subliment leurs créations avec l’inimitable Mentonnais. Il en est de même pour de nombreux chocolatiers, dont la famille Bellanger, et pour des artisans tel Michel Belin, (dont les boutiques se trouvent à Albi, dans le Tarn, et à Nagoya, au Japon).
De père en fils
Ces professionnels font confiance à l’un des précurseurs de la renaissance du citron de Menton, le paysagiste et pépiniériste Laurent Gannac.
Les visiteurs peuvent visiter un des vergers bio de Menton, chez Laurent Gannac. Maison Gannac
La Maison Gannac dispose de sept vergers bio, dont l’un d’eux est ouvert aux visiteurs curieux de découvrir l’agrumiculture. Le fils de Laurent, Adrien, a quant à lui développé une activité de transformation. Il propose aux professionnels des produits d’épicerie fine à base d’agrumes, des jus et zeste congelés, des tranches de citrons déshydratées, une poudre de citron complet, des citrons confits, et l’Onctueux, qui est une crème d’albédo cuit.
Les citrons déshydratés développés par Adrien Gannac. Maison Gannac
La poudre de citron de Menton, pour les préparations culinaires. Maison Gannac